lundi 3 février 2020

Le Vieil homme et l'enfant (Claude Berri, 1966)

Dans les premières minutes du Vieil homme et l'enfant, on retrouve une scène récurrente du court-métrage Le Poulet : le gosse court, plein de joie, rejoindre ses parents dans leur lit. C'est dire si cette scène Claude Berri a dû la vivre souvent pour qu'elle se retrouve à l'identique, il y avait donc une part d'autoportrait dans Le Poulet identifiable à l'aune du Vieil homme et l'enfant. Mais dans son premier long-métrage, elle vient après que le père (Charles Denner) a souvent grondé son fils de dix ans Claude Langmann (Alain Cohen).

Ne pas se faire remarquer, c'est tout ce que demande ce père fourreur dans une petite ville de la banlieue lyonnaise. Le gamin compte bien vivre comme les autres. Il joue, il fait des bêtises, il passe du temps avec ses camarades de classe. Au loin, tandis qu'ils jouent au football, c'est tout juste si on remarque un drapeau nazi qui flotte sur un bâtiment. C'est dans ce décor que choisit Claude Berri pour le jeune Claude Langmann, son double pour être clair, de se faire traiter de « sale juif » par un autre enfant.

Claude Langmann devient Claude Longuet. Seulement voilà, le gamin est incapable de se souvenir de son nom d'emprunt, il le prononcé « longé » parce qu'il est incapable de comprendre pourquoi il doit se séparer de ses parents, pourquoi il doit aller se réfugier à Biviers dans les alentours de Grenoble chez un vieux monsieur, le père d'une amie de la mère de Claude (Zorica Lozic). Surtout Claude doit absolument caché qu'il est juif, même s'il ne comprend pas non plus ce que ça peut bien vouloir dire.

Le vieux monsieur, on ne connaît pas son nom, il sera surnommé pépé par tout le monde. C'est Michel Simon qui l'incarne. Dans sa première apparition, il donne à manger à son chien, assis à table et portant un bavoir. Pépé lui donne la béquet comme à un enfant, au grand dam de mémé (Luce Fabiole). Ils sont mariés depuis plus de 40 ans, entend-on dans un dialogue. Michel Simon pétille comme jamais dans ce rôle de vieil homme sauvage mais doux avec son béret vissé sur le crâne et ses tatouages aux bras qu'il montre au gamin.

La mémé a un plat qu'elle adore préparer : le lapin à la moutarde. Mais le pépé se prétend végétarien. Il refuse de manger du lapin et va parvenir en convaincre Claude de ne pas manger du lapin. Le pépé va raconter toutes sortes de choses au gosse, d'une certaine manière il lui apprend la vie sur le tas. S'il fait cela, c'est parce que le propre fils du pépé, incarné par Roger Carrel, semble avoir pris le contre-pied de son père. Le pépé revit, il peut faire l'éducation de cet enfant et changer ce qui, a priori, n'a pas fonctionné chez son vrai fils.

Dans la salle à manger, il y a le portrait de Pétain. Le pépé, comme la mémé, le considèrent comme un héros de la guerre de 14. Le fils dit à son père de se méfier de le dire trop fort, la résistance se déploie (le film se passe en 1944), surtout autour de Grenoble. Le pépé raconte des horreurs antisémites que Claude écoute en souriant en douce car le pépé et la mémé ignorent qu'il est juif. Dans la maison, il écoute la propagande de Vichy et en douce, dans la grange, il écoute Radio Londres.

L'attraction principale du film est bien entendu Michel Simon, goguenard et tendre, toujours prêt à faire des facéties avec Claude. Après la messe où le curé sermonne ses ouailles, il l'initie au billard. Ils font de la balançoire ensemble dans une scène euphorique, ils sont dans un havre de paix, loin de la guerre. Claude semble oublier ses parents. Après un repas d'été, tout le monde chante des chansons paillardes, il fait boire le petit, il descend en voiture en ville pour se rendre compte des affiches qui menacent de représailles.


Claude doit devenir un enfant modèle, il s'invente une nouvelle vie. Il ne sait pas dire son nouveau nom mais il apprend Notre père. A l'école, il est sujet des moqueries. Plusieurs scènes se déroulent à l'école où la maîtresse suit l'opinion. On chante Maréchal nous voilà et quelques scènes plus tard, l'institutrice donne un cours de géographie où on étudie les côtes de Normandie. Et quand la fin de l'été 1944 arrive, sa nouvelle vie s'arrête, il doit quitter le pépé, il doit abandonner sa vie fictionnelle et retrouve ses parents venus le chercher en car.




























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