jeudi 27 février 2020

Furie (Brian De Palma, 1978)

Voir Kirk Douglas dans un film de Brian De Palma m'a toujours paru un peu incongru, moins dans Furie que dans Home movies, jamais vraiment diffusé en France et franchement bizarroïde. Furie est plus classique et démarre sur les chapeaux de roue, plutôt en nage crawlée où son personnage, Peter, nage en compagnie de son fils Robin (Andrew Stevens), tous les deux en maillots de bain. C'est sur une idée de corps puissants que Furie démarre et de grande joie de voir un père et son fils se chamailler pour savoir lequel des deux est le plus fort.

A peine ont-ils eu le temps de se reposer qu'une bande de terroristes en keffieh viennent eux aussi du fond de la mer pour tirer à la mitraillette sur tout ce qui est vivant. Un carton avait annoncé qu'on se trouvait au Moyen Orient (la séquence a été tournée en Israël). Ça tire de partout et Peter parvient à s'échapper en zodiac avant qu'une explosion ne l'élimine sous les yeux de Robin. En tout cas, c'est ce que le fils croit. Mais le spectateur sait que tout cela a été commandité par Childress (John Cassavetes) qu'on avait cru être un ami très proche de Peter.

Quelque temps plus tard, c'est une autre plage que filme Brian De Palma, celle de Chicago au bord du lac Michigan. Comme sur la plage du début, les corps sont à moitié nus, les hommes et les femmes harassés par la chaleur prennent du bon temps. Là ce sont deux jeunes femmes qui émergent de la foule des badauds, parmi elles Gillian (Amy irving) surveillée de près par un type qui détonne puisqu'il est en costume cravate par cette chaleur, un certain Raymond (William Finley) qui téléphone d'une cabine qu'il a trouvé Gillian.

La grande question de Furie reste donc de savoir ce qui lie ces deux séquences introductives au-delà de leur approche maritime et des corps exhibés. Il s'agit de faire se rencontrer Gillian et Robin, ces deux corps montrées sous toutes les coutures masquent des cerveaux hors du commun. L'idée du film est là toute bête, une bataille entre les corps et l'esprit. Car au bout d'une moment où Brian De Palma explore un certain suspense sur leur lien, on le comprend vite, Gillian et Robin sont doués du pouvoir de télékinésie.

Preuves à l'appui, d'abord avec Gillian qui fait l'expérience avec une psychiatre, la Docteur Ellen Lindstrom (Carol Rossen). Gillian parvient, sans aucun effort, à faire bouger un train miniature. Amy Irving joue ici, comme dans Carrie, une lycéenne. On a donc droit à une scène où les autres lycéennes se moquent d'elle, comme elle-même le faisait dans Carrie. Avec un effet de jump cut et de gros plans, on découvre que Gillian a aussi le pouvoir de faire saigner les gens. Brian De Palma sera si content de son effet qu'il le reproduira à l'envi dans son film.

C'est plus tard dans le film qu'on constate les pouvoirs de Robin. Contrairement à Gillian, Robin a une grande conscience de l'étendue de ses pouvoirs et de leur effet destructeur. On s'en aperçoit lors d'une fête foraine où il fait tourner la roue d'un manège jusqu'à en éjecter un siège (c'était des Arabes, Robin se venge de la « mort » de son père). Robin n'a plus besoin de toucher les gens pour les tuer et il est capable de s'élever dans les airs. Il a acquis une position de demi dieu, il est devenu une arme aux mains de Childress.

Le personnage que compose John Cassavetes est de plus en plus inquiétant au fur et à mesure du film. Brian De Palma s'amuse à la filmer en contre-plongée, son regard est d'une noirceur extrême. Son corps est abîmé, Peter dans la séquence d'ouverture l'avait blessé au bras. Avec son costume sombre, il apparaît comme le véritable monstre du film, lui qui tient prisonnier Robin dans un château loin du regard des autres. Il veut que Gillian rejoigne son prisonnier. Quant à Peter, il fera tout pour libérer son fils des griffes de Childress.


Je reviens pour finir sur le corps de Kirk Douglas, un corps athlétique. Dans sa deuxième séquence à Chicago, il est encore en caleçon, il fuit les hommes de Childress. Il fait des cascades, escalade les escaliers de secours, traverse les voies de métro, il court. Il transforme son corps pour tenter de passer inaperçu (il se blanchit les cheveux à la javel dans une des rares scènes humoristiques où il sympathise avec une vieille dame). A lui tout seul, il transforme un thriller psychologiue en film d'action, c'est vraiment étonnant.





































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