vendredi 8 février 2019

L'Héritage de la chouette, 3 Démocratie (Chris Marker, 1989)


La démocratie ce douloureux problème. Encore une fois, c'est Cornelius Castoriadis qui non seulement parle devant la plus jolie chouette de la série mais en plus analyse le mot démocratie avec un sens de la provocation extrême. Après avoir entendu ce cher Elia Kazan entamer le débat en affirmant que pour lui la démocratie grecque antique c'est du bluff alors que la démocratie américaine est ce qui se fait de mieux, ce que dit Castoriadis change la perspective.

Commençons par son évocation du monstre qu'est l'Etat qui engloutit le peuple avec ses impôts, qui mange ses enfants avec ses guerres. « Un monstre, le Léviathan (…) nous ne pouvons rien à l'égard de ce monstre, ce que nous pouvons faire, c'est placer autour de sa grotte des barricades en papier, ça s'appelle les constitutions qui limitent les prérogatives de l'Etat ». Je crois qu'on peur difficilement faire une image plus concrète de la démocratie.

La démocratie directe est le cœur du sujet avec un paradoxe confondant : élire un homme est de l'oligarchie (en1988 lors du tournage) cela correspond à Mitterrand, à Bush père aux USA (battant Dukakis un Démocrate d'origine grecque), c'était la différence entre Athènes (assemblée par tirage au sort) et Sparte (élection de l'aristocratie). Il semble bien que ce soit le système politique spartiate qui est triomphé. Bien entendu, on ne veut de la démocratie que quand on n'en a plus.

Cet épisode sur la démocratie est celui qui comporte le moins d'images d'illustrations externes, en l'occurrence des extraits d'un film produit par Slon, l'une des coopératives cinématographiques de Chris Marker, lors de l’enterrement de Georges Papandreou (c'était en 1968) où les Grecs avaient reçu la permission de rendre hommage à l'ancien président de la république alors que la dictature des militaires était à son apogée.


Pourtant il apparaît vite comme l'un des plus vivants comme si la démocratie, les rapports entre le peuple et l'Etat étaient des personnages, comme si une narration sur plus de 2000 ans étaient décrites en 25 minutes. Prodige qu'accomplit Castoriadis quand il explique que la guerre du Péloponnèse a été la fin de la démocratie. Quand Evi Touloupa parle des trajets des membres de l'assemblée du peuple. On suit un récit palpitant qui résonne si fort aujourd'hui.











Aucun commentaire: