lundi 21 mai 2018

Greetings (Brian De Palma, 1968)

A la télé (cadre dans le cadre, image pauvre), le président Johnson fait un bilan de sa présidence. Malgré la guerre au Viet Nam, il est satisfait de lui. « Freedom and Liberty » dit-il en regardant les téléspectateurs devant leur petit écran, symbole de la propagande d'état. Dans la rue, nos trois new-yorkais ne regardent pas la télé, ils élaborent des plans pour échapper à l'armée, mais de grâce ils veulent oublier cette guerre insensée.

Inséparables, Paul Shaw (Jonathan Warden), Lloyd Clay (Gerrit Graham) et Jon Rubin (Robert De Niro) cherchent des vêtements dans une boutique de fringues. On observe les faux raccords volontaires, le vendeur et un autre client intervertissent régulièrement leur place tandis que le trio continue de discuter, le spectateur est obnubilé par le flot de leur dialogues largement improvisés mais d'une certaine puissance comique.

Ces faux raccords de cette première séquence n'est pas seulement un sympathique pastiche du style de Jean-Luc Godard, il irrigue toute la mise en scène de Greetings, très chaotique, passant d'un personnage principal à un autre, laissant de côté celui de Robert de Niro, pour suivre essentiellement Paul. Ce chaos dans la vie de Paul, Lloyd et Jon est provoqué par cette guerre du Viet Nam et touche tous les autres personnages.

Après avoir échoué à se faire passer pour un homo lors de la conscription, Paul cherche à trouver une femme (marié il échappera à l'armée). Il passe par un site de rencontres par ordinateurs, donc prétendument scientifique. Il rencontre trois femmes, la première est une sorte de psychopathe déjà en robe de soirée, tançant violemment le pauvre Paul, la troisième est qualifiée de mystique adepte de la mode hippie, entre elles il fuit devant une mère au foyer.

Lloyd est lui-même très perturbé, il est déjà un adepte du complot et trimballe avec lui des photos de l'assassinat de Kennedy. Il est persuadé que sur certaines photos un tireur est caché (son nom est systématiquement couvert par un bip de censure), il demande à une amie de les agrandir et moins il discerne quelque chose sur l'image plus il est persuadé de voir cette chose. Sur le corps d'une fille à moitié nue, passablement assoupie, il dessine la trajectoire de la balle.

L'une des scènes drolatiques de Greetings a lieu dans une librairie où Lloyd rangeant inlassablement des bouquins sur l'étal croise un type encore plus timbré que lui. En utilisant le film témoin de l'assassinat de JFK par Abraham Zapruder (qui dure à peine une minute), c'est déjà le décorticage et l'analyse d'une séquence qui échappe au sens visuel. L'obsession de Lloyd tourne à la paranoïa aiguë, surtout lors du rendez-vous avec ce type au sud de Manhattan.

Un autre détraqué aborde Jon, il veut vendre sous le manteau un porno en 8mm. Il n'est pas précisé si cet homme qui aborde Jon a repéré qu'il est un voyeur, il observe dans cette même librairie une femme à travers un rayon de livres. Par un joli retour de paradoxe, Jon va filmer avec une petite caméra 8 mm, là aussi, une femme rencontrée dans la librairie. Il la fait se déshabiller et il se place dans le rôle du voyeur obscène.

Jon choisit pour se faire réformer de se faire passer pour un suprématiste blanc genre membre du KKK. le film se termine sur un drôle de pied de nez, Jon est au Viet Nam en pleine traque de Viet Cong interviewé par un reporter en costume cravate, comme si la guerre était une simple émission de divertissements. Mais Jon ne produit pas les images que le reporter attend de lui, il va à la rencontre de cette Vietnamienne pour parler avec elle.


Sur l'escalier du centre de l'armée est assis Brian De Palma, court moment de figuration. Le cinéaste essaime quelques objets lui appartenant tel le Hitchcock Truffaut. Greetings est encore un joyeux fourre-tout pas encore abouti, loin de là, trop influencé par ses idoles. Il s'amuse avec les images (accéléré soudain à la Godard), il rend hommage à Blow up d'Antonioni (une scène de photo à laquelle assiste Lloyd).

























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