dimanche 12 janvier 2020

Le Zinzin d'Hollywood (Jerry Lewis, 1961)

Dans son fabuleux livre « Quand je fais du cinéma », Jerry Lewis expliquait que dans ses jeunes années où il n'était qu'acteur, il passait son temps sur le plateau à demander à tous les techniciens comment marchait chaque étape de la fabrication d'un film. Il prend le contrepied d'Un vrai cinglé de cinéma tourné cinq ans plus tôt. Le Zinzin d'Hollywood est en quelque sorte la projection des ces années d'apprentissage moins comme une mise en abyme que comme une balade dans les coulisses d'un grand studio, Paramutual, pastiche de Paramount qui distribue le film, les lettres sont les mêmes.

Premiers plans aériens sur les toits de Hollywood, des studios, puis des scènes de film, celles que voit le spectateur assis dans son fauteuil, suivies d'un cadre plus ouverts où l'on voit l'équipe de tournage au travail. Le rocher que jetaient des Indiens est en carton, le couple qui s'embrassait amoureusement se déteste sur le plateau. Tout est faux mais il faut vendre de l'illusion. C'est ce que se disent les patrons de la Paramutual, ils sont tous de la même famille, là Jerry Lewis évoque non seulement le népotisme mais aussi le pouvoir absurde (le cadre s'adresse au patron avec obséquiosité et répète comme un perroquet).

C'est précisément par que Morty, le personnage de Jerry Lewis, est tout en bas de l'échelle que le patron veut qu'il aille observer tous les niveaux pour voir ce qui ne fonctionne pas. Morty est colleur d'affiches, évidemment maladroit. Le larbin devient coursier (errand boy du titre), une situation guère plus enviable, pas tellement pour lui mais pour ceux qu'il va croiser pendant ces 80 minutes. Morty est un homme qui provoque les catastrophes, qui crispe tout le monde, qui ne fait jamais rien comme il faut, qui ne comprend rien comme ce jeu sur les noms des cadres que la secrétaire (Renée Taylor) lui présente.

Chaque entrée dans un nouveau bureau est conçue ainsi : on apprend un élément de la fabrication du film et c'est suivi d'une catastrophe. Dans le bureau des dactylos qui tapent les scénarios, on apprend que la couleur des feuilles indique une avancée du script et que certaines secrétaires ne tapent que des feuilles bleues d'autres des blanches. Le pauvre Morty ne sachant pas où il est va provoquer une pagaille montre au milieu du tintamarre des machines à écrire. Toutes les feuilles vont être mélangées. Sa course terminée dans un service, il part dans un autre lieu pour observer et mettre du désordre.

Il devient successivement figurant dans un film années folles (il chante avec sa voix nasillarde trop fort), il vend des bonbons à des enfants dans la boutique du studio (il grimpe sur une échelle pour attraper une grosse bonbonne), il se glisse au milieu d'une scène (et regarde la caméra), il mange son déjeuner au milieu du décor d'un film de guerre puis au milieu d'un western. Et le summum, Morty est dans une avant-première pour faire des signer des autographes, la star du film l'embarque par inadvertence, sans remarquer qui elle a à son bras et le jeune coursier la suit toute la soirée sans dire un mot.

Dans ce déluge de burlesque aux gags parfois étirés, Jerry Lewis joue aussi la carte du tendre, ça n'est pas mon registre préféré : il parle avec une marionnette, il joue au basket avec des gamins. Je le trouve plus percutant dans le gag récurrent de la porte qui claque. Son chef, le responsable du courrier, un bon gros gars ne supporte pas que ses coursiers claquent la porte. Jerry Lewis fait preuve d'une grande inventivité pour que la porte claque et provoquer la colère et le désespoir de son chef. C'est dans ces variations que le film est le meilleur.


































Aucun commentaire: