dimanche 27 septembre 2015

Quand Harry rencontre Sally (Rob Reiner, 1989)

 
Une grande voiture break jaune arrive derrière un couple en train de s'embrasser. Université de Chicago en 1977, fin des études. Sally Albright (Meg Ryan) vient chercher Harry Burns (Billy Crystal) pour se rendre à New York. Sally propose de conduire en alternance sa voiture. 18 heures pour faire les 850 km. Que faire pendant tout ce temps ? Discuter, tout simplement et, très vite, les caractères de Sally et Harry s'opposent totalement. Harry, qui embrassait sa copine dans la première scène, a une conception des rapports entre les hommes et les femmes qui fait se dresser les cheveux de Sally. Il est convaincu que les hommes ne peuvent pas être amis avec les femmes parce qu'ils veulent coucher avec elles, qu'elles soient séduisantes, comme Sally, ou pas. La traversée finie, ils se serrent la main persuadés qu'ils ne se verront plus jamais. Comment se rencontrer par hasard dans une ville de huit millions d'habitants ? Ils se croisent en 1982 dans un terminal d'aéroport, puis en 1987 dans une librairie. Chacun expose l'échec de sa vie maritale et ils décident de boire un verre ensemble.

Que l'on découvre Quand Harry rencontre Sally ou pas, on sait exactement comment l'amitié entre Harry et Sally va se terminer : bien, très bien même. Rob Reiner et sa scénariste Nora Ephron ne cachent pas qu'ils veulent que le duo finisse en couple. L'important pour eux est le chemin qui les mènent jusque là. L'inspiration vient des comédies classiques de l'âge d'or du cinéma américain. Harry Burns aimerait se prendre pour Humphrey Bogart dans Casablanca. Il le cite littéralement en exemple, argumentant sur le dialogue final et sur le fait qu'Ingrid Bergman ne le suive pas. Ils regarderont le film ensemble, mais séparés, chacun dans son appartement en train de se téléphoner. Seulement voilà, la seule chose que Harry Burns partage avec Humphrey Bogart, ce sont ses initiales. Le film se tourne plutôt vers ces comédies débridées où les rencontrent se soldent par une succession de grosses disputes et de malentendus avant de s'aimer vraiment : La Huitième femme de Barbe-Bleue d'Ernst Lubitsch, Désir de Frank Borzage ou L'Impossible Monsieur Bébé d'Howard Hawks.

Connaître la fin du récit est l'obsession de Harry. Il commence toujours un roman par la fin par peur de ne pouvoir la lire au cas où il meurt. Cet élément placé dès le début du film fait de lui le narrateur du film. Il observe pendant tout le film Sally avec ses petites manies bien étranges, comme celle, hilarante, de toujours vouloir qu'on lui serve ses plats avec les éléments séparés. Sally veut tout séparer, et notamment séparer l'amitié de l'amour. Mais ce sont ces petites manies qui créent le personnage et façonnent leur lien. Harry les récapitulera tous dans sa déclaration d'amour. On entend la chanson de Louis Armstrong et Ella Fitzgerald Let's call the whole thing, ritournelle sur deux amoureux aux opinions divergentes, chanson immédiatement mise en opposition avec It had to be you de Frank Sinatra. Même les classiques de la chanson savent comment tout cela va se terminer. Pour appuyer encore plus l'inéluctable, la trouvaille est de faire parler face à la caméra quelques couples, en mode documentaire, sur leur rencontre et la longueur de leur mariage. On se doute bien quel couple conclura le film.

Mais en attendant que le couple se forme, Harry et Sally discutent et se disputent. Beaucoup. Très souvent ensemble, parfois avec leurs meilleurs amis. La confidente de Sally est Marie (Carrie Fisher) qui attend éternellement qu'un certain Arthur veuille enfin quitter sa femme pour elle (ça n'arrivera pas, lui répond chaque fois Sally). Le meilleur ami de Harry est Jess (Bruno Kirby) journaliste avec qui il partage une passion pour le sport. Bons samaritains, Sally se propose de sortir avec Jess et Harry avec Marie dans un dîner à quatre épique où finalement Jess va tomber amoureux de Marie. Et quand ils discutent de sexe, Sally simule un orgasme dans un restaurant pour bien montrer à Harry qu'il n'est peut-être pas le bon coup qu'il prétend être. C'est sans aucun doute cette séquence qui est la plus connue du film. Parfois, le duo chante dans un magasin de karaoké où se trouve également l'ex-femme de Harry transformant une scène joviale en tragédie. Le film passe d'un registre à l'autre, alterne les tons, avec une élégance et une facilité que ne retrouvera jamais Nora Ephron dans ses scénarios suivants (Nuits blanches à Seattle ou Vous avez un message). Ce second volume des « amours contrariées » en forme de comédie sophistiquée se poursuivra dans la terreur avec Misery.













2 commentaires:

Ash a dit…

Je suis ravie de vous retrouver sur la toile ! Merci d'être revenu.

Jean Dorel a dit…

Merci à vous !