mercredi 7 février 2018

Fous d'Irene (Bobby & Peter Farrelly, 2000)

Dans la grande période de personnages schizophrènes de Jim Carrey, juste après le génial Man on the moon de Milos Forman (Andy Kaufman aime être détesté vs. Tony Clifton déteste être aimé, un documentaire sur le tournage est sorti récemment) et avant Eternal sunshine de Michel Gondry (vivre ou non dans les souvenirs), les frères Farrelly mettent les petits plats dans les grands pour leur acteur. Me myself & Irene, tout est dans le titre anglais mais aussi, mais moins finement Fous d'Irène (au pluriel, on notera).

Jim Carrey est Charlie, un sympathique policier du Rhode Island (un retour au bercail après le Miami de Mary à tout prix) qui a un gros défaut : il se laisse marcher sur les pieds par tous ses concitoyens. Jamais il n'ose élever la voix (une fillette refuse de sauter à la corde sur le trottoir), toujours il ravale sa fierté (son voisin fait chier son chien dans son jardin), souvent il abandonne l'application de la loi (il déplace lui-même une voiture mal garée). Tout le monde constate, son chef en premier lieu (Robert Forster) ce problème d'autorité.

Charlie est gentil et les frères Farrelly narrent dans la meilleure séquence du film l'origine de cette gentillesse démesurée. Il faut revenir 18 ans en arrière, Charlie portait alors une superbe moustache et arborait une grande confiance en lui. Il était amoureux de Layla (Traylor Howard). Ils sont tellement mignons au bord de la mer à porter un t-shirt à l'effigie l'une de l'autre. Et ils se marièrent. Tous les collègues policiers de Charlie font une haie d'honneur. C'est enfin l'arrivée dans la petite maison du bord de mer où il porte la mariée.

Devant le pas de la porte, Charlie demande au chauffeur de la limousine s'il accepte les chèques « you people accept checks ? ». Ce dernier (Tony Cox) est un nain noir qui prend mal la question. Il désigne Charlie comme un raciste à moins qu'il ne déteste les nains. Layla prend le parti du chauffeur qui fait tôt de tabasser Charlie avec un nunchaku avant que l'épouse ne succombe au charme du chauffeur (par ailleurs diplômé en physique nucléaire). Layla et le chauffeur, prénommé Shonté, se lancent des regards énamourés devant les excuses de Charlie.

Neuf mois plus tard, Layla accouche de triplés. Ils seront prénommés Jamaal, Lee Harvey et Shonté Junior. Charlie ne voit pas que ces enfants ne sont pas les siens et quand Layla arbore un t-shirt à l'effigie du chauffeur de limousine et quitte Charlie, ce dernier se mue dans un calme olympien qui durera 18 ans. Il élève ses trois fils qui préfèrent vite l'humour de Richard Pryor ou Chris Rock aux sitcoms WASP. Adultes, ils seront respectivement incarnés par Anthony Anderson (acteur de l'excellente sitcom Blackish), Mongo Brownlee et Jerod Mixon.

Me est donc Charlie et myself sera Hank, le double maléfique du premier, enfoui dans le corps depuis tant d'années et qui explose enfin. Jim Carrey est redoutable d'efficacité pour les mimiques de transformation d'un personnage à un autre, il faut dire que le thème musical (we're gonna get you, sur une mélopée de percussions et guitares) amène cette transformation de Jekyll à Hyde sur un mode comique, du candide au trivial et inversement, comme le montre ce plan enchaîné entre Hank en train de chier qui raccorde avec une glace au chocolat.


Reste Irene (Renée Zellweger), elle sert de tampon pour décoincer Charlie et brider Hank. Irene est prise dans un complot basique qui ne sert que de McGuffin au génie de Jim Carrey. Charlie est aidé dans sa fuite avec Irene par ses trois fistons. Les Farrelly retournent les clichés sur les Afro-américains, ils jurent à chaque phrase comme dans les spectacles de Richard Pryor mais ils sont étudiants en physique quantique. Le road movie en moto puis en train est traversé de rencontres improbables, la plus belle est celle avec un albinos (Michael Bowman).




















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