vendredi 6 avril 2018

Cry-Baby (John Waters, 1990)

« I'm so tired of being good ». Cette lycéenne de 1954 à Baltimore, Maryland, qui est fatiguée d'être gentille s'appelle Allison (Amy Logane), elle fait partie des Square (les coincés dans les sous-titres). Ce jour-là quand débute Cry-Baby, c'est vaccination pour tout le lycée, moyen très simple pour John Waters de présenter tous les personnages d'adolescents de son film. Allison se retrouve à côté de Cry-Baby (Johnny Depp), leader des Drapes (les rebelles). Leur destin est lié avec ce premier contact, ce premier regard où le visage de Cry-Baby est transfiguré par une fine larme qui coule de son œil gauche.

Hairpsray était un film sur des danseurs amateurs de Rhythm & Blues, Cry-Baby est une comédie musicale avec des chansons de Rockabilly. On chante, on danse, on se roule des patins dans une taverne de bric et de broc tenue par la grand-mère de Cry-Baby, une rockeuse qui montre les dents, une dure à cuire tout en cuir moulant, la dénommée Ramona Rickettes (Susan Tyrell). Elle vit en couple avec l'oncle de Cry-Baby, Belvedere (Iggy Pop). Sa première apparition est dans un baquet en train de se laver, hommage aux livres de beefcake que John Waters lisait, en cachette, dans le Baltimore de sa jeunesse.

Premier film sans Divine, Cry-Baby voit l'arrivée d'une nouvelle troupe d'acteurs. Traci Lords, ancienne actrice porno (par ailleurs recherchée par la police pour avoir été dans l'industrie du X avant ses 18 ans) est Wanda. Sa mère (Patty Hearst) s'occupe de faire traverser les élèves devant le lycée, son père (David Nelson) est conducteur de bus. Tous les deux sont toujours très souriant, l'air benêt, quand Wanda tire toujours la tronche, elle a honte d'eux, ils sont pourtant les plus compréhensifs du film. Les autres parents des Drapes sont en contrepoint avec la vie que mènent leurs enfants.

Les parents de Milton (Darren Burrows) sont des chrétiens évangélistes. Joe Dallessandro est le père et Joey Heatherton la mère, amusant quand on connaît leur passé cinématographique, il se déshabillait chez Paul Morrissey, elle était une blonde atomique. Ils viennent prêcher la bonne parole devant le lycée. Milton sort avec Mona (Kim McGuire) surnommée « gueule cassée », parangon d'Edith Massey actrice des premiers films de John Waters. Maquillée outrageusement, Mona a des parents atypiques : sa mère jouée par Mink Stole a une scène, allongée dans un lit et clope au bec et son père est Troy Donahue, acteur de films de délinquants juvéniles, autre inspiration du cinéaste.

Pour compléter la troupe, qui se compose comme une famille qu'ils se sont choisi, voici Pepper (Ricky Lake), la petite sœur de Cry-Baby. Pepper est enceinte de 8 mois et a déjà deux enfants. Pepper est la première à remarquer que Allison en a assez d'être gentille et se verrait bien entrer dans le gang des Drapes, elle est une Square tout ce qu'il y a de plus conformiste avec sa petite jupe drapée. Sa grand-mère Madame Vernon-Williams (Polly Bergen) veut tout faire pour éloigner sa petite-fille de ces blousons de cuir (au col relevé comme les rebelles le faisaient) et l’alpague dans sa décapotable dès la sortie des cours.

L'affection de John Waters est pour les Drapes. Il filme les Square, les coincés, comme une unité où les individualités sont abolies. Eux aussi chantent et dansent mais à côté des tenues colorées, sexy et bariolées des Drapes, les Square portent uniformément leurs petites chemises blanches et leurs vestes étriquées. Madame Vernon-Williams organise un concours de talent (formellement interdit à Cry-Baby) où Allison tout comme le groupe vocal de son petit-ami Baldwin (Stephen Mailer). Ils chantent des morceaux qu'on croirait sortis d'une comédie de Dori Day, l'horreur !


Baldwin pour reconquérir le cœur d'Allison, désormais dévolu à son rocker, détruit la belle moto de Cry-Baby tout en parvenant à faire le mettre en prison (le maton est joué par Willem Dafoe, il demande aux prisonniers de prier pour Nixon et Eisenhower). Baldwin fier d'avoir créer cette injustice, après tout les Drapes sont forcément coupables, va parader dans une danse rétrograde jusque chez Allison, avec une fanfare comme au bon vieux temps. Les rétrogrades face aux modernes, l'éternel combat des personnages du cinéma de John Waters.





























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