jeudi 5 septembre 2019

Obsessions (Julien Duvivier, 1943)

Comme Six destins, Obsessions est un film à sketches avec un narrateur omniscient qui passe d'une histoire à une autre. Deux hommes dans un salon distingué commencent à se raconter des histoires sur des obsessions qui vont aller dans le fantastique. Ce n'est plus un objet (la veste de Six destins) mais un genre qui se glisse dans ces trois histoires. Une quatrième devait être tournée pour donner un récit en boucle mais elle ne sera jamais filmée par Julien Duvivier.

Pourtant elle semble bien là, prête à être racontée quand un corps est soudain au centre d'une groupe de diablotins. C'est filmé comme dans un film expressionniste avec un fort contraste dans le noir et blanc accentuant l'aspect énigmatique, qui plus est les premiers plans de cette bande de diablotins qui se promènent dans la rue sont filmés en plongée comme si, en dehors de ce duo de narrateurs, une force observaient cet étrange ballet.

Il s'avère vite que ces diablotins ne sont pas des démons mais des gens déguisés pour le Mardi Gras. On ne saura pas qui est cet homme mort en début de film et le récit se porte sur un autre personnage, une jeune femme qui se trouve laide. Elle n'ose pas avouer son amour à une jeune homme qu'elle suit régulièrement des yeux. Là encore, un effet visuel étonne. Julien Duvivier filme cette jeune en plaçant une lumière sous son visage.

C'est une étrange lumière qui se dégage de son visage totalement hors du commun, quelques chose d'effrayant se dégage de son regard qui disparaîtra dans l'épilogue de cette histoire. Mais ke cinéaste va plus loin en lui faisant porter un masque blanc, ce sont des yeux sans visage avant l'heure qui cherche à retenir le visage de cet homme aimé, un refus de se dévoiler dans ce carnaval mais qui va révéler le fond de son cœur (le film est terriblement mièvre).

Le film ressemble à un assemblage de trois épisodes de Alfred Hitchcock présente (qui sera créé des années après Obsessions) surtout dans cette deuxième partie où Edward G. Robinson rencontre un diseur de bon aventure (l'étrange Thomas Mitchell) qui refuse de lui dire ce qu'il lit dans ses mains puis lui annonce qu'il va tuer un homme. Le visage torturé d'Edward G. Robinson est parfait pour exprimer les tourments de cet homme pris dans un piège qu'il se tend à lui-même.

C'est que cet homme s'est aussi vu annoncé qu'un compte à rebours a commencé. Il sait qu'il va tuer d'ici quelques jours. Le récit prend un tour paranoïaque lorsqu'il dialogue avec son propre reflet dans les miroirs. Julien Duvivier sait jouer sur les fantasmagories que l'esprit de ce futur condamné invente devant nos yeux, ses pensées se concrétisent à l'écran. C'est le meilleur des trois sketches, la chute d'un homme qui prétend ne pas croire à une chose et qui matérialise cette chose.


La dernière partie est la moins aboutie. Cela se passe dans un cirque. Charles Boyer est un funambule qui rêve sa chute et découvre dans ses songes Barbara Stanwick portant des boucles d'oreille en forme de lyre. Comme dans les deux premiers épisodes, il s'agit de conjurer le sort, de renoncer à cette obsession qui les hante. Jamais deux sans trois concluent les deux hommes du prologue qui ferment le film sur une petite touche d'ironie.



















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