jeudi 3 mars 2016

L'Homme aux cent visages (Dino Risi, 1960)

L'acteur Gerardo n'a pas des rôles bien glorieux. Il joue dans des cabarets peu fameux pour tout un public d'hommes qui n'attendent que les jeunes femmes en tenue légère. Gerardo a beau faire le beau dans son costume de matador, il se fait copieusement huer. Le vrai souci est qu'il se croit un immense dramaturge, il voudrait avoir de beaux personnages à incarner, et pourquoi pas Hitler, dit-il en revêtant le costume du dictateur au grand dam du directeur du cabaret qui n'en peut plus de ses caprices de ringard.

Cet insupportable histrion qui se prend pour un immense comédien est superbement joué par Vittorio Gassman. L'avantage avec lui, c'est qu'il sait toujours trouver la limite entre cabotinage et incarnation du cabotin (et ça lui est arrivé dans de nombreux films, surtout à la fin des années 1970, de surjouer). Derrière les déguisements que Gerardo porte, il suffit d'un simple regard oblique, d'un geste ferme de la main, d'un accessoire pour que Gassman change de rôle et joue avec légèreté la lourdeur.

Son soi-disant talent d'acteur va l'emmener vers d'autres cieux que ceux du théâtre. Avec un complice, il va s'employer à escroquer des hommes d'affaires. Son talent de comédien ne suffit pas à éviter que son comparse l'arnaque à son tour. Direction la prison. Et que croyez-vous qu'il fît en prison ? Il joue une scène du Jules César de Shakespeare devant les autres détenus, préfigurant de plus de 50 ans le film des frères Taviani, César doit mourir.

Le récit de Gerardo dans L'Homme aux cent visages est conté par lui-même, dans un long flash-back qu'il narre à un homme qui a tenté de l'escroquer, lui et sa femme Annalisa (Anna Maria Ferrero). Gerardo est fier de sa carrière d'escroc et les envolées lyriques de ses histoires tournent toujours au comique, souvent à son détriment. S'il s'est rangé des voitures, c'est pour Annalisa, danseuse dans le même cabaret que lui, mais qui laisse mariner Gerardo des années avant de se laisser conquérir par ce séducteur de pacotilles.

Gerardo raconte ainsi pendant 90 minutes ses faits de gloire. Sa rencontre avec l'inénarrable Chinotto (Peppino De Filippo), père de famille nombreuse et experts ès escroqueries. Ensemble ils montent de beaux coups, notamment pour voler des bijoux en organisant des faux mariages. Il s'allie ensuite avec Elena (Dorian Gray), une grande blonde. Le point d'orgue du film sera d'arnaquer le ministère des armées avec un contrat de pâtes aux œufs. Gerardo se déguise aussi en Greta Garbo pour arnaquer des paparazzi. Rien n'arrête Gassman !










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