Il
y a mignon et mignon. Finalement, en quoi cette espèce gros monstre
à l’énorme bouche remplie de dents menaçantes, aux yeux ronds
écarquillés et aux griffes acérées est-il mignon ? Totoro,
devenu depuis le logo du studio Ghibli, est donc vu comme une peluche
mignonne et sympathique alors qu’il est plutôt monstrueux. Mais sa
forme ronde qui l’assimile à un nounours, ses yeux et ses
moustaches qui le rapprochent d’un chat, tout comme ses oreilles
rappellent celles d’un lapin. Bref que des animaux mignons pour
composer ce gros patapouf de Totoro que les deux enfants Mei et
Satsuki vont adopter.
Pourtant
Mon
voisin Totoro
commence comme un film horrifique, de ce genre où une famille
emménage dans une nouvelle maison qui s’avère être hantée. En
tout cas, le petit voisin d’à coté, Kanta le pense et n’oserait
pas s’y aventurer. Les deux fillettes n’ont pas peur des
noiraudes, ces boulettes de suie qui parcourent la maison à la
recherche de tranquillité. Grand-mère (celle de Kanta en fait, une
vieille voisine) sait que seuls les enfants peuvent voir ces
« fantômes », ces apparitions. Tout comme le père des
fillettes, elle croit les enfants qui voient les êtres venus
d’ailleurs. C’est l’un des fondements du cinéma de Hayao
Miyazaki, l’imaginaire est l’œuvre des enfants, pas des adultes.
Si Mei et Satsuki n’ont pas peur des noiraudes, ni de pénétrer
dans un tunnel, c’est parce qu’elles sont déjà confronter dans
leur vie réelle à la maladie de leur maman qui est à l’hôpital
et à l’idée de sa mort.
C’est
le point de vue de Mei, la plus jeune des deux gamines, qui est
adopté pendant tout le monde. Elle ne sait pas encore lire ni écrire
mais elle n’a pas encore peur. Le spectateur rentre par son regard
dans son univers. Totoro n’entre en scène qu’au bout d’une
demi-heure de film. Auparavant, Mei aura eu le temps d’explorer les
labyrinthes qui mènent à la cachette de Totoro. Elle rencontre deux
mini Totoro et les suit. Ils ne savent pas à qui ils ont affaire et
craignent, forcément, les humains. Mais la petite fille suit la
piste des glands laissés là à son intention. Elle entre dans un
monde secret que la musique de Joe Hisaishi rend magique. Totoro et
ses comparses vivent au creux d’un chêne géant dans la forêt
(Hayao Miyazaki élabore son message écologique en douceur et
subtilité). Puis Mei entraine sa grande sœur dans ses aventures
nocturnes. Plus tard ce sera la rencontre avec le chat-bus, un autre
monstre géant qui parcoure la campagne pour prendre quelques
voyageurs.
La
maman de Mei lui manque beaucoup et un jour elle décide d’aller la
retrouver à l’hôpital. Mais Mei se perd. Stasuki ira chercher
Totoro pour la rejoindre à bord du chat-bus. La réalité des
angoisses prend le pas sur la magie. Satsuki parcourt d’abord la
campagne pour retrouver sa sœur égarée. Là aussi l’idée du
labyrinthe opère l’idée du film horrifique. La nuit commence à
tomber, la plaine est grande, quadrillée par les rizières. Mais
qu’importe au chat-bus, il les traverse de part et d’autre pour
poser les fillettes dans un arbre qui jouxte la chambre de la maman.
Mon
voisin Totoro
est loin de n’être qu’un conte pour enfants, au contraire il
invoque les peurs primales, la solitude et l’angoisse de la mort.
Tout cela fait peut-être beaucoup pour une petite fille mais c’est
le chemin pour grandir.
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