Bonjour,
je m'appelle Marie-France et j'ai décidé de prendre ma vengeance.
La Volante retrace mon histoire et j'ai choisi deux cinéastes
qui ont l'habitude de faire des films peu aimables. Nathalie Baye a
l'honneur de m'incarner. Son visage un peu froid est parfait pour ne
pas exprimer la haine que j'éprouve à l'égard de Thomas, mon
nouvel employeur. Lui est joué par Malik Zidi, éternel jeune espoir
du cinéma français. Il s'y connaît en films malsains, il a débuté
chez François Ozon, à l'époque où il faisait encore des films
piquants.
Me
venger de quoi ? De la mort de mon fils tué dans un accident de
voiture. Il pleuvait ce soir-là, Thomas conduisait la bagnole. Il
emmenait sa femme Audrey à la maternité. On s'est croisé dans le
couloir de l'hôpital. Quelle ironie tout de même, mon fils meurt et
son fils naît. En même temps. Comme j'ai décidé que mon fils a
été volé par Thomas, je vais m'approprier le sien. Je vais
m'approcher de Thomas, le mettre en confiance puis lui tendre un
piège diabolique. Neuf ans après la mort de mon fils, je deviens sa
secrétaire particulière.
Comment
j'ai réussi ce prodige ? Jamais le film ne l'expliquera. Je
sais que ça aurait été passionnant de raconter tout ça, mais le
film aurait été encore plus invraisemblable. Je suis parvenu à me
faire embaucher pour remplacer sa collaboratrice en arrêt maladie.
Vous saisissez ? Vous comprenez qui a pu la mettre en arrêt
maladie ? Quand elle revient après sa convalescence, elle porte
toujours sa minerve. J'y suis peut-être pour quelque chose, mais je
ne le dirai pas. Le boss de Thomas trouve que j'ai fait du bon
boulot, il voudrait m'embaucher pour sa paperasse, mais j'ai d'autres
projets.
Entre
mon arrivée dans la boite de Thomas et mon départ, j'ai su me
rendre indispensable. Je devrais dire INDISPENSABLE avec des
majuscules, tellement je fais du bon boulot au bureau. Il tâche sa
chemise, je vais en acheter une. Son collègue oublie une fiche, je
lui la trouve. Un rendez-vous est changé, je lui rappelle. Et je
l'aide aussi après le boulot. Je fais du baby-sitting pour garder
Léo, son fils. Faut dire que Thomas s'est disputé avec la mère du
petit. Quelle aubaine, je vais pouvoir l'habituer à moi, lui donner
l'éducation qu'il mérite et les valeurs que j'ai.
La
mère de Léo semble comprendre que je suis un peu trop présente.
Elle me jette des regards obliques sur une musique lourde
d'insinuation. En général, tout le monde me jette des regards
obliques sur une musique lourde d'insinuation, c'est le moyen qu'ont
trouvé le duo de cinéastes pour faire monter la tension et
l'angoisse. Tout le monde semble me suspecter. Faut pas me chercher
car je cogne. Une pétasse en a fait les frais au restau, comme je te
l'ai agrippée celle-là. Elle avait peut-être rien fait, mais ça
montre aux spectateurs que je suis capable de tout.
Alors
c'est vrai que montrer la folie qui s'empare de mon cerveau malade
avec un seul moyen de mise en scène, c'est pas beaucoup. Mais je
vais au bout de ma folie, je ne lésine pas sur les moyens pour
m'emparer de Léo. Le petit semble résister, sa mère aussi, son
père commence à avoir des doutes sur ma présence constante, mais
ça fait rien, je m'accroche à l'idée de devenir mère à nouveau.
Il me faut donc un nouveau mari et une nouvelle maison. Je choisit le
père de Thomas, un veuf qui habite à la campagne.
Ça
sera parfait la campagne pour élever Léo. J'ai failli écrire
enlever. Ooops. Gros lapsus révélateur. Mais je crois que j'en ai
déjà trop dit. On me compare à un personnage à la Hitchcock, sans
doute parce que je suis blonde comme Kim Novak ou un peu barrée
comme la femme de chambre de Rebecca. N'exagérons pas, je ne
suis que Marie-France, secrétaire volante bientôt à la retraite,
mais c'est déjà tellement plus crédible que Pierre Niney en
déménageur/écrivain dans Un homme idéal. On a les
thrillers qu'on mérite.
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