dimanche 5 avril 2020

Sex-shop (Claude Berri, 1973)

Comme Céline et Julie vont en bateau, j'ai découvert Sex-shop en salle en avril 1998 à l'occasion de l'inauguration de la Salle Juliet Berto à Grenoble. Je pense que Claude Berri a aidé à la production du film de Jacques Rivette parce que Juliet Berto était sa partenaire à l'écran dans Sex-shop. C'est amusant de voir que Claude Berri a produit la même année Céline et Julie vont en bateau et Le Grand bazar de Claude Zidi avec les Charlots.

Claude est libraire, ça marche pas fort. Ça coince dans son couple avec Isabelle (Juliet Berto) qui s'occupe de leurs deux enfants, Jules et Thomas. L'un des amis de Claude, un type joué par l'animateur télé Jacques Martin, vient lui donner quelques conseils. Cet ami à l'étoffe du commerçant carnassier capable de vendre du sable dans le désert. Tout l'inverse de Claude. Voici la reconversion qui commence.

La librairie se transforme en sex-shop, ça tombe bien que tout se passe dans le quartier Saint-Denis. A côté de la vitrine, deux prostituées (Catherine Allégret et Francesca Romana Coluzzi) observent le petit manège des clients qui viennent chercher du sexe virtuel, ici il ne s'agit encore que de livres, accessoires et parfois de diaporamas en noir et blanc dans un coin de la boutique. Le sex-shop ne désemplit pas.

Il faut embaucher du personnel. La nouvelle employée sera une jeune femme à l'aspect androgyne, c'est Béatrice Romand, l'une des actrices d'Eric Rohmer, qui tient ce rôle de fausse ingénue. Elle prend un ton très détaché pour vendre à un quidam des vibromasseurs, comme si elle vendait une paire de chaussures. Claude la drague, maladroitement, mais elle se sent attirée par Isabelle.

Claude Berri s'amuse de l'ignorance de son personnage dans ce nouveau business. Il est un peu perdu dans tous ces nouveaux objets d'autant que les demandes sont très précises. Il écoute les conseils d'un vieux monsieur respectable (Jean Tissier) spécialiste de tous les ouvrages érotiques, là le cinéaste joue sur le décalage entre ce qu'il dit et son statut d'aristocrate (il se présente comme Monsieur de la Grange).

Passé ce petit moment de « documentation » sur un sex-shop, il faut injecter un peu de fiction dans le récit. Elle arrive avec un couple de clients, Lucien (Jean-Pierre Marielle) et Jacqueline (Nathalie Delon). Elle tape dans l’œil de Claude et Lucien le remarque bien, sa moustache frétille. Ils sympathisent immédiatement. Claude Berri reprend ici son personnage d'éternel amoureux maladroit devant la beauté de Nathalie Delon.

Claude va un peu tromper Isabelle en allant dans des clubs échangistes avec le couple. Il lui ment pour s'éclipser du foyer (un bobard qu'elle repère vite). Jacqueline est prête à coucher avec Claude mais il perd tous ses moyens quand il comprend que les autres invités de la partouze veulent voir, et en tour premier lieu Lucien. Un petit ballet comique s'amorce où Claude va changer de pièce mais les autres rappliquent aussitôt.

Isabelle entend bien donner une leçon à son mari. C'est le temps d'une croisière érotique sur un bateau libertin. Parmi les invités, un gendarme qui n'a pas froid aux yeux (Claude Piéplu) et sa femme, toujours volontaires pour les échanges de couple. Et encore une fois, (gag récurrent) Claude et Jacqueline jouent à leur jeu du chat et de la souris devant Lucien qui s'allie à Isabelle, parce qu'il est las de la lâcheté de Claude.


Mais il faut bien finir le film après tout ce récit gentil tout plein sur la libido déréglée par l'érotisme. Claude Berri tranche pour un fin sur la censure d'état (on était encore sous Pompidou) qui piège le libraire du sex-shop pour le fermer. Ça aussi ça a dû arriver souvent avant que le porno ne prenne toute la place dans les salles de quartier, mais de ceci est une autre histoire que Claude Berri n'a jamais racontée.






















Aucun commentaire: