Comme
Céline et Julie vont en bateau, j'ai découvert Sex-shop en salle en
avril 1998 à l'occasion de l'inauguration de la Salle Juliet Berto à
Grenoble. Je pense que Claude Berri a aidé à la production du film
de Jacques Rivette parce que Juliet Berto était sa partenaire à
l'écran dans Sex-shop. C'est amusant de voir que Claude Berri a
produit la même année Céline et Julie vont en bateau et Le Grand
bazar de Claude Zidi avec les Charlots.
Claude
est libraire, ça marche pas fort. Ça coince dans son couple avec
Isabelle (Juliet Berto) qui s'occupe de leurs deux enfants, Jules et
Thomas. L'un des amis de Claude, un type joué par l'animateur télé
Jacques Martin, vient lui donner quelques conseils. Cet ami à
l'étoffe du commerçant carnassier capable de vendre du sable dans
le désert. Tout l'inverse de Claude. Voici la reconversion qui
commence.
La
librairie se transforme en sex-shop, ça tombe bien que tout se passe
dans le quartier Saint-Denis. A côté de la vitrine, deux
prostituées (Catherine Allégret et Francesca Romana Coluzzi)
observent le petit manège des clients qui viennent chercher du sexe
virtuel, ici il ne s'agit encore que de livres, accessoires et
parfois de diaporamas en noir et blanc dans un coin de la boutique.
Le sex-shop ne désemplit pas.
Il
faut embaucher du personnel. La nouvelle employée sera une jeune
femme à l'aspect androgyne, c'est Béatrice Romand, l'une des
actrices d'Eric Rohmer, qui tient ce rôle de fausse ingénue. Elle
prend un ton très détaché pour vendre à un quidam des
vibromasseurs, comme si elle vendait une paire de chaussures. Claude
la drague, maladroitement, mais elle se sent attirée par Isabelle.
Claude
Berri s'amuse de l'ignorance de son personnage dans ce nouveau
business. Il est un peu perdu dans tous ces nouveaux objets d'autant
que les demandes sont très précises. Il écoute les conseils d'un
vieux monsieur respectable (Jean Tissier) spécialiste de tous les
ouvrages érotiques, là le cinéaste joue sur le décalage entre ce
qu'il dit et son statut d'aristocrate (il se présente comme Monsieur
de la Grange).
Passé
ce petit moment de « documentation » sur un sex-shop, il
faut injecter un peu de fiction dans le récit. Elle arrive avec un
couple de clients, Lucien (Jean-Pierre Marielle) et Jacqueline
(Nathalie Delon). Elle tape dans l’œil de Claude et Lucien le
remarque bien, sa moustache frétille. Ils sympathisent
immédiatement. Claude Berri reprend ici son personnage d'éternel
amoureux maladroit devant la beauté de Nathalie Delon.
Claude
va un peu tromper Isabelle en allant dans des clubs échangistes
avec le couple. Il lui ment pour s'éclipser du foyer (un bobard
qu'elle repère vite). Jacqueline est prête à coucher avec Claude
mais il perd tous ses moyens quand il comprend que les autres invités
de la partouze veulent voir, et en tour premier lieu Lucien. Un petit
ballet comique s'amorce où Claude va changer de pièce mais les
autres rappliquent aussitôt.
Isabelle
entend bien donner une leçon à son mari. C'est le temps d'une
croisière érotique sur un bateau libertin. Parmi les invités, un
gendarme qui n'a pas froid aux yeux (Claude Piéplu) et sa femme,
toujours volontaires pour les échanges de couple. Et encore une
fois, (gag récurrent) Claude et Jacqueline jouent à leur jeu du
chat et de la souris devant Lucien qui s'allie à Isabelle, parce
qu'il est las de la lâcheté de Claude.
Mais
il faut bien finir le film après tout ce récit gentil tout plein
sur la libido déréglée par l'érotisme. Claude Berri tranche pour
un fin sur la censure d'état (on était encore sous Pompidou) qui
piège le libraire du sex-shop pour le fermer. Ça aussi ça a dû
arriver souvent avant que le porno ne prenne toute la place dans les
salles de quartier, mais de ceci est une autre histoire que Claude
Berri n'a jamais racontée.
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