Cassando
the exotico ! (Marie Losier, 2018)
L'image
au bord rond est jolie, venue de la caméra super 16 de la cinéaste,
une caméra portée qui permet de suivre le catcheur partout dans un
portrait rigoureux et imaginaire. Imaginaire car parfois la cinéaste
s'embringue dans quelques scènes expérimentales calées comme des
pauses entre la chronique de Cassandro. L'image est accélérée,
elle part dans tous les sens, elle décadre le sujet dans une visée
artistique. Rigoureux parce que ce film sur le plus célèbre
catcheur gay qui bosse depuis 27 ans sur les rings du Mexique et des
USA raconte beaucoup de choses en peu de temps (le film fait à peine
75 minutes). Cassandro évoque son passé : ancien toxico,
alcoolique, il parle de ses nombreuses opérations consécutives aux
blessures pendant les matches, il se recueille sur la tombe de sa
mère qui lui appris le maquillage, il parle de son père avec qui il
s'est longtemps disputé et qui est son meilleur ami depuis quelques
années. Cassandro raconte sa vie avec sourire, une vie foutraque et
trépidante, colorée et bigarrée avec ses costumes extravagants et
sa coiffure que Régine portait dans les années 1980. Parfois
Cassandro déprime, il demande à Marie Losier d'éteindre la caméra
– ce qu'elle ne fait pas forcément – ils discutent sur skype, il
veut tout arrêter. Et la séquence suivante, il reprend du poil de
la bête. La générosité de Cassandro est infinie, elle est montrée
dans toute sa splendeur lors de la tournée européenne. Il donne des
cours de catch à des jeunes catcheurs, il se donne sans compter,
avec une joie d'apprendre les meilleurs coups comme les meilleures
esquives. Le catch de Cassandro, ça n'est pas du cinéma, c'est très
beau.
Wildlife
(Paul Dano, 2016)
C'est
marrant comme ce premier film de Paul Dano est à l'image de
l'acteur, totalement sans aspérité mais sans une seule faute de
goût. Tout est bien raconté, les acteurs jouent bien, le décor est
bien exécuté, la tension entre les personnages est palpable,
l'époque est reconstituée sans ostentation mais avec précision,
quelques thématiques de cinéaste d'auteur se dégagent mais en fait
de compte Wildlife
regorge de tout ce que je n'ai pas envie de voir. Le film a pourtant
fait l'ouverture de la Semaine de la Critique à Cannes cette année.
La sagesse est l'une des choses les plus ennuyeuses au cinéma.
Miraï
ma petite sœur (Mamoru Hosoda, 2018)
Le
parti pris formel radical de Miraï ma petite sœur consiste à
confiner le récit dans un espace clos, une petite maison au beau
milieu d'une zone pavillonnaire d'une grande ville du Japon. Papa est
architecte, c'est lui qui a dessiné cet étrange appartement en
triplex, maman vient de donner naissance à la petite Miraï et Kun
le fils aîné, 4 ans tout juste, est jaloux comme un pou. La petite
famille vit avec le chien Yukko. Ce confinement semble sonner comme
un appel aux critiques et aux spectateurs pour rappeler que Mamoru
Hosoda est l'anti Miyazaki, qu'il faire un film entre quatre murs. Le
pari est à moitié réussi. Dès que Kun se met dans une colère
noire, il sort dans le jardin et se met à voir le futur (d'abord
avec le chien Yukko qui devient un prince mystérieux, ensuite avec
Miraï adolescente) dans la première moitié du film puis découvre
le passé (de sa mère, son père, son grand-père). Le tout a pour
but de montrer comment un enfant se construit. Ce récit
programmatique un peu répétitif et presque trop édifiant. Le
moment le plus émouvant est précisément quand le film sort de ce
cadre, dans le parc quand Kun apprend à faire du vélo.
L'Empereur
de Paris (Jean-François Richet, 2018)
Le
film se rêve en parangon de film d'action français de qualité.
Puisqu'il faut bien le reconnaître que depuis Le
Pacte des loups des Christophe
Gans, c'est-à-dire depuis 2001, un siècle, une génération de
cinéphiles entière, rien n'a vraiment existé. Vincent Cassel 18
ans plus tard joue plus essoufflé que jamais, comme si c'était la
norme pour créer la tension. Les scènes d'action sont filmées en
gros plan, comme le faisait Ridley Scott lors de son pénible
Gladiator,
c'est dire la ringardise du film et l'ennui profond qu'il distille
petit à petit au fur et à mesure des retournements de situation
plus improbables et incohérents les uns que les autres. Tout le
monde joue en hurlant ses dialogues, surtout les hommes aux visages
atrocement grimaçant, palme du cabotinage à Denis Lavant qui semble
le seul à comprendre le ridicule de la mise en scène de
Jean-François Richet. Tous les acteurs ont le double de l'âge des
actrices qui elles semblent sortir de chez le dentiste et le
coiffeur. Ce contraste physique s'appelle du sexisme. Ce cinéma est
vraiment tombé bien bas.
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