J'aime
beaucoup l'ouverture de Bleeder, deuxième film de Nicolas
Winding Refn entre deux Pusher, resté inédit en salles en
France jusqu'à cette semaine. Après un carton rouge sang annonçant
le titre et les noms des acteurs principaux, chacun vient présenter
son personnage en marchant dans la rue au son d'une chanson
illustrant leur tempérament. Lenny (Mad Mikkelsen), Lea (Liv
Corfixen), Leo (Kim Bodnia) Louise, sa petite amie (Rikke Louise
Andersson) et Louis le frère de Louise (Levino Jensen). Au gré de
ces morceaux de musique, on en saura déjà pas mal sur les
personnages, qui est calme et qui est excité.
Le
calme Lenny bosse dans un vidéoclub. Il est entouré de VHS, objet
tombé dans les oubliettes de l'Histoire. Quand un client débarque
et demande où il peut trouver La Colline a des yeux 2, Lenny
débite le nom de tous les réalisateurs ayant une VHS dans ce
vidéoclub et leur emplacement, comme un catalogue sans fin, l'un des
rares moments comiques du film. Il ne vit que pour le cinéma et par
les films. Avec son patron (Zlatko Buric), flegmatique comme un
acteur d'Aki Kaurismäki, Lenny organise des séances de ciné-club
dans l'arrière boutique avec Leo et Louis. Des films de cinéma
d'exploitation, évidemment. Et ça cause bien entendu acteurs et
films.
Leo
vit avec Louise. Et ce matin-là, il annonce à son pote, sans aucun
sourire, avec une absence totale de joie, que Louise est enceinte.
Seulement voilà, Leo n'en veut pas du môme et ils vivent dans un
appartement minable. Louis, le frère encombrant et raciste sur les
bords et au milieu, traite le gentil Leo de tous les noms. Le frangin
a bien vu que son beauf ne déborde pas d'enthousiasme. Les deux gars
ne s'aiment pas et toute la tension dramatique de Bleeder va
se concentrer sur cette haine viscérale dans une douce explosion de
violence larvée comme le cinéaste les aime. Nicolas Winding Refn
annonçait très tôt la couleur avec ses fondus au rouge.
Lea,
jouée par l'épouse de Nicolas Winding Refn, a un rôle plus
périphérique. Elle ne croisera que Lenny qui passe de temps en
temps dans son fast-food. Elle s'emmerde profondément dans son
travail. Ils ne savent jamais quoi se dire, il ne parle que de films.
De son côté, Leo a trouvé un revolver et ne s'en sépare plus.
Tourné en caméra à l'épaule, en plans séquence (souvent),
Bleeder trimbale son lot de personnages englués dans une vie
médiocre. Pour certains, ils se contentent de vivre par procuration,
par le cinéma. Pour d'autres, c'est la descente aux enfers.
D'ailleurs, les prénoms de ces jeunes gens commencent par un L, L
like Hell.
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