lundi 14 novembre 2016

Il était une fois en Chine III, le tournoi du lion (Tsui Hark, 1993)

Fin de la trilogie de Il était une fois en Chine. Trilogie ? Oui, pour Tsui Hark et Jet Li qui n’ont fait que trois aventures de Wong Fei-hung ensemble. Alors bien sûr, on sait que Tsui Hark produira trois autres film et que Jet Li se fâchera avec le cinéaste et producteur démiurge. On le sait, il engagera Wong Jing pour tourner un film sur Wong Fei-hung alternatif (Claws of steel, 1993) et Tsui Hark va embaucher le jeune Chiu Man-cheuk pour remplacer la star. Voilà pour la petite histoire de la saga mais pour l'instant, Jet Li est là.

Il était une fois en Chine III : le tournoi du lion commence par un complot lancé par l’Impératrice douairière qui, pour rehausser l’image de marque de la Chine auprès des forces d’occupation occidentales, décide de lancer un concours de danse du lion à travers toute l’Empire. Belle scène inaugurale toute en travelling somptueux, en plans clairs-obscurs qui alternent des scènes très éclairées dans le palais forcément grandiose. Un homme filme la scène avec une caméra incunable. Puis, le célèbre générique est lancé où, cette fois, ce sont des danseurs dans des lions qui se déploient au rythme de la chanson.

Wong Fei-hung (Jet Li) part cette fois à Pékin avec la 13ème Tante (Rosamund Kwan) et le fidèle Kuan (Max Mok). Wong va voir son vénérable père, Maître Wong (Lau Shun) qui dirige une fabrique de gueules de lion pour les défilés. Tante rencontre sur le quai de la gare un de ses amis, un Russe. Il lui a offert la caméra qu’elle tient, mais Wong fait immédiatement preuve de sa jalousie maladive et reconduit le Russe sans courtoisie. On en est donc dans la modernité du cinéma. La caméra de la Tante va prendre une grande importance dans le récit, jusqu’à devenir un personnage à part entière, elle sera un élément clé dans ces aventures rocambolesques.

Le Tournoi du lion se déroule, encore une fois, dans une période troublée. Dans ce Pékin au tournant du siècle, Tsui Hark s’attaque après les fanatismes religieux aux triades. L’incarnation du mal a deux visages, Maître Bai fabricant de lion qui cherche à éliminer ses concurrents et Pied-bot (Hung Yan-yan). Pied-bot est sans doute le plus beau personnage du film. Dans La Secte du Lotus Blanc Hung Yan-yan jouait le chef de la secte, aujourd’hui il est un combattant au service du mal. Yuen Bun, qui chorégraphie les scènes d’action, met les bouchées doubles pour assurer la présence de l’acteur qui vole la vedette à Jet Li (peut-être une des raisons de la discorde).

Pied-bot attaque avec des cris incroyables proches de ceux de la hyène, ce qui perturbe ses adversaires . Mais surtout, il virevolte sur les murs, s’envole dans les airs avec un rapidité démente. De ce point de vue, le film frôle l’abstraction pure comme rarement on l’a vu, y compris dans les Histoires de fantômes chinois produits par la Tsui Hark. Pied-bot est la cheville ouvrière de son clan qui abuse de violence pour gagner le championnat. Mais lors d’un combat, Pied-bot est blessé et son clan l’abandonne. Là est la seule vraie d’émotion de toute la trilogie, bien plus grande que celle avec les enfants dans La Secte du Lotus Blanc.

Pied-bot veut se laisser mourir, sa jambe magique ne lui sert plus à rien. Wong Fei-hung dans sa grande humanité va alors le soigner et Pied-bot va devenir son nouveau disciple. Le grand moment du Tournoi du lion va pouvoir alors commencer avec sa compétition déchaînée de lions qui vont chercher à atteindre la récompense. Là encore, l’équilibre des combats menace de rompre à tout moment mais Tsui Hark en fait un morceau de bravoure. Dans le même temps, le complot contre le Premier Ministre se met en place. La caméra, qui avait enregistré les mouvements de kung-fu de Wong Fei-hung, sert de moteur à l’histoire. Par cet enregistrement incunable, où le père de Fei-hung découvre les qualités de son fils, Tsui Hark cherche à mettre le héros chinois au cœur de l’histoire de son pays.

Mais Wong Fei-hung a beau être un héros, il est aussi un homme. La 13ème Tante l’oblige à l’appeler par son prénom, Siu-chun. Encore une fois elle cherche à lui enseigner quelques rudiments de la culture occidentale, avec un beau et important moment burlesque quand elle lui demande de répéter I love you, sans lui en donner le sens. Si j’ai commencé ce texte en disant que c’était la fin de la trilogie, c’est surtout parce que Wong Fei-hung se résout enfin par demander en mariage Siu-chun. Une histoire se clôt pour eux. Pour les spectateurs, elle va continuer.





















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