Le
Livre Guinness des records pourrait inscrire Contact dans ses
pages. Robert Zeemckis filme le plus long travelling de tout le
cinéma. Départ au sud est des Etats-Unis et travelling arrière
dans notre système solaire, puis notre galaxie pour poursuivre dans
l'espace intersidéral. Dans la bande-son, avec astuce (car cela
servira plus tard), on entend les sons mêlés et discordants
(presque comme dans film de Godard) de toutes les ondes transmises.
Et au fur et à mesure que l'on s'éloigne de la planète Terre, les
sons deviennent rares et de plus plus anciens. Ce travelling s'achève
au milieu de la pupille d'Ellie Arrowman, quand elle n'est qu'une
enfant.
Pour
dire la vérité, Contact a tout du navet. C'est un film très
long, très verbeux où chaque personnage explique plusieurs fois ce
qu'il fait, ce qu'il pense, dans une incapacité de la mise en scène
de Robert Zemeckis d'être sobre. Le film regorge de tout un
prêchi-prêcha théologique d'une rare indigence entre un prêtre,
Palmer Joss (Matthew McConaughey) et Ellie (Jodie Foster). On cause
avec des grands airs et des convictions de la Foi, de Dieu, de
l'Univers, que des mots avec des majuscules. La romance entre eux est
aussi ennuyeuse que les rivalités entre Ellie et Drumblin (Tom
Skeritt) son patron.
Et
pourtant, malgré tous ses défauts flagrants, j'aime à la folie
Contact. Pas le film en totalité que désormais je regarde en
diagonale, zappant les parties sur l'enfance d'Ellie avec son gentil
papa, sa découverte des étoiles et la mort du père. Je ne regarde
plus les premiers pas entre Palmer et Ellie à Puerto Rico (ridicule
scène de lit), ni la partie en fin de film sur la commission
d'enquête, je me concentre sur quelques séquences et mouvements
scénaristiques qui me plaisent beaucoup, bref tout ce qui concerne
l'espace intersidéral, la découverte du contact envoyé de Véga,
le décryptage du message, la construction du véhicule et le voyage.
Quand
Robert Zemeckis fait bien son boulot, il travaille sur l'opposition
entre son et image, comme l'amorçait la séquence d'ouverture comme
une réponse à celle, noire mais musicale, de 2001 l'odyssée de
l'espace. Ce son que Ellie cherche depuis son enfance,depuis
qu'elle a ce boulot au SETI : écouter une trace de vie
extra-terrestre. Le son vient à ses oreilles, un bruit rugueux et
répétitif similaire à celui d'une machine. Un son énigmatique que
Ellie détermine comme venant de Véga, bien bien loin de chez nous,
de son centre d'observation. Et là, c'est le drame, le son s'arrête,
la machine lancinante ne se fait plus entendre, pour enfin reprendre.
Le son annonce des chiffres premiers, eurêka, Ellie sait que cela
vient d'une civilisation.
Puis,
c'est Kent Clark (William Fichtner) le collègue aveugle, celui qui
ne peut pas voir mais qui entend tout, un phare dans ce monde vide,
c'est lui qui conçoit que derrière ce son se cache une image. Et
cette image renvoie au début de la télévision et à Hitler. On
dirait presque encore une fois un discours et une pensée
godardiennes. Chez Zemeckis, rien n'est intellectualisé, c'est
plutôt inné, viscérale, naturel pour les personnages, mais Ellie
est à la recherche d'images des étoiles venues d'un lieu lointain
où le son n'existe pas. Et pour cela, il n'existe qu'une seule
solution : substituer à son propre corps les effets spéciaux,
dédoubler son visage lors du passage dans les vortex et confondre
l'espace et le temps.
L'homme
qui finance la construction de la machine à voyager vers Véga est
Hadden (John Hurt). J'ai toujours trouvé qu'il ressemblait au
professeur Ezdanitoff dans Vol 714 pour Sidney, petites
lunettes, boule à zéro, propos péremptoires sur les
extra-terrestres, connaissance sans limite. Il permet à Ellie d'être
l'initiée. J'adore cette idée que la capsule tombe dans la mer en
une seconde, comme un projet tombe à l'eau, que Ellie ne pourra rien
raconter de tout ce qu'elle va vu au fin fonds du monde, sans bouger,
comme une métaphore du spectateur qui a envie de croire à
l'histoire que lui raconte le cinéaste. Moi, j'y crois depuis 20
ans.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire