Dans
le cosmos, une jeune femme de 30 ans prénommée Hélène ne sait pas
parler mais elle sait écrire. Et pas qu'un peu. Julie Bertuccelli l'a
rencontrée il y a deux ans quand le metteur en scène de théâtre
Pierre Meunier a décidé de mettre en scène certains des textes
hautement métaphoriques et souvent intellectuels d'Hélène Nicolas
sous le pseudonyme de Babouillec. La cinéaste a pris sa petite
caméra et a suivi Hélène de la conception du spectacle Forbidden
di sporgersi à sa présentation au Festival d'Avignon 2015.
On
ne sait d'abord pas vraiment où nous mène le premier quart d'heure
de Dernières nouvelles du cosmos. Pas de commentaires dans ce
documentaire, pas d'explications. Hélène se déplace avec une bouée
autour des hanches, elle pénètre dans un hangar qui sert de salle
de répétition, elle pique le livre Algorithme éponyme des
mains de Pierre qui va le récupérer pour en lire quelques phrases.
On pense qu'il s'agit d'un atelier pour autistes puisque Hélène est
autiste, comme le dit sa mère Véronique, mais on comprend qu'elle
est l'auteur de ces lignes, de ce texte énigmatique et dense.
La
méthode d'écriture est au centre du film. Une boîte contient
toutes les lettres de l'alphabet écrites sur des petits cartons,
Hélène saisit avec deux doigts une lettre, la pose à droite d'une
feuille blanche pour bien la montrer à son interlocuteur, reprend la
lettre et la met sur la page. Les mots se forment, puis les mots
forment des phrases et les phrases des textes. Cela fonctionne comme
un rituel, chaque lettre posée est suivie d'un petit coup du doigt
sur la table. Et ensuite, les textes apparaissent sur l'écran, comme
dans le titre du générique (repris sur l'affiche).
Véronique
parle beaucoup de sa fille, de la découverte de son autisme et du
travail de longue haleine pour communiquer avec Hélène. Elle
voulait la sortir du noir, l'en délivrer. Elle raconte comment elle
a commencé à écrire, par quel biais. Et là, on apprend que Hélène
n'a jamais appris à lire ni écrire, sa mère n'explique pas comment
elle sait écrire, et sans faute d'orthographe, comme on le voit sur
l'écran. Et pas des mots simples, ô combien, elle a un vocabulaire
complexe. Véronique espère qu'elle trouvera un jour la porte pour
le langage.
Julie
Bertuccelli filme les moments de joie (la promenade à cheval, la
baignade dans la mer, écouter des chansons de Bashung), les moments
d'angoisse (la lecture d'un article de Libération, pourtant
élogieux, met Hélène dans tous ses états), les crises. Elle filme
aussi des rencontres avec deux journalistes radio qui font un
reportage « les fantômes de la langue », plus loin, elle
rencontre un mathématicien et semble en harmonie avec lui. Véronique
soupçonne sa fille, non sans humour, d'être télépathe. Et
pourquoi pas ?
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire