L'aisance
avec laquelle Richard Linklater parvient à faire exister tant de
personnages qui sont, pourtant, à peu près tous les mêmes me plaît
beaucoup. Everybody wants some se passe dans les trois jours
précédant le rentrée universitaire de 1980, au beau milieu du
Texas. Au centre du récit, premier à arriver dans la maison de
l'équipe de baseball de la fac, Jake (Blake Jenner). Il rencontre
ses futures colocataires pour une année, certains sont anciens,
d'autres des nouveaux comme lui. Ce qui frappe, c'est la complicité,
si difficile dès le début d'un film, entre les acteurs tous
inconnus, ou presque (sauf Tyler Hoechlin vu dans la série Teen
wolf, Glen Powell dans la série Screaming queens et Wyatt
Russell coup de foudre de Channing Tatum dans 22 Jump Street).
Cette complicité indiquant la maîtrise de la direction d'acteurs de
Richard Linklater se déploie dans l'une des premières scènes où
cinq d'entre eux chantent « Rapper's delight » dans une
voiture. Si à cette scène, cher spectateur, tu n'accroches pas,
autant quitter la salle.
De
quoi causent ces grands garçons un peu crétins ? Que font-ils
pendant ces trois jours avant le premier cours ? Tout d'abord,
on pourrait parler de ce qu'ils ne faut pas. Ils ne parlent pas de
politique, malgré la campagne des primaires (Reagan contre Carter),
ils ne parlent pas des études, des cours, des profs, ils ne parlent
pas de leur famille, de leur passé, si ce n'est par quelques bribes
évoquées ici ou là, ils ne parlent pas de leur projet de vie.
Everybody wants some évite les écueils des films
d'étudiants, notamment le bizutage (Retour à la fac de Todd
Philips), les guerres entre fraternités (Nos pires voisins de
Nicholas Stoller), le dépucelage avant la rentrée (pleins de titres
de films). Les gars sont Texans, ils boivent (de la bière et des
alcools forts), ils dansent (sur du disco, du rock et de la country)
et ils essaient de draguer. Surtout, certains (les deuxième année)
portent des moustaches, gage de maturité. Quand l'un des nouveaux,
un blondin, laisse pousser son duvet, tous les autres le chambrent.
Richard
Linklater s'intéresse à la fois au groupe et aux individualités
qui le composent. Le groupe, c'est l'équipe de baseball, toujours
moquée dans ce genre de films qui s'attachent plutôt aux faibles,
aux brimés, aux artistes. Les personnages pris séparément sont
portes par le regard empathique du cinéaste. Entre le dragueur
impénitent, le bas de plafond, l'énervé prêt à la castagne, le
bouseux et le macho à débardeur (entre autres), Jake doit trouver
un peu d'espace pour arriver à séduire la jeune étudiante
rencontrée en début du film. Car tous ces étudiants ne se séparent
jamais (la séquence où Jake cherche un lit pour finir avec une
fille est caractéristique). Le film fonctionne sur un tissage de
variations entre les jeunes gars, tout est dans le détail des
tenues, des accessoires (frôlant parfois un kitsch bienvenu, ces
terrifiantes hideuses années 1980 le permettent) et dans l'humour.
Un humour qui consiste essentiellement à des vannes qu'ils se
lancent entre eux et qui percutent à chaque fois, tels les lancers
de balle de leur sport.
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