Les
Premiers les derniers (Bouli Lanners, 2015)
Les
vingt premières minutes du quatrième film de Bouli Lanners sont
formidables. Le cadre est encore une fois superbe avec cet art de
filmer les nuages en cinémascope, le Loiret et non la Belgique cette
fois. Le récit est mystérieux avec ces deux duos. Un homme et une
femme portant une veste de chantier orange qui marchent sur un
immense pont de béton qu'on croirait venu d'un film de science
fiction. Deux hommes (Bouli Lanners et Albert Dupontel) qui les
recherchent avec un émetteur. Et entre les deux, un gars énigmatique
qui se fait appeler Jésus, disparaissant et apparaissant par magie.
Et au fur et à mesure que la clarté se fait dans le récit à
grands coups de dialogues explicatifs, le mystère se dissout et
l'intérêt aussi.
Les
Tuche (Olivier Bartoux, 2010)
Les
Tuche 2 le rêve américain (Olivier Baroux, 2016)
C'est
un fait entendu, les deux films sont des merdes sans nom, des hontes
pour le cinéma français, des films même pas drôles. Minute
Papillon ! Les films ne font que reprendre un vieux modèle du
film comique français, confronter deux milieux totalement opposés
et voir ce que ça donne. En l'occurrence, des quiproquos. Derrière
le comique d'Olivier Baroux, le Jean Girault de notre époque, où
Jean-Paul Rouve, Isabelle Nanty et Claire Nadeau sont souvent très
drôles à force de confusion langagière, les deux films
s'attachent, sans y toucher, à évoquer deux sujets forts. Les
Tuche est un plaidoyer anti
raciste (la fille sort avec un footballeur black, la mère devient le
meilleure amie de sa voisine libanaise), Les
Tuche 2 le rêve américain se
termine par le mariage entre le fils et le jardinier mexicain.
Conclusion : les beaufs ne sont pas tous des électeurs du Front
National. Point répulsif : une laideur constante de l'image.
Joséphine
s'arrondit (Marilou Berry, 2016)
Marilou
Berry qui tient le rôle titre et qui commet ici son premier
long-métrage a tellement peur que les autres personnages, donc les
autres acteurs, lui volent la vedette qu'elle réduit à la portion
congrue leur présence dans le cadre et les enferme dans des
caricatures extrêmement pénibles. Faute de partenaires, les gags
échouent les uns après les autres à faire rire. Le montage
survolté et incohérent, censé évoquer la veine bande-dessinée,
fait penser aux derniers films de Jean-Marie Poiré, les éprouvants
Anges gardiens
et Ma femme s'appelle Maurice.
Point révulsif : Jean-Pierre Pernault fait une apparition.
Pattaya
(Franck Gastambide, 2016)
A
un mois de distance, on peut voir Franck Gastambide dans deux rôles
différents. Dans Made in
France, il est ce flic cynique
qui tient par le chantage à l'attentat ce pauvre Malik Zidi, un
personnage sans vraisemblance issu du cinéma des années 1980
(période Robin Davis). Dans Pattaya,
sa deuxième réalisation, il joue le crétin comme dans Les
Kaïra. Le trio d'abrutis des
banlieues change (Anouar Toubali, le facteur des Kaïra
devient le nouveau nain, Malik Bentalha remplace Medi Sadoun, star
depuis le succès de Qu'est-ce
qu'on a fait au bon dieu) mais
reste aussi sympathique. Le comique mis en œuvre dans Pattaya ne
vole pas haut (bite, caca, prout) mais fonctionne grâce à un rythme
et un sens du gag rares dans le genre. L'humour consiste à
transposer un quartier de banlieue au fin fond de la Thaïlande, dans
le registre du glissement sémantique et des chausses trappes du
langage, Ramzy Bedia et Franck Gastambide, grimé comme Eric Judor,
sont en symbiose. Le personnage de Franck Gastambide porte à chaque
plan un t-shirt différent avec Vin Diesel imprimé, bel hommage. La
présence énergique de Sabrina Ouazani en début de film est
superbe. Le scénario est assez peu passionnant et Gad Elmaleh semble
jouer dans un autre film. Point révulsif : caméo de Cyril
Hanouna.
Zootopie
(Byron Howard & Rich Moore, 2016)
Zootopie
est assez drôle, avec deux séquences rondement menées. Une visite
chez des naturistes comme dans Quand
l'Inspecteur s'emmêle de
Blake Edwards et le passage, tellement réaliste, par la tracasserie
administrative (je l'ai vécue aux USA) avec ces paresseux aux
guichets. Zootopie
est un film policier aux multiples rebondissements, un buddy movie où
le renard et la lapine, le petit malin et la naïve, l'urbain et la
campagnarde vont affronter les gros animaux. Les pelages et les
couleurs sont agréables aux yeux. L'architecture de la ville de
Zootopie est astucieusement créée : chaque famille d'animal a
sa zone climatique, sa taille de logement et son mode de vie. Cela
permet une grande variété d'échelle et de visuel, donc de
créativité. Les dialogues pétillent même si on reste dans
l'habituel récit édifiant qui me rappelle cette chanson de mon
enfance : « tous les animaux du monde, tous les animaux
sont nos amis, du lion à la colombe, du renard au ouistiti. »
Point répulsif : la chanson de Shakira.
La
cérémonie des César a donc récompensé Fatima,
joli film de Philippe Faucon, qui l'aurait tout autant mérité pour
La
Désintégration
ou Dans
la vie.
Bon choix mais j'aurais préféré voir triompher Trois
souvenirs de ma jeunesse
que je considère comme le meilleur film de l'année 2015, et je ne
parle pas seulement du cinéma français. Comme l'an dernier, les
César sont donné à presque tous les films, un émiettement digne
de l'école des fans. Tout le monde a gagné. Sauf Mon
roi l'atroce
navet de Maïwenn, mais il faut conserver les quotas de film beauf
tant que Kev' Adams n'est pas nominé (ça arrivera, comme c'est
arrivé à Daniel Auteuil sept ans après Les
Sous-doués
de Claude Zidi). Après la catastrophique soirée menée par Edouard
Baer l'an dernier, Florence Foresti a souvent été très amusante,
moins dans son obsession pour Vincent Cassel que pour ces sketches
avec Vaness' ou ses amis humoristes. Enfin, célébrer le navrant
Birdman
au lieu de Taxi
Téhéran
ou Demain
de Cyril Dion au lieu de L'Image
manquante
prouve que les César portent bien leur nom, l'Académie des arts et
techniques du cinéma. Il ne faudra pas que les électeurs oublient
chaque année le mot art. Il reste ce César d'honneur attribué à
Michael Douglas applaudi mollement par les personnes présentes dans
le théâtre du Chatelet. Je me demande comment ce prix est choisi,
qui décide et quel en est l'intérêt. Depuis quelques années,
seuls des acteurs américains reçoivent un César d'honneur. On se
rappelle que Will Smith venait faire la promo d'un film totalement
oublié depuis. Oui, Will Smith a un César d'honneur en 2005.
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