Ça
fait quoi une jeune femme de 18 ans dans une ville de province
suédoise en 1962 ? Le matin, ça se maquille un peu, du rouge à
lèvres, une mouche sur la joue gauche, ça remet en place sa
choucroute à la Brigitte Bardot, ça va au boulot, un travail
abrutissant, ça démissionne en fin d'après-midi, le soir, ça se
laisse flirter au cinéma par les garçons, et ça rentre dans
l'appartement familial où les parents et le petit frère regardent
la télé. Voilà la vie de Britt (Inger Taube) selon Bo Widerberg
dans Le Péché suédois.
Britt
est plutôt mignonne et les garçons la regardent. L'un d'eux
s'intéresse à elle. Björn (Thommy Berggren) est soûl quand il la
rencontre. Il parle sans s'arrêter, elle ne dit pas un mot. C'est le
soir, les rues sont désertes et il la suit dans la pénombre,
faisant le beau, voulant lui offrir un petit bijou dans ces machines
où l'on met dix centimes et un cadeau sort. Il veut la revoir, lui
donne rendez-vous quelques jours plus tard, mais il ne viendra pas,
elle attend devant la fontaine ce jeune Don Juan de pacotille, comme
le bijou promis.
Les
boulots se suivent et se ressemblent, ses parents déménagent dans
un nouveau immeuble de banlieue, un appartement sans âme où Britt
installe le vieux lustre. C'est là qu'elle rencontre Robban (Lars
Passgård). Il est beau garçon Robban et il a une voiture. Il emmène
Britt faire un tour, dans la campagne, loin des yeux des adultes. Ils
passent la nuit ensemble, ce qui veut dire qu'ils couchent ensemble.
Le lendemain matin, Robban doit filer au boulot, mais ils vont se
revoir, passer du temps ensemble, Britt tombe amoureuse de lui.
Les
deux garçons, qui ont le même âge que Britt, sont de caractères
opposés. Robban rêve de devenir un rocker, il chante et joue de la
guitare. Il est impulsif et souriant, se promenant à moitié nu dans
l'appartement. Björn vient d'un milieu aisé, il est passionné de
classique, il fait découvrir Vivaldi à Britt. Mais, c'est un jeune
homme angoissé, notamment parce que ses parents sont divorcés et
que sa mère fréquente un homme qu'il méprise. Entre les deux,
Britt ne sait pas qui choisir car leurs défauts semblent supérieurs
à leurs qualités.
Le
destin va se permettre de choisir à la place de Britt. Elle tombe
enceinte de Robban. Et en 1962, dans la Suède profonde et dans son
milieu, être fille-mère est honteux. Cette vie morose qui attend
Britt, entre deux boulots mal payés, des parents peu compréhensifs,
des logements insalubres, Bo Widerberg la filme avec une musique de
free jazz, des miroirs qui reflètent la jeunesse suédoise et un
montage vif qui rappelle celui des cinéastes de la Nouvelle Vague
française. Le résultat donne un film alternativement joyeux et
déprimant, comme la vie de ces trois jeunes gens.
Notes :
Le titre original Barnvagnen se traduit par poussette pour
bébé. En Suède, en 1962, les véhicules roulaient à gauche bien
que les volants soient à gauche. Le changement de sens de
circulation de gauche à droite eut lieu en 1967.
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