Girl
shy fait partie de la veine
romantique d'Harold Lloyd, comme Le
Talisman de grand-mère,
où son personnage est extrêmement timide, incapable de parler à
une fille. En l'occurrence, Harold est ici atteint qu'un bégaiement
particulièrement handicapant. Il n'arrive jamais à finir la moindre
phrase, il a même du mal à regarder une dame arriver dans la
boutique où il travaille. Il est tailleur pour dames dans le magasin
de son oncle qui sort un sifflet pour arrêter son neveu de bégayer.
Comment filmer le bégaiement dans un film muet ? Les
intertitres ne sont pas utilisés (avec les lettres qui se
répéteraient par exemple), tout se joue avec le visage d'Harold
Lloyd, ses mimiques et le comique se poursuit jusqu'à ce coup de
sifflet.
Harold
est timide mais il se voit comme un grand séducteur. Il a écrit un
livre sur l'art de la drague. Les séquences fantasmées où il
décrit ses prétendues conquêtes féminines montrent un tout autre
Harold. Il est alors ce personnage d'insupportable capricieux et
arrogant. Le but du film est de parvenir à un équilibre entre ces
deux facettes. Harold présente ce livre à un éditeur de Los
Angeles et quitte pour une journée son patelin. L'éditeur le reçoit
bien gentiment mais à la lecture du manuscrit, tout le monde se met
à rire devant le ridicule des chapitres. Les secrétaires font
semblant de se pâmer devant Harold qui ne rend pas compte qu'on se
moque de lui. Si le livre n'est pas pris au sérieux pas l'éditeur,
il pourrait être publié comme un livre comique, histoire de se
faire un peu d'argent.
Dans
ce train pour Los Angeles, Harold a rencontré Mary Buckingham
(Jobyna Ralston) dont le patronyme dit bien qu'elle est une jeune
femme riche. Le matérialisme de leur romance, coup de foudre
spontané, se concrétise avec deux boites de biscuits vides qu'ils
se sont échangées. Une fois séparés, les tourtereaux contemplent
ces boites et se rappellent leur amour. Jusqu'à présent, c'est le
meilleur film d'Harold Lloyd que j'ai vu. Les 20 dernières minutes
sont composées d'une course poursuite effrénée, mise en scène
comme un mouvement perpétuel. Harold Lloyd change de nombreuses fois
de véhicule : train, voiture, cheval, moto, tramway. Tous les
obstacles, toutes les personnes qui se trouvent sur son chemin
constituent autant de gags hilarants. Je trouve émouvant, lors de
ces séquences en décors naturels loin des studios, de découvrir le
Los Angeles de 1924.
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