Depuis
quelques semaines, on lit dans la presse et on entend à la télé
que cet Euro 2016 doit être une fête. Il y a un glissement de
langage, finis la compétition, le championnat, les adversaires. Tous
ces mots sont remplacés par « fête » et même le terme
football est évité. A la fin d'A mort l'arbitre !,
Jean-Pierre Mocky fait dire au personnage de flic qu'il incarne, que
les supporters viennent assister au match pour expulser leurs pires
pulsions et faire la fête avant et après le match.
Tout
ça c'est sans compter sur l'arbitre (Eddy Mitchell) qui flanque un
carton rouge à un joueur de l'équipe des Jaunes (aucune ville n'est
donné, les équipes de football ne sont désignées que par la
couleur de leur maillot). Résultat : les Jaunes perdent le
championnat. Rico (Michel Serrault), le meneur des supporters veut
faire payer à « l'arbite » (comme il le prononce) son
erreur de jugement. La course poursuite s'engage.
D'un
côté, Maurice l'arbitre et Martine sa copine (Carole Laure), venue
assister au matc,h et qui se retrouve, précisément, dans la tribune
des Jaunes, juste à côté de Rico qui en profite pour lui faire des
gestes déplacés. A l'issue du match, Martine et Maurice sont
exfiltrés dans une fourgonnette pour échapper aux supporters et se
rendre à France 3. Maurice est persuadé que Rico et son gang ne
vont pas les poursuivre plus longtemps.
De
l'autre côté, Michel Serrault est accompagné de l'habituelle
déclinaison de tronches chères au cinéma de Mocky. Dominique
Zardi, Hervé Pauchon, Jean Abeillé, Jean-Claude Romer, François
Toumarkine. Laurent Malet, muni d'une minerve, et Claude Brosset,
dans un rôle d'ultra, viennent compléter le tableau des supporters.
Au premier, le rôle de celui qui veut calmer le jeu, au second celui
qui jette de l'huile sur le feu.
Dans
leur course-poursuite, les personnages changent régulièrement de
décors. Une pizzeria, les locaux de FR3, une galerie commerciale, un
immeuble et enfin une usine. Rico mène la danse et dans ce
personnage vulgaire, violent, misanthrope, misogyne, salace,
scabreux, Michel Serrault campe l'un des rôles les plus abjects du
cinéma de Mocky, qui en compte beaucoup. Il est aussi d'une grande
lâcheté.
Cette
lâcheté, il l’exerce dans le centre commercial. Munis d'une
trompette, les supporters recherchent Maurice. Ils s'infiltrent dans
tous les couloirs. Rico aperçoit une ombre et se munit d'une hache
de pompier. Il l'abat sur cette ombre qui se trouve être, non
Maurice, mais le conducteur du bus. Rico ne se démonte pas et va
accuser l'arbitre de ce crime et encourager les autres à le tuer,
comme mesure de rétorsion.
Le
choix des décors est l'une des choses primordiales dans A mort
l'arbitre ! Ils font passer le film vers le thriller et
Mocky vise Shining en faisant de ce grand ensemble d'immeubles
digne de l'ère stalinienne le cœur de l'angoisse. Un ascenseur
rouge sang, la main et la visage de Serrault derrière une porte qui
attaquent Carole Laure. Plus tard, le car poursuit la voiture dans un
labyrinthe, non pas de glace mais dans un tunnel creusé sous terre.
Succès
modeste à sa sortie, A mort l'arbitre ! est devenu assez
vite emblématique de ce qui existe de pire dans le sport. Avec les
titres des journaux ces jours-ci sur les holligans russes et anglais
qui « gâchent la fête », pour reprendre les termes des
journalistes, et bien, il faut bien voir que Mocky, las de ces
comportements dans son personnage de flic, visait juste et fort et
que pas grand chose n'a changé.
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