Ça
n'a jamais été un secret, l’œuvre de Jordan Peele, au moins dans
Get out et Us, est aussi inspirée de la série La
Quatrième dimension. Cela se voit encore mieux dans la courte série
diffusée sur youtube (6 épisodes de 26 minutes) Weird City créée
avec l'un de ses comparses Charlie Sanders (pas le joueur de football
américain), l'auteur de ses sketches pour Key & Peele. Weird
City est une ville dans un futur plutôt éloignée où deux
civilisations se cotoient sans vraiment se fréquenter. Below the
Line est une sorte de ghetto gris et Above the Line est une cité
futuriste colorée.
Above
the Line intéresse particulièrement Jordan Peele et Charlie
Sanders, il invente un univers où la liberté est totale mais où
tout est aseptisé, comme si cette partie de la ville était un
mélange de deux tendances actuelles des USA, une Amérique
« libérale » (la gauche progressiste) et une Amérique
puritaine (celle de Trump) qui annihilerait toute émotion,
jouissance et sensualité, comme si ce monde décrit devant nous
avait succombé aux algorithmes créées par un certain savant nommé
Negari (LeVar Burton).
Le
but de chaque épisode (tous se voient indépendamment les uns de
l'autre) est d'aborder une part d'absurde de cette société qui
ressemble exactement à la nôtre mais de manière accentuée. Le
meilleur épisode est le premier où un jeune homme (Dylan O'Brien –
de la série Teen Wolf) se voit attribuer par Negari son partenaire
de vie grâce à un programme informatique. Ce partenaire est un
homme bien plus âgé (Ed O'Neill – de la série Modern Family).
Bien que tous deux hétéros, ils doivent accepter de vivre en
couple, justement parce que l'ordinateur le dit.
Il
y a dans cette idée de donner raison aux programmes informatiques,
aux algorithmes, aux choix faits par ordinateurs une référence
directe aux propositions que donnent Netflix ou Youtube qui veulent
deviner vos goûts et ne proposent rapidement rien d'autres que des
variations de ce que vous venez de voir. Or les deux hommes finissent
par se plaire, par s'aimer et vivre ensemble. Jusqu'à ce que le Dr.
Negari déclare qu'une erreur informatique s'est produite et qu'il
est impossible qu'ils se plaisent et s'aiment et puissent vivre
ensemble. Puisque l'ordinateur le dit.
Les
autres épisodes parlent de l'addiction au sport (avec Michael Cera),
du sexe par application (bonjour Tinder), d'une maison qui vit et qui
martyrise le couple qui vit en son sein (avec Laverne Cox et Mark
Hamill qui fait la voix de la maison), d'un enfant qu'il faut
absolument adopter (Below the Line est filmé tout simplement dans un
quartier de Los Angeles, sans aucun effet spécial – l'épisode le
plus drôle mais aussi le plus terrifiant parce qu'on est dans la
critique de l'Evangélisme – la religion) et enfin un épisode en
mise en abyme bien foutu.
Si
chaque épisode est indépendant, la force de Weird City est son
homogénéité. Moins dans l'aspect visuel de la ville que dans les
détails, l'orteil nu au milieu de la pantoufle en est le parfait
exemple. Les tenues des personnages sont à la fois futuristes et
ridicules, leurs prénoms sont légèrement modifiés comme une
dégénérescence inéluctable (l'un des épisodes est titré
« Chonathan & Mulia & Barsley & Phephanie »).
Le casting est souvent issu de la télé avec une volonté de mélange
des genres qui honorent les créateurs. J'attends avec impatience la
saison 2 (si l'algorithme de mon ordinateur le permet).
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