Candy
Mountain est l'histoire d'un mec en colère. Et comment il va
être forcé d'apprendre le calme. Ce mec est musicien mais il faut
bien gagner sa vie alors Julius (Kevin J. O'Connor) fait l'ouvrier
dans un appartement de Manhattan, il est censé faire l'électricité
pour un couple de propriétaires bien bourgeois. Il préfère
observer les gratte-ciels et flâner. Il se fait immédiatement virer
par le contremaître et le voilà à traverser New York, sans savoir
qu'il va se lancer dans un voyage à travers le continent.
Les
dents de traviole, la moquerie au bout de l'index et l'arrogance du
jeune gars qui pense tout savoir à 25 ans, Julius provoque le destin
dans un studio d'enregistrement où Keith (David Johansen, des New York Dolls) répète un morceau de rock (forcément).
On en trouvera pas mal des vrais rockeurs dans Candy Moutain,
Joe Strummer portant casquette, Tom Waits portant un peignoir coloré
et jouant du piano. Et peut-être d'autres que je ne connais pas que
Julius rencontre au long de son périple.
Le
voyage a un but : trouver Emore Silk. Joli nom plein de douceur
(silk veut dire soie) mais personnage a priori rugueux d'après
Keith, son avocat et son manager. Elmore Silk fabrique des guitares,
il en est le Stradivarius d'Amérique du nord. Mais il a disparu
depuis des lustres. Pour se refaire financièrement, pour se faire
mousser et par pure morgue, il propose de retrouver Elmore Silk. Il
part immédiatement avec sa copine en banlieue de New York retrouver
le Silk avant de se faire larguer comme une merde à une station
service.
Cette
unique fiction du duo du photographe Robert Frank et de l'écrivain
Rudy Wurlitzer cherche dans la mesure du possible de ne pas tourner
un road movie traditionnel américain. Cela passe par une absence de
dramaturgie du début à la fin. Il n'est pas important de créer du
suspense pour savoir si Julius va rencontrer cet olibrius d'Elmore
Silk. D'autant que le portrait que chacun fait de lui, de son frère
businessman (Tom Waits), à sa fille et son gendre n'est pas des plus
flatteurs. Il se produit un petit effet comique dans la description
monstrueuse d'Elmore.
Autre
effet relativement amusant, la guigne de Julius à chaque étape.
Après s'être fait largué, il fait du stop, achète la voiture de
Tom Waits mais il doit chaque fois troquer son nouveau véhicule pour
un autre plus pourri et capricieux. L'ambition est simple, faire
changer ce personnage, le faire évoluer de l'arrogance à la
sympathie. Tout n'est pas fait dans la finesse mais certaines
rencontres sont incongrues : les deux hommes de loi croisée de
Nouvelle Ecosse sont par exemple de sacrés farceurs.
Plus
il monte vers le nord, de New York jusqu'à la pointe de la Nouvelle
Ecosse, plus le désert est palpable. Un désert de neige, sans
arbre, sans habitant ou presque. Ce jeu de piste change donc Julius
et Cornelia (Bulle Ogier) n'est sans doute pas pour rien dans ce
changement, elle l'ancienne maîtresse d'Elmore couche avec Julius.
Elmore (Harris Yulin) n'est pas le monstre décrit mais un doux
dingue qui veut vivre loin de l'agitation de la vie. Alors se dégage
une atmosphère apaisée et enfin Julius commence à devenir
sympathique.
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