dimanche 31 mars 2019

J'ai aussi regardé ces films en mars


L'Homme qui a surpris tout le monde (Natalia Merkulova & Alexeï Tchoupov, 2018)
Egor (Evgueni Tsyganov), cet homme qui a surpris tout le monde pourrait être un voisin des Bragino, ces russes exilés dans leur propre nation et qui fuient le monde. Les premières minutes rappellent le film de Clément Cogitore y compris dans sa dimension surnaturelle, ici les deux cinéastes s'appuient sur la musique composée de sons de langue frappée. Egor est donc un rude russe qu'il faut pas faire chier, un garde champêtre qui garde bien sa forêt et va jusqu'à abattre deux braconniers. Or, il s'est fait tirer dessus. A l'hôpital, on lui décèle une tumeur fulgurante, il lui reste deux mois à vivre. Egor vit dans sa maison avec sa femme, son fils et son beau-père peu commode voire franchement odieux. La médecine des hommes ne peut rien pour le soigner, il va donc vers le chamanisme, vers ce surnaturel annoncé au début, il rencontre une femme qui va tenter de soigner son mal. Séquence de transition, tout en rouge couleur nationale russe, un massage où l'on devine qu'elle le transforme, une chanson que la vieille femme édentée entonne après avoir avalé une bonne rasade de vodka. Une chanson sur un canard qui se fait passer pour une cane. La deuxième moitié du film applique ce conte avec une visée politique évidente, une critique de la loi scélérate de Poutine qui punit la « propagande de l'homosexualité », avec une idée de mise en scène simple, Egor une fois sa transformation en femme achevée ne dira plus un seul mot et une idée politique, lui seul se remémore ces contes d'antan, les autres villageois qui le conspuent sont des pantins manipulables, sans histoire, sans souvenir, des brutes stupides. C'est cette absence de mémoire qui fait sombrer dans l'obscurantisme, en ce sens L'Homme qui a surpris tout le monde n'est pas éloigné de la force métaphorique de Leto.

Mon meilleur ami (Martin Deus, 2018)
Il existe deux sortes de premier film, ceux dans lequel le ou la jeune cinéaste met tout dedans, se défonce totalement (par exemple Diamantino ou Les Garçons sauvages) où l'esthétique prime et ceux, comme Mon meilleur ami, bien sous tout rapport mais vaguement insipide. Non pas que Mon meilleur ami soit mauvais, au contraire, il prend à cœur de parler d'un sujet important, l'arrivée dans l'âge adulte d'un adolescent dont on devine qu'il a des sentiments amoureux pour le garçon que ses parents hébergent, même s'il nie ces sentiments. On devine aussi que le jeune cinéaste a transposé ses propres souvenirs dans ce récit mais tout semble si édulcoré, tout le monde est si gentil, comme un lissage uniforme, c'est très reposant et très oubliable. Il n'est pas certain que son deuxième sorte un jour dans nos salles.

Alien crystal palace (Arielle Dombasle, 2018)
Jean-Pierre Léaud joue dans le nouveau film d'Arielle Dombasle, coiffé d'une parure aux symboles royaux égyptiens, il incarne le Dieu Horus entouré de deux femmes à la poitrine dénudé. Jean-Pierre Léaud ne se refuse rien et il a bien raison de s'amuser ainsi quelques mois après avoir fait la voix d'un chien hurlant dans L'Ile aux chiens de Wes Anderson (je rappelle que la version française de ce film est très largement supérieure à la version américaine). Passé l'étonnement et la joie de voir quelques minutes l'acteur, on tente de s'accrocher au récit particulièrement délirant du film (bien moins facile que Opium le précédent film d'Arielle Dombasle sur les amours de Jean Cocoteau dans sa jeunesse). L'actrice réalisatrice apparaît dans des visions remplies d'éclair et déclare à Nicolas Ker (en anglais) « Viens dans l'Astral, viens dans la vraie vie ». Le tout est suivi de quelques scènes de saphisme car le film aime filmer la nudité et Dombasle ne se prive pas. Tout est prétexte à montrer des corps qui s'enlacent, des torses nus bras ballants tels des statues antiques. Il est sujet d'un film en court de tournage, d'une enquête policière où le commissaire ressemble à un membre de Gestapo entouré qu'il est de flics en cuir, martinet à la ceinture. Le film est follement incompréhensible, parfois outrancier, délibérément toc mais tout est raconté sur un rythme échevelé. Bref, avec Arielle Dombasle, on ne s'ennuie jamais.

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