J'imagine
que ce qui intéresse le cinéaste portugais dans le choix de Paul
Hamy pour le personnage de Fernando est ce mélange de rudesse et de
douceur, un physique pas si éloigné de celui de Jason Statham,
gueule carrée et pilosité importante mais rassurante, comme un
gentil nounours que l'on aurait envie de caresser. João Pedro
Rodrigues le filme au début de son film en train de nager, dans un
format cinémascope, traversant la rivière de laquelle il observe
les oiseaux, histoire de coller au titre du film.
Puis
Fernando sort de l'eau, en slip, prépare un café et observe les
beaux oiseaux qui nichent et vivent et se reproduisent sur les
falaises au bord du fleuve Douro. Dans ces dix premières minutes,
trois variétés de plan se succèdent. Fernando observe les oiseaux
et l'écran prend la forme des jumelles, les oiseaux scrutent
Fernando dans un cadre flou et des plans plus neutres de
l'ornithologue qui voyage sur son kayak. Les notions sur les oiseaux
sont d'une banalité affligeante (niveau page wikipédia), on entend
le jeune homme constater que les oiseaux pondent.
Fernando
travaille seul, mais son petit ami Sergio lui téléphone chaque
jour. Et lui rappelle surtout de bien prendre ses médicaments. Si le
début de L'Ornithologue est mis en scène avec un certain
réalisme, d'ailleurs extrêmement lumineux, ce qui est une première
pour João Pedro Rodrigues il faut bien le reconnaître, il va vite
aller dans une autre direction. D'abord un fil d'allégorie de plus
en plus complexes puis vers la nuit singulière et proche du
fantastique. Quant à Fernando, il ne va jamais cesser de rencontrer
d'autres personnages au bord de son périple. Tout commence après un
accident de kayak.
Chaque
nouvelle rencontre se produit sous le signe d'un animal. Il est sauvé
par deux Chinoises appelées Fei et Lin, deux « félines »
qui vont chasser ce petit oiseau de Fernando en le ligotant. Puis,
dans la nuit, il croise des fêtards du coin qui s'amusent à
éventrer un sanglier. Plus tard, il rencontre un berger qui garde
des chèvres (il boit du lait au pis) et des moutons. Enfin, trois
amazones qui montent à cheval viennent lui parler. Pour finir, dans
la forêt, des animaux de la savane, empaillés (une girafe, un
tigre) sont éparpillés. Sans oublier un hibou au regard
inquisiteur.
Chaque
rencontre est l'amorce de nouvelles expériences sexuelles (par si
nouvelles que ça depuis O Fantasma). Le bondage SM avec les
deux Chinoises (gros plan sur sa bite en érection sous son slip), un
peu d'orgasme sous un jet de pisse avec les fêtards nocturnes, des
bisous et des caresses en bord de rivière avec le petit berger peu
farouche. Il se refusera uniquement aux amazones qui chevauchent
poitrine nue leurs montures et s'en iront après lui avoir révélé
sa vraie personnalité. Le cinéaste jouera le double de Paul Hamy
dans les champs-contre-champs.
Le
film élabore un sur-texte religieux (l'inverse du sous-texte)
franchement envahissant et souvent naïf. Les Chinoises font le
pèlerinage de Saint-Jacques de Compostelle, les fêtards pratiquent
des rites satanistes, le berger s'appelle Jésus et Fernando finit au
milieu d'une collection de statues de saints et de la vierge aux
membres brisés. C'est tout à la fois des touches de Pasolini
versant Des oiseaux petits et grands (bien évidemment) que de
Buñuel période La Voie lactée :
Antonio, le double de Fernando part avec Jésus, main dans la
main.
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