Au
beau milieu du film, nos héros Bugs Bunny et Daffy Duck se
retrouvent au Louvre devant la Joconde. Ils sont poursuivis par Porky
Pig qui s'est mis en tête de les chasser au fusil. Le lapin et le
canard s'enfuient dans les couloirs du musée avant de décider de se
cacher dans les toiles de maîtres. Face aux montres molles de Dali
ils s'engluent, dans le Cri de Munch ils hurlent, ils dansent dans
une toile de Toulouse Lautrec avant de devenir des pointillés chez
Seurat et de souffler sur le cochonnet qui disparaît de l'image.
Le
projet du film est de plier notre monde sur celui des héros de
Warner Bros, et non l'inverse. Contrairement à Qui veut la peau
de Roger Rabbit de Robert Zemeckis, dans le film de Joe Dante, ce
ne sont pas deux univers qui se confrontent. Le monde des toons
applique ses lois au monde des humains devenu un monde parallèle, un
monde où les frontières de notre réalité sont abolies comme le
montre parfaitement la scène du musée du Louvre qui se poursuit
dans un Paris de carte postale sans que cela ne soit un cliché, un
Paris de pacotille où la Tour Eiffel se trouve devant Le Louvre.
Cette
séquence de Les Looney tunes passent à l'action est la plus
réussie du film de Joe Dante. Elle évoque la scène du musée dans
La Folle journée de Ferris Bueller, d'ailleurs on peut voir
des écolières à la queue-leu-leu, comme on en voyait dans le film
de John Hughes, comme un léger et vibrant hommage. Mais dès que
Bugs Bunny et Daffy Duck sortent du Louvre, ils retrouvent les
humains qui les accompagnent, DJ Drake (Brendan Fraser) et Kate
Houghton (Jenna Elfman), deux employés du studio Warner Bros.
Avant
d'arriver à Paris où les affiches des films de Jerry Lewis (le
comique préféré des Français selon Hollywood qui ne s'en est pas
encore remis) sont sur les murs de la Tour Eiffel (on repère celle
de Ya ya mon général – rebaptisé Où trouvez-vous la
guerre puis celle de Smörgåsbord, son
dernier film), les quatre personnages se rencontrent à Hollywood.
Kate est productrice dans la branche comédie de Warner Bros, mais
elle rêve de faire des films plus sérieux, a décidé de virer
Daffy Duck, qu'elle juge trop vieux.
Dans
cette réunion, elle est la seule femme. Les frères Warner sont
symbolisés comme deux jumeaux rétrogrades (leurs téléphones
datent des années 1950) et les cadres sont tous en costumes gris.
Face à eux, le méchant du film est le patron d'Acme (Steve Martin)
et il s'appelle tout simplement Chairman et lui aussi a ses sbires,
désignés uniquement par leur fonction, ainsi Ron Perlman est le
Vice-Président « Never Learning ». Pour se plier au
cartoon, Steve Martin grimé et méconnaissable cabotine comme
jamais.
Le
récit repose sur un MacGuffin : un diamant vert qui transforme
les hommes en singes est recherché à la fois par le père de Drake
(Timothy Dalton), acteur de films d'espionnage (logique depuis ses
James Bond) et par Chairman. Kate et DJ partent à la recherche du
père, d'abord à Las Vegas, puis dans le désert du Nevada, ensuite
en France, en Afrique et dans l'espace. Et par un concours de
circonstances, Bugs Bunny et Daffy Duck sont de ces voyages sans que
jamais on ne se pose la question du transport car on est vraiment
dans l'univers du cartoon.
Les
personnages de dessin animé vivent leur propre vie. Daffy Duck ne
parle que de pognon pendant tout le film, il ne cherche rien d'autre
qu'à se faire rembaucher par les Warner. Bugs Bunny a besoin de son
soufre-douleur favori et tandis qu'il croque sa carotte quelque soit
l'endroit où il se trouve, il observe sans sourciller son ami le
canard se faire démembrer, perdre son bec, exploser, se faire
désintégrer, se faire humilier par tous les autres personnages des
Looney Tunes, il va l'aider mollement à retrouver son poste à
Hollywood.
Ce
qui frappe dans Les Looney Tunes passent à l'action,
c'est que les personnages semblent tous atteint de folie sinon de
méchanceté. Sam le pirate, patron d'un casino à Las Vegas, les
extra-terrestres des films de série B des années 1950, le diable de
Tasmanie, le Coyote, Titi et Gros Minet ou Peter Lorre venu faire
coucou par la magie du dessin animé. Cette folie gaguesque des
Looney Tunes a contaminé tous les humains dont ces pauvres DJ et
Kate, premiers spectateurs des facéties des toons, premières
victimes également.
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