Dans
mon texte sur Dracula j'écrivais que les années 1980 étaient
pauvres en vampire, mais j'avais oublié Vampire vous avez dit
vampire pour la bonne et simple raison que je n'avais vu ce film.
Voilà un trou dans ma culture désormais comblé. J'ai vraiment
trouvé le film formidable et il commence sur les chapeaux de roue
avec une caméra qui se glisse dans entre les maisons d'un
lotissement typiquement américain. Il fait nuit et on entend deux
voix, un homme qui menace une certaine Nina, on pense évidemment
qu'on va découvrir dans la maison vers laquelle on se dirige ce
couple.
C'est
un film que deux adolescents regardent. Charley Brewtser (William
Ragsadle) et Amy Peterson (Amanda Bearse) sont dans la chambre en
train de se peloter et dans la télé passe un film interrompu par le
présentateur, un certain Peter Vincent (Roddy McDowall) qui anime
l'émission horrifique Fright Night. Tout commence comme dans
un teen movie mais quelque chose se dérègle vite, Amy bondit hors
du lit quand les mains de Charley commencent à se glisser sous son
pull. Puis elle quitte la chambre et la maison au grand dam du jeune
homme qui se retrouve seul avec sa télé.
Le
film se lance sur les chapeaux de roue, c'est agréable de voir un
rythme comme ça avec l'arrivée d'un voisin et Charley qui croit dur
comme fer qu'il est un vampire. Il voit d'ailleurs un cercueil être
placé dans la cave de la maison adjacente. Pourtant les premières
minutes expliquent que tout est dans le régime du faux : la
voix off, le présentateur télé, les films de vampire. Charley
devrait croire que le voisin n'est pas un vampire, car c'est
d'habitude que des personnages de conte, de fiction, de film, mais il
a vu ce qu'il a vu et va chercher à convaincre tout le monde de ce
qu'il a vu.
La
grande force du film est de parvenir à laisser croire que ce que vit
le pauvre Charley quand il est attaqué assez vite par le voisin
vampire puisse être une scène réellement vécue comme une scène
totalement imaginée par l'esprit fécond du jeune homme. Un moment
d'hébétement se produit parce que l'attaque est directe et frontale
pour faire peur à Charley qui a vite fait les rapprochements entre
la prostituée vue la veille et l'annonce par la télé de son
meurtre. Ça se bouscule, dans les événements, dans l'analyse du
spectateur de tout ce qu'il voit.
Le
voisin est un homme charismatique. Jerry Dandrige (Chris Sarandon)
est filmé comme un mannequin de mode par Tom Holland dès qu'on le
découvre. Il vit avec Billy Cole (Jonathan Stark) sans qu'on sache
s'il n'est que son majordome ou son amant. Il faut admirer les tenues
de Jerry Dandrige, notamment sa longue veste. Et puis ce sourire
charmeur qu'il arbore quand il s'invite chez Charley. Sa mère lui
ouvre la porte. Charley sait pertinemment que c'est une chose à ne
pas faire. Un vampire ne rentre dans une maison que s'il est invité.
Repriser
les clichés les plus connus du vampire, là est aussi l'idée
majeure de Vampire vous avez dire vampire. L’ail, les miroirs, les
crucifix. La fidélité aux origines est primordiale avec
l'attraction qu'exerce le voisin sur Amy, il l’envoûte. Charley,
dans sa courte visite chez Dandrige, a remarqué un tableau encore
dans son emballage. Ce portrait d'une jeune femme ressemble au visage
d'Amy, comme une résurrection d'une maîtresse décédée du
vampire. Il va s'employer à la faire revenir, à la transformer en
vampire. Elle est littéralement vampirisée.
Sexy
en diable, Dandrige a besoin de larbins à ses côtés. Il prend dans
ses griffes, avec une évidente pulsion sexuelle, l'ami étrange de
Charley et Amy, Edward (Stephen Geoffreys), surnommé Evil Ed. Il est
qualifié de « différent » par Amy. Ce qu'on remarque
est que Edward est un peu bête, il parle beaucoup et c'est un
vantard. L'une des idées du film est de montrer les transformations
en vampire (un peu comme le faisait John Landis avec Le Loup garou
de Londres). D'homme à vampire et inversement, avec une tendance
pour le monstrueux.
La
sensualité qui se dégage entre Amy et Dandrige constitue le ciment
de la jalousie de Charley, son moteur pour détruire les vampires
avec l'aide de Peter Vincent, qui finit par croire à l'histoire du
jeune homme. Il se produit un glissement qui part des clichés et des
rituels du film de vampire pour aller vers une croyance du cinéma
horrifique, à la fois naïve et assumée. Tom Holland n'agit pas en
poseur plus malin que son spectateur et ses personnages, là est la
générosité de son récit. Le film est tout à fait dans les années
1980 (la décennie des tueurs masqués) mais s'en détache par son
honnêteté et sa maturité.
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