samedi 14 décembre 2019

Vampire... vous avez dit vampire (Tom Holland, 1985)

Dans mon texte sur Dracula j'écrivais que les années 1980 étaient pauvres en vampire, mais j'avais oublié Vampire vous avez dit vampire pour la bonne et simple raison que je n'avais vu ce film. Voilà un trou dans ma culture désormais comblé. J'ai vraiment trouvé le film formidable et il commence sur les chapeaux de roue avec une caméra qui se glisse dans entre les maisons d'un lotissement typiquement américain. Il fait nuit et on entend deux voix, un homme qui menace une certaine Nina, on pense évidemment qu'on va découvrir dans la maison vers laquelle on se dirige ce couple.

C'est un film que deux adolescents regardent. Charley Brewtser (William Ragsadle) et Amy Peterson (Amanda Bearse) sont dans la chambre en train de se peloter et dans la télé passe un film interrompu par le présentateur, un certain Peter Vincent (Roddy McDowall) qui anime l'émission horrifique Fright Night. Tout commence comme dans un teen movie mais quelque chose se dérègle vite, Amy bondit hors du lit quand les mains de Charley commencent à se glisser sous son pull. Puis elle quitte la chambre et la maison au grand dam du jeune homme qui se retrouve seul avec sa télé.

Le film se lance sur les chapeaux de roue, c'est agréable de voir un rythme comme ça avec l'arrivée d'un voisin et Charley qui croit dur comme fer qu'il est un vampire. Il voit d'ailleurs un cercueil être placé dans la cave de la maison adjacente. Pourtant les premières minutes expliquent que tout est dans le régime du faux : la voix off, le présentateur télé, les films de vampire. Charley devrait croire que le voisin n'est pas un vampire, car c'est d'habitude que des personnages de conte, de fiction, de film, mais il a vu ce qu'il a vu et va chercher à convaincre tout le monde de ce qu'il a vu.

La grande force du film est de parvenir à laisser croire que ce que vit le pauvre Charley quand il est attaqué assez vite par le voisin vampire puisse être une scène réellement vécue comme une scène totalement imaginée par l'esprit fécond du jeune homme. Un moment d'hébétement se produit parce que l'attaque est directe et frontale pour faire peur à Charley qui a vite fait les rapprochements entre la prostituée vue la veille et l'annonce par la télé de son meurtre. Ça se bouscule, dans les événements, dans l'analyse du spectateur de tout ce qu'il voit.

Le voisin est un homme charismatique. Jerry Dandrige (Chris Sarandon) est filmé comme un mannequin de mode par Tom Holland dès qu'on le découvre. Il vit avec Billy Cole (Jonathan Stark) sans qu'on sache s'il n'est que son majordome ou son amant. Il faut admirer les tenues de Jerry Dandrige, notamment sa longue veste. Et puis ce sourire charmeur qu'il arbore quand il s'invite chez Charley. Sa mère lui ouvre la porte. Charley sait pertinemment que c'est une chose à ne pas faire. Un vampire ne rentre dans une maison que s'il est invité.

Repriser les clichés les plus connus du vampire, là est aussi l'idée majeure de Vampire vous avez dire vampire. L’ail, les miroirs, les crucifix. La fidélité aux origines est primordiale avec l'attraction qu'exerce le voisin sur Amy, il l’envoûte. Charley, dans sa courte visite chez Dandrige, a remarqué un tableau encore dans son emballage. Ce portrait d'une jeune femme ressemble au visage d'Amy, comme une résurrection d'une maîtresse décédée du vampire. Il va s'employer à la faire revenir, à la transformer en vampire. Elle est littéralement vampirisée.

Sexy en diable, Dandrige a besoin de larbins à ses côtés. Il prend dans ses griffes, avec une évidente pulsion sexuelle, l'ami étrange de Charley et Amy, Edward (Stephen Geoffreys), surnommé Evil Ed. Il est qualifié de « différent » par Amy. Ce qu'on remarque est que Edward est un peu bête, il parle beaucoup et c'est un vantard. L'une des idées du film est de montrer les transformations en vampire (un peu comme le faisait John Landis avec Le Loup garou de Londres). D'homme à vampire et inversement, avec une tendance pour le monstrueux.


La sensualité qui se dégage entre Amy et Dandrige constitue le ciment de la jalousie de Charley, son moteur pour détruire les vampires avec l'aide de Peter Vincent, qui finit par croire à l'histoire du jeune homme. Il se produit un glissement qui part des clichés et des rituels du film de vampire pour aller vers une croyance du cinéma horrifique, à la fois naïve et assumée. Tom Holland n'agit pas en poseur plus malin que son spectateur et ses personnages, là est la générosité de son récit. Le film est tout à fait dans les années 1980 (la décennie des tueurs masqués) mais s'en détache par son honnêteté et sa maturité.



























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