lundi 12 août 2019

Six films Keystone avec Charlie Chaplin (Mack Sennett, 1914)


En février et mars 1914, Charles Chaplin joue dans six films, entre les deux muets de Mabel Normand. Il n'est encore qu'un simple acteur dans la Keystone de Mack Sennett, avant qu'il n'ait le droit de réaliser et écrire lui-même ses gags et qu'il puisse développer son personnage du « vagabond », il faut prouver qu'il peut faire rire. Le premier de ses films A thief catcher a longtemps été considéré comme perdu. Il sert de faire valoir à Ford Sterling, star comique de l'époque aujourd'hui totalement oublié et pour cause, son splastick se résume à un florilège de grimaces faciales, de petits sauts et d'adresses au public sur ce qui lui arrive.

Dans A thief catcher, Charlot est un Keystone Kop, l'un de ses flics burlesques qui peuplaient les films de Mack Sennett. C'est d'autant plus amusant de le voir en policeman que dans tous ses films où il incarne le vagabond, où il est pauvre, il se fait sans cesse réprimander par les policiers, il se fait poursuivre par eux. Pour Chaplin, il s'agit surtout de montrer l'injustice en donnant ces caractéristiques aux policemen mais tant qu'il n'avait pas le contrôle, le policier est du côté du bien, Sterling joue le shérif. Dans le deuxième film, Bertween showers (Charlot et le parapluie), le policier n'abuse pas de la force mais cherche cependant à rendre justice pour un vol de parapluie. Le film est tourné entièrement dans un jardin public de Los Angeles.

Plateau de cinéma ou décors naturels, acteurs ou observateurs, l'un des agréments de A film Johnnie (Charlot fait du cinéma) est cette confusion qu'entretient le film. Il se place à la fois dans une salle de cinéma où Charlot dérange tous les spectateurs, aux studios Keystone où il croise les vedettes de Mack Sennett (Roscoe Fatty Arbuckle, Ford Sterling) qui vont au travail comme s'ils allaient à l'usine, il regarde les artistes comiques et rie immédiatement quand bien même, ils ne donnent pas de gags. Leur simple apparition est source de comique. Mais tous travaillent pour faire un film et faire du comique est un travail compliqué surtout quand un cuistre comme ce personnage qu'incarne à fond Chaplin vient perturber tout ce beau monde et qu'il drague l'actrice vedette.

Dans ces deux films, il peaufine une personnage qu'il veut incarner mais sans la tendresse, ces Charlot-là sont méchants, colériques et inconséquents. En revanche, on voit ces gestes qu'on admirera plus tard, la main sur la bouche quand il rit, ses arrêts la jambe en l'air quand il prend un virage en courant et la démarche en canard. Le vagabond n'existe pas encore mais l'ivrogne est présent dans Tango tangles (Charlot danseur) où il apparaît sans moustache et en costume luxueux (face à Sterling) puis dans His favorite pastime (Charlot est trop galant) en costume complet du vagabond mais sans ses apparats (face à Fatty). Dans ce film, on décèle des black faces de comédiens blancs jouant des domestiques noirs, dans un comique contestable.


Ce qu'on remarque dans chacun des films et aussi dans les deux suivants Cruel cruel love (Charlot marquis) qui va inspirer Charlot et le comte puis The Star boarder (Charlot aime la patronne) est une chose simple qui va frapper le spectateur : dès que Charlie Chaplin est seul à l'image, sans la présence de ses partenaires, il est meilleur que tout le monde, on n'a pas envie de revoir les autres comédiens mais de rester avec Chaplin. Par exemple ces gags avec une porte récalcitrante qui ne cesse de lui rentrer dans la figure dans His favorite pastime, ou ce visage terriblement effrayant dans Cruel cruel love presque une transformation de Jekyll en Hyde (le reste du court-métrage est très médiocre). Les films, pas terribles, valent pour ces quelques minutes de liberté artistique de Charlot.






































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