René-Guy,
c'était le nom du personnage de Michel Aumont dans Palais royal.
En apprenant la mort de l'acteur ce soir, j'ai immédiatement pensé
au film de Valérie Lemercier et à ce conseiller de la Reine Eugénia
que joue Catherine Deneuve avec un aplomb et un sarcasme sans faille,
l'un des personnages les plus drôles de l'actrice qui s'amuse à
faire de la calligraphie pour se détendre de son stress de reine.
Michel
Aumont n'est qu'un personnage secondaire dans Palais royal
mais il est au centre de cette famille. Il arbore un calme constant
en toute logique puisqu'il est le chef du protocole et l'acteur sait
parfaitement avec quelques simples mouvements du visage incarner tout
le poids de cette monarchie inventée pour le film, plus vraie que
nature qui rappelle les déboires de Diana avec sa belle-mère.
René-Guy
a un petit tic quand le protocole s'enraie. Il passe son annulaire
sur son sourcil gauche, c'est un moyen pour ne pas montré son
énervement devant les avanies subies au palais royal. Il fait partie
de ces acteurs venus dans les années 1970 qui incarnaient une idée
de la bourgeoisie coincée, du pouvoir en place, des gens
inamovibles, des types un peu lâches, bref la France de Pompidou
dans toute sa splendeur.
Valérie
Lermercier le prend ainsi, il est moins cassant et plus rond que
Jean-François Balmer, plus vif que Bruno Crémer et surtout il a un
visage sympathique mais peut faire des choses horribles, comme dans
Le Jouet de Pierre Richard vendre son employé à un enfant
comme jouet, je me rappelle aussi son rôle de cuisinier dans Au
petit Marguery, un film très oublié mais qui avait un peu marqué
son temps.
René-Guy
et Eugénia complotent pour leur royaume de pacotille. L'un des plus
beaux ressorts narratifs est l'adultère qu'ils ont toujours
entretenu entre eux. Ils vont tout faire pour déshériter Alban
(Michel Vuillermoz) le fils aîné quand Eugénia se retrouve veuve
pour le fils cadet Arnaud (Lambert Wilson), fils de l'amour comme le
dit avec mépris Armelle (Valérie Lemercier) l'épouse d'Arnaud.
Pas
de quiproquos ni de porte qui claque, Valérie Lemercier avait déjà
fait ça dans Quadrille son remake de Sacha Guitry. Pour
Palais royal, elle multiplie les complots, les coups bas et
tordus, les mensonges et les tromperies. Elle rend la monnaie de leur
pièce à cette affreuse famille qui lui pourrit la vie, le tout en
trois actes. 15 ans après, c'est encore fort divertissant, souvent
marrant, plein de gags qui font mouche.
Dans
le premier acte, elle est constamment rabaissée, humilié, elle est
une potiche dont se moquent ses amis (Denis Podalydès et Mathilde
Seigner). En voyage à l'étranger, en Inde, elle fait des faux pas
(embrasser tout le monde), en visite dans une maison de retraite,
elle se fait entartée par Noël Godin qui visait le ministre que
jouait Franck de la Personne. L'actrice excelle dans ce rôle de
godiche.
Dans
le deuxième acte, l'heure de la vengeance mesquine sonne. Le gag
filé du slip est le meilleur exemple de l'amplitude de son comique,
comme le banquet en honneur de l'empereur du Japon qui boit le
rince-doigt. Pour humilier Eugénia et les autres, elle va dans le
sens des Japonais et trinque avec eux, obligeant à boire elle aussi
le rince-doigt. « C'est rafraîchissant » clame la reine
mère (Gisèle Casadesus).
Thèse,
antithèse, synthèse, le dernier acte est celui des règlements de
compte. Le jeu de Valérie Lemercier, puisque c'est elle la vedette
tout de même, s'est transformé. Rarement, elle n'aura joué une
telle peste, dépassant les horreurs qu'on lui a fait subir. Elle
aime créer ce malaise irrémédiable et enfiler le mauvais rôle,
jouer l'hypocrite joyeuse comme on dit veuve joyeuse. Elle a fait là
son meilleur film à ce jour.
1 commentaire:
Là, tout de suite, Aumont dans mes souvenirs de spectateur,
c'est Au Petit Marguery, bien sûr, tout en bonomie et
chaleur humaine, et dans Coup de tête le vendeur de meubles,
couard, transpirant d'hypocrisie, vidant son magasin avec
sa femme avant l'arrivée de Dewaere.
Un second couteau marquant, à la palette assez large,
qu'on a toujours plaisir à retrouver au générique d'un film.
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