jeudi 29 août 2019

Palais royal (Valérie Lemercier, 2005)

René-Guy, c'était le nom du personnage de Michel Aumont dans Palais royal. En apprenant la mort de l'acteur ce soir, j'ai immédiatement pensé au film de Valérie Lemercier et à ce conseiller de la Reine Eugénia que joue Catherine Deneuve avec un aplomb et un sarcasme sans faille, l'un des personnages les plus drôles de l'actrice qui s'amuse à faire de la calligraphie pour se détendre de son stress de reine.

Michel Aumont n'est qu'un personnage secondaire dans Palais royal mais il est au centre de cette famille. Il arbore un calme constant en toute logique puisqu'il est le chef du protocole et l'acteur sait parfaitement avec quelques simples mouvements du visage incarner tout le poids de cette monarchie inventée pour le film, plus vraie que nature qui rappelle les déboires de Diana avec sa belle-mère.

René-Guy a un petit tic quand le protocole s'enraie. Il passe son annulaire sur son sourcil gauche, c'est un moyen pour ne pas montré son énervement devant les avanies subies au palais royal. Il fait partie de ces acteurs venus dans les années 1970 qui incarnaient une idée de la bourgeoisie coincée, du pouvoir en place, des gens inamovibles, des types un peu lâches, bref la France de Pompidou dans toute sa splendeur.

Valérie Lermercier le prend ainsi, il est moins cassant et plus rond que Jean-François Balmer, plus vif que Bruno Crémer et surtout il a un visage sympathique mais peut faire des choses horribles, comme dans Le Jouet de Pierre Richard vendre son employé à un enfant comme jouet, je me rappelle aussi son rôle de cuisinier dans Au petit Marguery, un film très oublié mais qui avait un peu marqué son temps.

René-Guy et Eugénia complotent pour leur royaume de pacotille. L'un des plus beaux ressorts narratifs est l'adultère qu'ils ont toujours entretenu entre eux. Ils vont tout faire pour déshériter Alban (Michel Vuillermoz) le fils aîné quand Eugénia se retrouve veuve pour le fils cadet Arnaud (Lambert Wilson), fils de l'amour comme le dit avec mépris Armelle (Valérie Lemercier) l'épouse d'Arnaud.

Pas de quiproquos ni de porte qui claque, Valérie Lemercier avait déjà fait ça dans Quadrille son remake de Sacha Guitry. Pour Palais royal, elle multiplie les complots, les coups bas et tordus, les mensonges et les tromperies. Elle rend la monnaie de leur pièce à cette affreuse famille qui lui pourrit la vie, le tout en trois actes. 15 ans après, c'est encore fort divertissant, souvent marrant, plein de gags qui font mouche.

Dans le premier acte, elle est constamment rabaissée, humilié, elle est une potiche dont se moquent ses amis (Denis Podalydès et Mathilde Seigner). En voyage à l'étranger, en Inde, elle fait des faux pas (embrasser tout le monde), en visite dans une maison de retraite, elle se fait entartée par Noël Godin qui visait le ministre que jouait Franck de la Personne. L'actrice excelle dans ce rôle de godiche.

Dans le deuxième acte, l'heure de la vengeance mesquine sonne. Le gag filé du slip est le meilleur exemple de l'amplitude de son comique, comme le banquet en honneur de l'empereur du Japon qui boit le rince-doigt. Pour humilier Eugénia et les autres, elle va dans le sens des Japonais et trinque avec eux, obligeant à boire elle aussi le rince-doigt. « C'est rafraîchissant » clame la reine mère (Gisèle Casadesus).


Thèse, antithèse, synthèse, le dernier acte est celui des règlements de compte. Le jeu de Valérie Lemercier, puisque c'est elle la vedette tout de même, s'est transformé. Rarement, elle n'aura joué une telle peste, dépassant les horreurs qu'on lui a fait subir. Elle aime créer ce malaise irrémédiable et enfiler le mauvais rôle, jouer l'hypocrite joyeuse comme on dit veuve joyeuse. Elle a fait là son meilleur film à ce jour.



























1 commentaire:

Jacques Boudineau a dit…

Là, tout de suite, Aumont dans mes souvenirs de spectateur,
c'est Au Petit Marguery, bien sûr, tout en bonomie et
chaleur humaine, et dans Coup de tête le vendeur de meubles,
couard, transpirant d'hypocrisie, vidant son magasin avec
sa femme avant l'arrivée de Dewaere.
Un second couteau marquant, à la palette assez large,
qu'on a toujours plaisir à retrouver au générique d'un film.