lundi 19 août 2019

Perdrix (Erwan Le Duc, 2019)


Souvenons-nous Le Gendarme de Saint-Tropez, la faible trace narrative consistait pour Louis de Funès et ses collègues à traquer les nudistes qui envahissaient les plages de Saint-Tropez. Perdrix reprend cette idée et ce vocabulaire, des « nudistes révolutionnaires » occupent une forêt des Vosges (vocabulaire, on ne dit plus nudiste mais naturiste) et la gendarmerie locale est chargé d'une histoire de vol de voiture.

L'ouverture de Perdrix est en forme de coup de poing et rappelle les meilleurs débuts des meilleurs films de Bertrand Blier. Une voiture s'arrête sur une aire d'autoroute, sa conductrice Juliette Webb (Maud Wyler) fait une pause, s'assoit et commence à écrire sur son cahier. De la forêt sort une femme nue comme un vers. Les deux femmes s'observent, la « nudiste » entre dans la voiture, démarre et s'enfuit laissant pantoise.

D'après ce qu'elle dit, toute la vie de Juliette était dans cette voiture. Elle le dit au capitaine de gendarmerie, Pierre Perdrix (Swann Arlaud). Là voici cette gendarmerie de ce village où la frénésie n'est pas aussi forte qu'à Saint-Tropez, loin de là. La description des hommes de Perdrix est l'occasion régulière de ralentir le récit et d'approcher une vision de personnages en marge, l'un rêve d'être chanteur, un autre d'embrasser le capitaine.

Cette torpeur au travail n'est pour l'instant troublée par rien, à peine le gendarme Michel, celui qui veut embrasser son patron parce que son amoureux l'a quitté, prend la présence d'un tank de la seconde guerre mondiale pour anecdotique. Il sera enlevé le lendemain, déclare-t-il. Rien ne se passe dans le village, c'est pour cela que l'arrivée électrique de Juliette Webb est un événement qui va tout chambouler.

C'est le principe du film, un tourbillon vient dépoussiérer Pierre Perdrix, coincé entre cette gendarmerie sans affaires et une famille lourde et castratrice. La mère Thérèse (Fanny Ardant), plus évaporée que jamais croit faire de la radio dans son garage (en mode Allo Macha), le frère Juju (Nicolas Maury) se prétend spécialiste des vers de terre, il a une fille qui fait du ping-pong dans sa chambre (hommage à Wes Anderson).

Ce sont donc deux mondes qui s'entrechoquent et Erwan Le Duc n'a pas peur, pour son premier film, de montrer les cinéastes qu'il admire et qui l'ont inspirés. Le film est une suite de facéties de Juliette (webb évoque la toile d'araignée) et la fantaisie n'est jamais loin. Il se permet des accélérations du récit, l'arrivée d'Atmen Kelif par exemple pour une reconstitution d'une bataille contre les nazis où Pierre et Juliette s'incrustent.

Chouettes paysages filmés semble-t-il en 35mm, choix musicaux élégants et cocasses (une scène de boîte de nuit où tout le monde danse sur Tchiki Boum du Niagara). C'est moins délirant que La Fille du 14 juillet, encore que l'actrice Maud Wyler est aussi étonnante que Vimala Pons. Son regard fiévreux face à celui si étrange de Swann Arlaud est l'un des attraits majeurs du film.

Aucun commentaire: