Souvenons-nous
Le Gendarme de Saint-Tropez, la faible trace narrative
consistait pour Louis de Funès et ses collègues à traquer les
nudistes qui envahissaient les plages de Saint-Tropez. Perdrix
reprend cette idée et ce vocabulaire, des « nudistes
révolutionnaires » occupent une forêt des Vosges
(vocabulaire, on ne dit plus nudiste mais naturiste) et la
gendarmerie locale est chargé d'une histoire de vol de voiture.
L'ouverture
de Perdrix est en forme de coup de poing et rappelle les
meilleurs débuts des meilleurs films de Bertrand Blier. Une voiture
s'arrête sur une aire d'autoroute, sa conductrice Juliette Webb
(Maud Wyler) fait une pause, s'assoit et commence à écrire sur son
cahier. De la forêt sort une femme nue comme un vers. Les deux
femmes s'observent, la « nudiste » entre dans la voiture,
démarre et s'enfuit laissant pantoise.
D'après
ce qu'elle dit, toute la vie de Juliette était dans cette voiture.
Elle le dit au capitaine de gendarmerie, Pierre Perdrix (Swann
Arlaud). Là voici cette gendarmerie de ce village où la frénésie
n'est pas aussi forte qu'à Saint-Tropez, loin de là. La description
des hommes de Perdrix est l'occasion régulière de ralentir le récit
et d'approcher une vision de personnages en marge, l'un rêve d'être
chanteur, un autre d'embrasser le capitaine.
Cette
torpeur au travail n'est pour l'instant troublée par rien, à peine
le gendarme Michel, celui qui veut embrasser son patron parce que son
amoureux l'a quitté, prend la présence d'un tank de la seconde
guerre mondiale pour anecdotique. Il sera enlevé le lendemain,
déclare-t-il. Rien ne se passe dans le village, c'est pour cela que
l'arrivée électrique de Juliette Webb est un événement qui va
tout chambouler.
C'est
le principe du film, un tourbillon vient dépoussiérer Pierre
Perdrix, coincé entre cette gendarmerie sans affaires et une famille
lourde et castratrice. La mère Thérèse (Fanny Ardant), plus
évaporée que jamais croit faire de la radio dans son garage (en
mode Allo Macha), le frère Juju (Nicolas Maury) se prétend
spécialiste des vers de terre, il a une fille qui fait du ping-pong
dans sa chambre (hommage à Wes Anderson).
Ce
sont donc deux mondes qui s'entrechoquent et Erwan Le Duc n'a pas
peur, pour son premier film, de montrer les cinéastes qu'il admire
et qui l'ont inspirés. Le film est une suite de facéties de
Juliette (webb évoque la toile d'araignée) et la fantaisie n'est
jamais loin. Il se permet des accélérations du récit, l'arrivée
d'Atmen Kelif par exemple pour une reconstitution d'une bataille
contre les nazis où Pierre et Juliette s'incrustent.
Chouettes
paysages filmés semble-t-il en 35mm, choix musicaux élégants et
cocasses (une scène de boîte de nuit où tout le monde danse sur
Tchiki Boum du Niagara). C'est moins délirant que La Fille du 14
juillet, encore que l'actrice Maud Wyler est aussi étonnante que
Vimala Pons. Son regard fiévreux face à celui si étrange de Swann
Arlaud est l'un des attraits majeurs du film.
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