Les
pirates attaquent Hong Kong à la fin du 19ème siècle. Mais ce sont
les troupes de la Reine qui se battent entre elles. Pour bien mieux
voir, Jackie Chan pour son immense scène d'ouverture donne des
couleurs aux deux corps militaires qui se vont se battre dans ce
grand café. Les gardes-côte sont en blanc, les policiers sont en
vert. Cela permet une clarté dès que les premiers sont provoqués
par les seconds, pas pour des balivernes, pour savoir quelle troupe
aura les subsides britanniques. Les gardes-côte ont été choisis
par les pontes de l'armée et le gouverneur.
On
imagine la complexité de la chorégraphie pour rendre tout lisible
et ne jamais ennuyer le spectateur, tout est fluide dans ce défi
cinématographique. Rarement dans le cinéma de Hong Kong, dans ce
cinéma d'action et mieux encore dans les comédies d'action, autant
de personnes se battaient en même temps dans un même lieu. C'est un
défi qu'il semble s'être lancé pour varier les habituels combats
en duo ou trio ou ceux dans les auberges qui manquaient
d'imagination. Ce sera le cas dans les nombreux combats qui se
déroulent tout au long du film, à peu près toutes les 20 minutes.
Cette
superbe séquence de combat où les chaises, tables et objets divers
sont jetés dans tous les sens, avec ses multiples combattants permet
de faire se rencontrer les deux principaux protagonistes. Côté
blanc, Dragon Ma (Jackie Chan), côté vert Tzu (Yuen Biao), tous les
deux au meilleur de leur forme. Il faudra encore attendre un peu pour
que Sammo Hung, incarnant Fei, entre en scène. Dragon Ma représente
le petit gars au bas de l'échelle, le soldat obéissant aux ordres
mais plein de bon sens. Tzu est le petit protégé du patron de la
police, son oncle qui parvient à ce qu'il ne soit pas arrêté.
Le
film enchaîne sur du burlesque pur et commence à développer la
comédie absurde qui fera la décennie suivante le bonheur du cinéma
cantonais. Tzu devient l'instructeur des gardes-côte et va les
brimer avec des punitions ridicules. Pendant ce temps, dès qu'il a
le dos tourné, les hommes de Dragon Ma font tout pour contrarier
Tzu. Ces chamailleries ne dureront qu'un temps, celui qu'il faut pour
que Tzu et Dragon Ma deviennent proches puis amis, unis dans
l'adversité, celle de lutter contre ces pirates, métaphore filée
de l'occupation britannique puis de la signature de la rétrocession
avec la Chine.
Avec
toute cette action, nos deux héros n'ont le tempe de regarder les
demoiselles qui pourraient les détourner de leur mission. Dans Le
Marin des Mers de Chine, le femmes n’ont pas de vrai rôles,
dans les premières minutes, il y a bien deux jeunes filles, vêtues
de belles robes occidentales aux couleurs vives, elles pourraient
séduire Tzu et Dragon, bien qu'elles soient les filles des
officiers, mais elles disparaîtront progressivement du récit. Elles
ne sont qu’un prétexte pour qu’on puisse voir le courage et la
force des deux héros quand il vont lutter contre les pirates.
Il
faut bien que Fei entre enfin en scène. Le personnage de Sammo Hung
est ce qu'on nommera poliment un opportuniste. Pour bien le signifier
au spectateur de l'époque, dans ses premières scènes, il est en
costume occidental où il est franchement ridicule. Fei est un ami
d'enfance de Dragon mais qui a choisi la voie du petit banditisme.
Quand les deux hommes vont s'allier pour sauver Hong Kong, Fei va
revenir non seulement sur le chemin de la loi mais aussi reprendre
les habits traditionnels chinois. C'était alors la première fois
que les deux acteurs travaillaient ensemble, avant de réinventer la
comédie d'action.
Le
film prend plaisir à ridiculiser les hauts gradés, à dire que les
élites sont corrompues tout autant qu'incompétentes et à sublimer
le petit peuple dont Jackie Chan s’est fait le porte parole, plus
encore que Bruce Lee. Il est d’ailleurs de tous les plans (sauf
quand les méchants pirates complotent). Quand il est entouré de
Yuen Biao, Sammo Hung et Mars, il demeure le leader du groupe, celui
qui a les meilleures idées pour faire front aux pirates et aux
édiles. Régulièrement, ses comparses disparaissent du récit et
jamais ils n'auront d'aussi belles scènes de combat que celles que
s'attribuent Jackie Chan. C'est bien légitime.
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