Je
ne chronique pas sur mon blog tous les films que je vois, certains ne
méritent pas une ligne. Par exemple Joyeuse retraite que j'ai
vu la veille de Gloria mundi. Voilà, alors que s'approche
justement la grande grève du 5 décembre sur les retraites, que le
gouvernement nous serine sur une prétendue et fallacieuse égalité,
sort un film aux relents macronistes. Tourné à Troyes dans l'Aube
avec Michèle Laroque, la femme du maire de Troyes, Joyeuse
retraite entend montrer un couple de bourgeois qui veulent
quitter la France pour s'installer au Portugal.
Ce
premier film, ni fait ni à faire, mal fichu jamais amusant, regorge
des idéologies de la France de la droite sociale, comme disaient les
journalistes des chaînes info, Borloo, Barouin, Raffarin et Juppé.
Et bien entendu Macron. Oh non, il ne s'agit pas d'expatriés qui
fuient l'impôt, mais on ne parle que pognon. Nicole Ferroni,
chroniqueuse amusante de France Inter joue là-dedans, elle conspue
une institutrice qui refuse de prendre ses enfants en retard. Mais
GAG, si l'institutrice refuse, c'est parce qu'elle est en grève. On
se marre bien.
Sylvie
(Ariane Ascaride) refuse elle aussi de faire la grève que tente de
lancer le délégué syndical. Sylvie fait partie de ces femmes dont
parlaient Ruffin, celles qui nettoient la merde des autres avant que
ces autres n'arrivent à leur boulot. Ces femmes qu'on aperçoit à
peine. Elle se fait traiter de briseuse de grève, ce qu'on appelait
jadis un « jaune » ( sans gilet). On pourrait l'accuser
de ne pas prendre en compte les revendications de ses collègues mais
Robert Guédiguian vient de passer une bonne partie de Gloria
mundi à expliquer pourquoi elle ne peut pas faire grève.
Ce
nouveau film du cinéaste marseillais prend l'exact contre pied de La
Villa. On était dans un lieu calme et clos où les générations
se retrouvaient, on est dans une ville bruyante, dévastée, sale où
la vie est aussi sinistre que dans Les Misérables. Les scènes
extérieures sont d'une tristesse incroyable. Le petit hôtel minable
où va vivre Daniel Ortega (Gérard Meylan) à sa sortie de prison
n'est guère mieux que sa cellule, mais ça lui convient. Il a passé
20 ans en prison, à Rennes, et il retourne dans sa ville pour
découvrir sa petite fille.
Gloria
mundi commence avec la naissance de Gloria, scène lyrique, la
seule du film. Ça commence par une naissance et le récit est
construit pour finir à une mort. C'est la force inéluctable. Je ne
dirai pas qui meurt en fin de film, il n'y a pas de suspense, on peut
le deviner. Je dirais même qu'on comprend. C'est terrible
d'ailleurs, on en a envie, on a une irrépressible envie de foutre
des claques à ces jeunes gens complètement intoxiqués au
libéralisme, à la flexibilité, à l'auto-entreprise, ce piège
délétère inventé avec cynisme par Chirac et Sarkozy et tant vanté
par les éditorialistes.
Il
faut observer les tenues des personnages. Prenons le premier couple,
Mathilda (Anaïs Demoustier) et Nicola (Robinson Stévenin), elle est
la maman de Gloria et elle travaille justement dans une boutique de
fringues, l'un de ces magasins dans un immense centre commercial où
tout est de la camelote. Mathilda avec sa jupe courte court après la
mode. Nicolas lui porte un beau costume noir pour se lancer dans
Uber. On dirait un croque-mort. Il passe, en début de film, des
minutes pour s’apprêter, reprochant à sa copine d'à peine le
regarder.
Mathilda
est la fille de de Sylvie et Daniel, mais c'est Richard (Jean-Pierre
Darroussin) qui l'a élevée comme sa fille naturelle. Avec Sylvie,
il a une autre fille Aurore (Lola Naymark), on la déteste dès qu'on
la voit avec ses fringues motif panthère (une panthère siège
devant sa boutique de cash converter), elle est cassante avec
ses « clients » qui viennent vendre pour rien leur
camelote. Elle est mariée à Bruno (Grégoire Leprince-Ringuet). Le
couple fait peur, son discours donné au premier degré, fait peur et
tout inspire le mépris chez eux.
Bruno
avec sa petite chemise chic (ou qu'il croit chic) et sa doudoune sans
manche, fonce d'une endroit à un autre dans ces quartiers pauvres
sur son scooter. Il trace sur les trottoirs en sens interdit. Parfait
connard, il signe de la coke, trompe sa femme et exploite quelques
types au noir. Certaines scènes en sa présence sont indécentes,
rarement on n'a eu l'occasion de voir dans un film français un type
aussi complaisant, aussi antipathique qui expose sa vision du monde
de cette façon. A part peut-être dans la presse ultra libérale.
C'est tout pour lui et rien pour les autres.
Les
réunions familiales dans le salon de Sylvie et Richard sont une
illusion. On imagine le couple anciens communistes, je dis ça parce
qu'ils ont encore des canapés et fauteuils rouges, ça n'a l'air
qu'un détail de décor mais je suis convaincu que Robert Guédiguian
soigne à l'extrême tous ces détails de fringues comme
d'accessoires. Et en 20 ans, ce temps où Daniel était absent, ils
ont changé, c'est ce changement radical et terrifiant, depuis Marius
et Jeannette en 1997 que le cinéaste a filmé dans Gloria
mundi. Ainsi passe la gloire du monde.
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