samedi 16 novembre 2019

J'ai aussi regardé ces films en novembre


Le Bel été (Pierre Creton, 2019)
La présence régulière de migrants dans le cinéma français sert essentiellement à révéler les failles des personnages du film, du pire (Happy end de Michael Haneke au meilleur La Villa de Robert Guédiguian). C'est ce qu'on appelle la part documentaire dans la fiction qui s'englue parfois dans la leçon citoyenne balourde. Mais rarement, le migrant n'existe vraiment (pas de nom, à peine un prénom). Le Bel été prend à contre-pied cet état du cinéma français. Il est difficile de séparer le documentaire de la fiction qui s'entremêlent avec un important travail du spectateur. Pour une fois (voir plus bas l'atroce La Belle époque, on remarque l'adjectif commun), tout n'est pas mâché. Le film est surtout une histoire d'amours (au pluriel) en Normandie qui mle fait penser aux films de Marcel Hanoun, Les Saisons.

La Belle époque (Nicolas Bedos, 2019)
Il y a une incapacité délirante à ne pas faire confiance au spectateur, à le prendre pour un enfant de 12 ans pas en mesure de construire le concept initial prévu dans le film. Nicolas Bedos nous assène pendant 20 minutes des dialogues lourdement explicatifs sur son idée de remonter le temps grâce au théâtre avec une incompétence insoutenable. Tout devrait passer par l'écriture cinématographique mais il ne la possède pas. Ensuite, il faut se farcir l'opposition des siècles. Ah, la vraie cigarette sans filtre de Daniel Auteuil, c'est tellement plus cinéma que la vapoteuse de Fanny Ardant, comme si le mec était en train de filmer Dana Andrews et Gene Tierney. Ça racle très longuement les vieux tiroirs de la nostalgie passéiste. Quand Jean-Pierre Jeunet faisait Amélie Poulain, on trouvait ça rance, là les gens trouvent ça mignon. L'ironie constante arborée par les personnages consiste à balancer des vannes mal écrites (celle par exemple sur les cigarettes). Le récit est constellé de trous et de revirements de situation incohérents (Daniel Auteuil qui va en banlieue retrouver Dora Tillier dans un autre personnage pour le dégoûter d'elle est terriblement mal écrite et surtout outrageusement misogyne). Nicolas Bedos s'est un peu calmé sur les mouvements d'appareil excessifs de son premier film mais là il vise Hollywood. Le film est une copie franchouillarde de The Game, un film franchement pas terrible de David Fincher.

Adults in the room (Costa-Gavras, 2019)
Comme dans Alice et le maire, tout le monde s'appelle par son prénom. Ainsi quand Yannis rencontre Michel puis Pierre ou encore Wolfgang ou Christine. Il faut tout de même un certain temps pour remettre des noms de famille donc des fonctions derrière le prénom. Mais cela construit l'effet politique du film, dans les commissions européennes, les membres sont une famille. En tout cas, ils se vantent en être mais ne cessent de se chamailler quand ils se voient. Les réunions sont comme des conseils de famille avec Wolgang qui s'engueule avec tout le monde et Michel en vieil oncle ivre qui fait des siennes. Certes le film n'est pas toujours aisé à suivre, on traverse tout de même des zones de turbulence qui semblent complètement hors de la réalité. Comment un tel chantage a-t-il pu arriver ? Costa-Gavras a de la sympathie pour Yannis et rétrospectivement, je me rappelais en regardant le film le traitement médiatique en France du gouvernement grec de Tsipras où la presse accusait Alexis et Yannis de tous les maux, relayant cette propagande et ce diktat dénoncé pendant ces deux heures de cinéma.

Koko-di koko-da (Johannes Nyholm, 2019)
Le titre fait référence à une comptine chantée dans le film. L'étrange inquiétude démarre dès le début, trois personnages entrent en scène. Puis une famille suédoise bien normale maquillée en lapins. Puis le film se lance dans une manière de faire de l'horreur avec une idée qui marche souvent, la formule de Bill Murray dans Un jour sans fin. Une même scène revient sans cesse et qui se termine toujours de la même façon : le couple est massacré par les trois premiers personnages. Chaque fois des variations sont proposées, voilà la parti pris du film. C'est amusant parce que le couple massacré est paradoxalement détestable, elle à chouiner pour aller pisser, lui à tenter d'échapper à son destin car seul ce gars a conscience de la répétition de sa mort prochaine. Ça ne va pas bien plus loin mais c'est déjà pas mal.

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