Quand
j'ai vu Les Oubliés, le film s'appelait encore Land of
mine et il n'avait pas encore nominé à l'Oscar du meilleur film
en langue étrangère (en l'occurrence, du danois, de l'allemand et
quelques phrases en anglais). Certes, le film a raté l'Oscar mais il
sort aujourd'hui, soit tout de même 9 mois après son passage à
Ecrans Juniors, une sélection de films mettant en scène des
personnages jeunes et présentés en marge du Festival de Cannes et à
destination des lycéens. Sur l'écran, les personnages ont donc
l'âge des lycéens qui étaient dans la salle, une salle pleine et
silencieuse.
Ces
oubliés (évidemment tirés d'une histoire vraie, comme tous les
films en ce moment) sont de jeunes soldats allemands. Et quand
j'écris jeunes, il faudrait dire que ce sont des adolescents. Dans
les derniers temps de la deuxième guerre mondiale, Hitler et ses
sbires, voyant la défaite arriver à grands pas, forcent les plus
jeunes hommes d'Allemagne à intégrer l'armée du Reich. Ce sont des
gamins, ils peinent à rentrer dans les uniformes gris trop grand
pour eux, ils ont encore des boutons sur leurs visages juvéniles.
L'air
hébété, ils sont accueillis par les vainqueurs qui ont désormais
tous les droits sur eux. Le temps de la vengeance des Danois est
arrivé, avec son lot d'humiliation. Ce sont les adultes qui
punissent ces pauvres gamins comme s'ils étaient des criminels de
guerre. C'est cette injustice qui frappe le plus dans le début des
Oubliés, entre l'innocence des anciens bourreaux (ou vus
comme tel) et de l'accusation des anciennes victimes (qui vont se
rendre justice eux-mêmes). Le boulot de ces jeunes soldats :
enlever les mines des plages danoises.
Avant
d'envoyer les gamins sur la plage avec le gros risque qu'ils se
fassent sauter, c'est l'heure de l’entraînement, c'est le moment
de l'apprentissage du dégoupillage des mines. Des leçons données
par un officier méprisant avec sévérité, avec un taux de cruauté
certain et avec un espoir de sa part de voir les gamins exploser. Et
c'est ce qui va arriver. Il faut convenir qu'il est assez rare pour
un film de faire mourir des adolescents et les scènes font preuve
d'une certaine dureté et d'une volonté de réalisme.
Le
cinéaste danois suit ensuite ces jeunes soldats dans
l'accomplissement de leur tâche. Ils sont parqués dans une cabane
en bord de mer. A côté, une ferme avec une fermière veuve et
rancunière et sa fillette. Le soldat danois qui garde les allemands
va manger à la ferme, il est d'abord sourd aux conditions de vie des
adolescents, il est dans la même position que l'officier, que cette
fermière. Tout le monde regarde de haut les Allemands qui ont faim,
froid et peur, tel ce sergent britannique qui humilie l'un d'eux en
lui pissant dessus.
Bien
que cousu de fil blanc, Les Oubliés est prenant et surprend
par sa franchise et sa mélancolie. Le garde chiourme va bien entendu
s'attacher à ces jeunes. Les personnalités de chacun s'affirme au
fur et à mesure, mention spéciale aux jumeaux. Leur destin est
tragique, les explosions dramatiques accélèrent l'émotion et
l'empathie. L'enjeu est de savoir qui tiendra jusqu'au bout, qui
survivra jusqu'à la promesse de l'officier de les laisser rentrer
chez eux une fois la plage déminée. Hélas, les promesses
n'engagent que ceux qui y croient.
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