La
mère, son fils et la petite-amie. Lilly (Anjelica Huston), Roy (John
Cusack) et Myra (Annette Bening) sont des personnages de film noir
égarés dans le Los Angeles de 1990 (il faut apprécier la manière
de prononcer le nom de la ville par Anjelica Huston). Robes unies,
costume sombre (et inversement), Cadillac, lunettes noires, volutes
de fumée, jeu sur les ombres, Stephen Frears s'amuse comme un petit
fou à faire des Arnaqueurs un monde de mensonge et
d'arnaques. Sans oublier la fabuleuse musique d'Elmer Bernstein,
évidemment très hitchcockienne.
Trois
arnaqueurs, trois modes opératoires. Lilly bosse pour Bobo (Pat
Hingle), un bookmaker et écume les champs de course de turf où elle
parie sur des chevaux tocards pour faire monter les cotes puis
récupère les tickets abandonnés. Roy est un petit escroc qui opère
dans les bars en tendant des billets de 20$ mais en donnant un billet
de 10$. Myra utilise ses charmes indéniables pour annuler ses dettes
et ses créances. Mon personnage préféré est clairement celui
d'Anjelica Huston avec ses cheveux courts blonds peroxydés.
La
plus belle scène des Arnaqueurs, l'une des plus éprouvantes
voit Lilly confrontée à Bobo. Il lui rend visite, une visite
qu'elle place sous le signe du danger, elle a raison, l'air de son
patron n'est pas à l'amitié mais à la punition. Il pense qu'elle
lui vole de l'argent, il a raison. Il demande si elle sait quels
dommages fait un coup dans l'estomac donné par un paquet d'oranges
plié dans une serviette. Il demande, menaçant, de préparer cette
serviette et ces oranges. Bobo ne la frappera pas, il brûlera le dos
de sa main avec son cigare.
Si
Bobo lui en veut, c'est que Lilly n'a pas pu parier au turf de La
Jolla pour aider son fils dont l'une des arnaques s'est soldée par
un solide coup de batte de baseball dans l'estomac. Si tous deux sont
unis dans les blessures et meurtris, leur relation est médiocre. Au
détour d'une conversation, autant de dialogues de sourds entre eux,
on apprend que Lilly a eu Roy a 14 ans, qu'elle le faisait passer
pour son petit frère. Ce qu'appuie Stephen Frears, au long du récit,
est la possibilité de l'inceste entre la mère et le fils.
Pour
envenimer encore plus les choses, Myra sent bien que Lilly ne peut
pas la voir en peinture. L'animosité est palpable entre elles et Roy
a choisi son camp, ce sera celui de Myra. Enfin Myra aime l'argent
plus que quiconque, ce qui ne l'empêcher de tenter de convaincre
Roy, avec une partie de jambes en l'air (Annette Bening apparaît
plusieurs fois entièrement nue), d'accepter une affaire comme celle
qu'elle faisait avec son ancien mec. Ce qui offre un flash-back
magnifique sur ses arnaques à l'immobilier et son pouvoir de
séduction.
Le
finale des Arnaqueurs est un époustouflant hommage à
Psychose, sa première partie avec Marion Crane qui fuit et va
se réfugier dans un motel minable de Phoenix. Le personnage
d'Anjelica Huston fait la même chose. Lilly est poursuivie par les
sbires de Bobo comme par Myra qui veut piquer l'argent qu'elle
planque dans le coffre. Lilly, elle, vole le fric de son fils qu'il
cache derrière deux hideuses peintures de clown (au moins personne
ne risque de dérober ces tableaux). Le fric, la mort, l'amour fou,
tout cela finira très mal.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire