« Quelle
histoire tu veux que je te raconte ? » demande Helen
(Marlene Dietrich) à son fils au moment d'aller le coucher. « Celle
en Allemagne » répond le petit Johnny (Dickie Moore) en
appelant son père Ned Faraday (Herbert Marshall). L'histoire
préférée de cet enfant né de l'amour entre une Allemande et un
Américain a commencé un printemps dans la Forêt Noire. Ned était
avec six camarades étudiants, Helen était en train de se baigner
dans une rivière avec cinq amies. Les Américains se sont approchés
pour observer ces six naïades en tenue d'Eve et Ned a suggéré de
venir admirer Helen à son spectacle et de l'inviter à dîner après.
La
Vénus blonde commence sous un soleil éclatant par une scène
d'un érotisme qui a dû troubler plus d'un spectateur de 1932, des
jeunes filles nues dans une rivière. Josef Von Sternberg ne perd pas
une seconde et dans un montage fulgurant entre l'eau de la rivière
et celle du bain de l'enfant du couple, il poursuit son récit à New
York. Helen n'est plus une chanteuse de cabaret mais une mère au
foyer qui chouchoute son enfant, le porte sur le dos pour aller le
coucher, fait de la couture. C'est le mari qui travaille, il est
chimiste, mais il se sait très malade et va devoir aller se soigner
en Europe. Il laisse quelques mois Helen et Johnny à New York non
sans avoir accepté qu'elle redevienne une vedette de cabaret.
Le
cabaret et le grand spectacle, Josef Von Sternberg connaît bien ça.
Helen prendra le pseudonyme de Helen Jones et son nom d'artiste est
Blonde Venus. Pour son premier show dans le cabaret, elle est
déguisée en gorille, derrière elle des danseuses sont en
Africaines sauvages. Puis, le gorille retire sa gueule et Helen revêt
une perruque blonde crépue avec des os dans la chevelure. Enfin,
elle entonne une première chanson. Immédiatement, Blonde Venus
devient une star du music hall, au grand bonheur du patron du cabaret
et au grand dam de sa rivale, une femme aux yeux tristes surnommée
Taxi. D'autant plus rivale que Helen chipe Nick Townsend (Cary Grant)
qui admire la Blonde Venus.
La
gloire est suivie de la déchéance. La gloire, c'est la vie aisée
avec Townsend. Il ne devient pas son amant mais passe son temps avec
Helen et Johnny. Helen, grâce au succès, vit la belle vie, a de
belles robes, tandis que son mari est à des milliers de kilomètres.
La déchéance vient au retour de Ned qui apprend que Townsend est
devenu son amant platonique. Il y a une certaine cruauté au rejet de
Helen par Ned, à sa demande d'abandonner son fils. Helen s'enfuit
avec son fils et le film commence une chasse à la femme où, ville
après ville, un détective privé suit Helen qui voit sa vie devenir
de plus en plus difficile, elle devient de plus en plus pauvre, ne
trouvant jamais des engagements quand les patrons de cabaret
apprennent qu'elle est recherchée.
C'est
par rupture de ton que Josef Von Sternberg raconte le destin tragique
de son héroïne et la haine de son mari, et ces ruptures sont
visibles dans les tenues que porte Marlene Dietrich. Les beaux
chapeaux en plume et les belles robes laissent place aux habits
légers, aux collants déchirés et à l'angoisse. Helen est rejetée
par tous, sauf les déclassés, les Noirs qui sont comme elle
méprisés, les pauvres gens qui acceptent de l'accueillir. La
déchéance est ainsi suivie de la rédemption, mais sûrement pas de
la contrition. La séquence de La Vénus blonde où Helen
Jones revient sur le devant de la scène travestie en homme, costume
blanc et chapeau claque, affirme qu'elle a pris le pouvoir, comme un
homme. Mais quand elle retrouve enfin son fils, il réclame encore
une fois cette histoire en Allemagne.
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