The
lights are always bright on Broadway, there's always magic in the
air. L'entraînante chanson de Georges Benson illustre les auditions
pour le prochain spectacle de Joe Gideon (Roy Scheider), illustre
metteur en scène de Broadway. Il est sur le bord de la scène du
théâtre, les danseurs et danseuses en maillot de peau, t-shirt,
débardeurs, short, collant préparent leurs mouvements
chorégraphiques. Plus les mouvements sont complexes, moins il reste
de candidats. Ça a beaucoup écumé.
C'est
un moyen très simple de montrer les artistes qui seront dans le
reste du film. Ils ne seront jamais vraiment bien traités comme
personnage, ils restent des silhouettes, des troisième rôle. Ils ne
sortiront pas de leur fonction de danseurs, d'ailleurs, le film sort
rarement du théâtre. C'est finalement pas plus mal de ne pas trop
savoir quoi que ce soit sur eux, cela confirme la suprématie du
metteur en scène, son pouvoir absolu sur les interprètes. Et pour
la pièce musicale et dansée qu'il chorégraphie, Joe Gideon en est
aussi l'auteur.
En
revanche, dans la salle, sur quelques sièges du public, la caméra
s'attarde sur les producteurs qui s'ennuient terriblement de ces
auditions. Ils sont au milieu de la salle. Au fond, la fille de Joe,
Michelle (Erzebet Foldi), une douzaine d'années et sa mère Audrey
(Leland Palmer). Elles observent avec plus d'intérêt. Elles dansent
toutes les deux, Joe donne des cours à sa fille. Audrey est la star
du show, un quadragénaire qui continue de faire des rôles de jeune
femme de 24 ans, comme ironise Joe Gideon.
Le
film sort rarement du théâtre mais chaque jour des répétitions
est scandé et rythmé par une séquence similaire. Joe Gideon se
lève, met du Vivaldi sur sa chaîne hi-fi, avale un médicament,
prend une douche, s'habille et se regarde dans le miroir. Avec un
grand sourire, un peu narquois, un peu malin, un peu blasé, il tend
ses mains et sort un joyeux « it's showtime, folks ». Il
n'y croit pas mais il y croit quand même, tout le film est dans
cette contradiction du personnage de Roy Scheider, il adore son
métier mais déteste travailler.
Il
bouffe des médicaments le matin et tout la journée il fume des
cigarettes. Jamais je n'ai autant de cigarette fumées dans un film,
il n'arrête jamais, quand il danse, sous la douche, avec sa fille,
avec ses maîtresses. Et ça des maîtresses, des amantes, des coups
d'un soir, il en a beaucoup. Il en a tellement que parfois il oublie
qu'il a une copine officielle qui vient le découvrir au petit matin
avec une jeune femme dans son lit. Comme tous les hommes volages, il
est très jaloux. Pour se faire pardonner, il dit « I love
you ».
il
adore dire « I love you » avec ce même air de gamin, ce
même air que celui qu'il a le matin devant sa glace, ce petit air
blasé. Angelique (Jessica Lange) lui demande s'il aime dire « I
love you ». Il adore ça. Angelique est une vue de son esprit
comateux. Joe Gideon fait une attaque cardiaque à force d'épuiser
son corps. Pendant tout le film, dans un décor de capharnaüm,
Angelique et Joe se rencontrent, elle lui dévoile des pans de son
passé. Tout revient par bribes, de son adolescence à aujourd'hui
dans un hommage non dissimulé à 8 ½.
Ces
monceaux de passé sont des souvenirs brutaux. Ils dépeignent un
homme peu aimable mais amoureux constant. Il a beau être un metteur
en scène de Broadway au succès incroyable, il a des tares profondes
que chaque personnage de sa vie vient décliner dans des numéros
chantés, notamment les trois femmes de sa vie. Bob Fosse filme ses
séquences avec Michelle sa fille, Audrey sa femme et Katie (Ann
Reinking) sa petite amie comme dans une comédie musicale des années
1950 devant des décors épurés.
Pourtant,
rien ne peut satisfaire Joe Gideon si ce n'est le film qu'il est
train de monter. Un documentaire sur un comédien de stand-up, un
comédien cynique (Cliff Gorman). Il passe beaucoup de temps sur ce
film, souvent avec la même séquence qu'il se repasse ad libidum. Le
tout compose une version, parfois kitsch, parfois épuisante devant
tant d'agitation, très autobiographique de la vie de Bob Fosse qui
se démenait avec ses femmes pendant qu'il tournait Lenny avec
Dustin Hoffman et mettait en scène le musical Chicago pour Broadway.
1 commentaire:
J'adore ce film. Il y a quelque chose de fascinant
dans la cohabitation du succès, de l'épuisement
et de la mort, montrés ici sans aucun glamour ni
romantisme. Roy Scheider immense.
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