Nous
sommes lundi 22 juin, les cinémas à nouveau leurs portes et
allument leurs écrans fermés et éteints depuis près de trois
mois. Quelques nouveaux films sortent – dont des reprises – et
quelques films qui n'étaient à l'affiche que depuis peu de temps se
voient donner une nouvelle chance. Bonne séance.
Mon
nom est clitoris (Lisa Billuart Monet & Daphné Leblond, 2020)
Le
titre aurait pu être « dessine-moi un clitoris », c'est
ce que font les jeunes femmes interviewées dans le film. Le clitoris
a la taille d'un petit pois, dit un livre d'éducation sexuelle. On
apprendra dans ce film court et vif que ce n'est pas vrai. Ça
discute beaucoup sur le plaisir, sur le concept de perte de la
virginité, sur l'orgasme, sur le vagin, sur la honte de ne pas
donner du plaisir aux hommes, sur l'ignorance des hommes de
l'anatomie féminine. C'est vraiment brillant et drôle (souvent très
drôle d'ailleurs) avec trois fois rien, une caméra, un micro, des
témoignages sur le lit. Ça n'a l'air de rien, c'est pas
révolutionnaire mais ça suffit à faire un film militant
instructif, comment dire, totalement actuel.
La
Communion (Jan Komasa, 2019)
L'acteur
Bartosz Bielena est extraordinaire, ce sont ses yeux mâchurés de
noir qui expriment le plus sa lassitude de vivre dans cette Pologne
où la violence règne de toutes parts. Ce jeune homme taciturne sort
d'une centre de rééducation pour aller se faire rééduquer dans
une menuiserie. Mais en chemin, il change d'idée et revêt une robe
de curé et devient le curé de ce village où un drame récent a
divisé les habitants. Porter l'habit de prêtre est d'abord un jeu,
un défi à la bonne société bigote qui n'y voit que du feu. Au
contraire, à part la « bonne du curé », tout le monde
trouve ses petites modernisations palpitantes, ça les change du
train. Avec les jeunes qui se réunissent sous un abri-bus, il fume
des clopes, il danse sur de la techno. Avec les vieux, il fait des
trucs plus traditionnels. Mais il prend aussi du plaisir, presque
sadique, à remuer ce passé, ces divisions. Tout le film est porté
par l'acteur dont on ne sait jamais ce qu'il pense, c'est au-delà de
l'effet Koulechov, ça en devient un film politique dans ce tableau
impressionniste qui ne donne pas envie d'aller vivre dans la campagne
polonaise mais qui
L'Ombre
de Staline (Agnieszka Holland, 2019)
Le
seul film d'Agnieszka Holland que j'ai vu est Total eclipse en
1995 sur les amours tumultueuses entre Rimbaud et Verlaine, soit un
très jeune Léonardo Di Caprio, tout en fougue et en mèche blonde
qui lui tombe sur les yeux et David Thewlis qui semblait ne pas
s'être remis de son rôle dans Naked de Mike Leigh. Quelle
souffrance ! Alors, je ne vais pas juger la cinéaste sur deux
films, mais L'Ombre de Staline est un autre pudding européen
indigeste. La Communion est un authentique film politique qui
dénonce sans en avoir l'air, L'Ombre de Staline est tellement
lourdement manichéen dans sa dénonciation du stalinisme (le film se
déroule en 1934) avec la traversée d'un journaliste anglais des
villages soviétiques qu'on se prend à se pincer pour savoir si ce
qu'on voit est vrai. Le manque total de subtilité (images sépia des
villageois qui pratiquent le cannibalisme, méchants chefs du
kolkhoze qui volent le blé, jamais un seul de ces Ukrainiens
n'existe en lui-même si ce n'est pour démontrer la corruption du
système)assez vite fait que le film s'effondre. A vrai dire,
pourquoi je m'énerve tant ? Ça n'en vaut pas la peine.
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