Ça
(Andrès Muschietti, 2017)
En
anglais américain, it prend souvent une allusion sexuelle,
doin' it, l'avoir fait, comme un euphémisme pour dire que
l'on a couché. It ou Ça, sa sonne un peu
différemment. La sexualité, les six adolescents de Ça ne la
connaissent pas encore mais ça les taraude beaucoup. Richie (Finn
Wolfhard, l'un des jeunes acteurs de la série Stranger things)
n'arrête pas de parler de sa bite (dick en VO), de sortir à
chaque phrase ou presque des fuck (le film a une certaine
valeur pour ce perler vrai tellement différent des films avec des
ados). Plus complexe, Beverly (Sophia Lillis) a une relation étrange
avec son père, presque de l'inceste, et s'attire les faveurs de Bill
(Jaeden Liberher), jeune héros au bégaiement récurrent qui a perdu
son jeune frère Georgie, mais aussi de Ben (Jeremy Ray Taylor) petit
gros mal dans sa peau qui lui a écrit un gentil poème. Quant au
jeune Stanley (Wyatt Oleff), on évoque son prépuce à couper alors
qu'il va faire sa Bar Mitsvah. En général, dans cette petite ville
du Maine de 1989 (l'époque de Batman qui passe au cinéma
mais aussi de George Bush père), les parents sont conservateurs,
protecteurs envers leurs enfants, trop protecteurs sans doute. Le
film choisit de ne pas poursuivre dans cette confusion des sens que
les ados découvrent et ce vilain clown (que joue Bill Skarsgård, le
fiston de Stellan) aurait pu être, justement, l'acmé de cette
angoisse, de cette peur du sexe dans l'Amérique républicaine (l'un
des personnages, Henry est un raciste affirmé mais il a ses excuses
son père le bat), mais il n'en sera rien. Les dialogues sexués ne
servent à pas grand chose et Grippe-Sou ne fait jamais peur dans ses
apparitions Grand-Guignol à grand renfort de musique tonitruante.
Home
(Fien Troch, 2016)
Dans
ce film belge en langue flamande (un néerlandais moins rude qu'aux
Pays-Bas où on entend parfois quelques mots français « ça
va » pour dire OK ou « putain »), les ados aussi
trinquent. Trois lycéens d'une ville sans âme, sans personnalité,
sans divertissement. Kevin (Sebastien Van Dun) vient s'installer chez
sa tante Sonja (Karlijn Sileghem), il sort de prison et préfère ne
pas retourner chez ses parents. Il se lie d'amitié avec son cousin
Sammy (Loïc Bellemans). Sonja et son mari accueillent avec
bienveillance, certes il dort dans la cave mais il a beau lit et on
lui a acheté une télé neuve. Télé qu'il ne va même pas
regarder. Sammy et Kevin préfèrent passer leur temps dans le
parking, le premier présente sa petite amie Lina (Lena Suijkerbuijk)
avec qui Kevin va avoir une petite amourette. Et à ce trio s'ajoute
John (Mistral Guidotti), sans doute le personnage le plus abîmé de
Home, celui par lequel le drame va arriver. Sa mère est le
personnage le plus troublant du film, elle possède une violence qui
va détruire son fils. Filmés en 1:37, les jeunes gens de Home
sont avares de parole et encore plus d'explications (quand les
adultes les interrogent, ils se taisent), ils se filment au
smartphone, fument un peu et tentent de survivre à l'ennui. Kevin
fait un apprentissage de plombier (« c'est un beau métier
plombier » dit son employeur) mais jamais il n'expliquera ce
qu'il veut. C'est cela qui donne sa force au film, il ne cherche pas
à ressembler à Gus Van Sant (j'y ai pensé un moment), et encore
moins à ses compatriotes wallons les frères Dardenne, mais c'est un
puzzle émotionnel d'une brutalité latente et paradoxalement douce,
à l'écoute sourde de ces adolescents. J'étais allé totalement au
hasard voir ce film et je suis ravi d'avoir découvert cette
réalisatrice belge. Le cinéma belge flamand (je n'ai vu que La
Merditude des choses et Bullhead) est rare et d'une
tristesse abyssale, voilà ce que je constate.
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