Quatrième
et dernière saison de Marcel Hanoun, L'Automne.
Comme dans L’Hiver, Michael Lonsdale est Julien, un cinéaste au
travail. Bobines de film avec le titre L’Automne
écrit sur la tranche, claps, maquillage, les noms des techniciens et
des deux interprètes sont donnés oralement. Puis un long plan fixe
de Michael Lonsdale, regard caméra sur une musique lyrique. Puis un
plan noir et une conversation téléphonique. « J’ai besoin
d’un assistant, si possible une femme ».
Bergman,
Bresson, Dreyer, Visconti aussi et un « cinéaste trop peu
connu » Chris Marker. Voilà les cinéastes qu’aime Julien au
cinéma explique-t-il à Anne (Tamia), sa monteuse. Car ces regards
caméra étaient ceux d’un homme qui fait le montage bobine de son
film. Anne aimerait elle faire un film d’après Sade. Lui dit aimer
la manière de Pasolini de filmer les tableaux, Pasolini et Sade sont
évoqués dans la foulée des années avant que le premier n’adapte
le second.
Le
mieux serait de voir. Dans cet éloge de la modestie et de la
banalité, le récit qui est raconté dans L'Automne,
celui d’un film qui se construit sous nos yeux (que l’on voit) et
celui que Julien a filmé et dont il ne fait que raconter des scènes
(on ne les voit jamais). On n'est pas très loin d'Une
sale histoire tourné cinq ans
plus tard par Jean Eustache. Mozart en grande pompe sur une histoire
à la Flaubert tout ça pour conclure que la scène serait meilleure
sans musique.
La
créativité du spectateur existe-t-elle ? Voilà la question que se
pose Julien. Il pense tellement à son film qu’il s'égare. Enfin
un plan en couleur, et une femme nue reproduisant un célèbre
tableau et qui dit « imaginez un film politique où une femme
aux seins nus duraient des slogans politiques ». Anne la
monteuse dessine sur l’objectif de la caméra. Le travail du
spectateur consiste dans les quatre saisons de Marcel Hanoun à
reconstituer un récit à partir d’un minimum de narration, moins
un puzzle qu’une énigme.
Soit
le cinéaste montre tout mais ne raconte rien soit il ne montre rien
mais raconte tout. Il est un authentique cinéaste du montage.
Paradoxalement, L'Automne
n’appuie pas sur la mise en abyme, quand Julien n’arrive soudain
à ne pas dire une phrase simple « j’aime le prénom Anne »,
on entend un rire derrière la caméra sans qu’on sache si cette
hésitation de Michael Lonsdale était écrite ou involontaire. Pas
plus que l'on ne saura si c'est le rire de Marcel Hanoun.
Les
quatre films se répondent les uns les autres avec des liens très
ténus. Dans la dernière partie Julien se fait le porte-parole de
Marcel Hanoun et parle de langage cinématographique « les
films étrangers devraient être vus sans sous-titres et le
spectateur le comprendrait grâce au langage du film ». Ce
qu’essayent de faire les quatre saisons. Et dans les dernières
scènes, Marcel Hanoun oublie la théorie et filme en couleur des
forêts automnales et des mains qui se tiennent.
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