samedi 16 septembre 2017

Les Saisons L'Hiver (Marcel Hanoun, 1969)

Calmement, je poursuis ma découverte des Saisons de Marcel Hanoun, aujourd'hui L'Hiver. Calmement parce que après L'Eté déjà très languide, L'Hiver se mérite tant le cinéaste prend un plaisir à noyer le semblant de récit dans ses 78 minutes. Pourtant, il est bien là le scénario : Julien (Michael Lonsdale) réalisateur de fiction est à Bruges pour tourner un documentaire. Avec son chef op' Michel (pas de générique, donc pas de nom), il flâne sur les canaux de la ville. Il fait filmer un arbre, puis le reflet de l'arbre dans l'eau. La ville est belle avec son architecture médiévale, Julien pense tout de suite à Shakespeare, et le soir, dans sa chambre d'hôtel, il lit des extraits à haute voix d'Othello ou de Roméo et Juliette, en français ou en anglais.

Filmer Shakespeare, voilà ce qu'il pourrait faire. Sur une gondole, Julien se filme lui-même dans une mise en abyme en miroir (encore les reflets sur l'eau) avec son amie Sophie, comédienne italienne qu'il a connu à Venise où elle jouait du Goldoni. Julien se désespère d'un tel conformisme. Lors d'une discussion avec son producteur, le cinéaste dira « le cinéma n'est plus une question d'anecdotes, c'est un langage en soi » et son producteur lui répliquera, non sans dépit « allez faire comprendre ça au public. Il faut une vedette, un sujet, une très belle histoire simple humaine avec des résonances ». L'art et la manière même de Marcel Hanoun dans la bouche de Michael Lonsdale, une vedette du cinéma d'auteur, après tout.

Ce langage dans L'Hiver est encore une fois un collage d'images, de plans, des juxtapositions de voix et de musique. Le film mêle le noir et blanc avec la couleur, qui ne détermine pas de quelle niveau de réalité il s'agit (la fiction, le documentaire, le film dans le film dans le film, une séquence au banc-titre). Marcel Hanoun, toujours en plans très brefs, filme les tableaux des musées de Bruges, sans doute est-ce le sujet du documentaire de Julien. Il évoque le fantôme de Sophie, sa présence mémorielle et physique, comme il le faisait avec Graziella dans L'Eté. Les personnages de ces deux films sont d'ailleurs en exil, loin de chez eux, dans l'attente de l'autre cet être aimé, dans une autre contrée, un autre temps, un autre cinéma. Prochaine étape : Le Printemps.


















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