L'Empereur
saxon a attribué la ville d'Auracastro dans les Pouilles a un
valeureux chevalier. Pas de chance pour lui, chemin faisant, il tombe
sur une horde de barbares hongrois venus piller la ville et massacrer
les habitants. Et ceux que le chevalier avait aidé à se défendre
contre les barbares, sont des vauriens et des voleurs qui en
profitent pour s'emparer de ses biens et notamment du parchemin qui
déclare l'investiture impériale.
Ces
vauriens, ce sont Abacuc, le vieux Juif colporteur qui vit dans son
coffre, Mangoldo et son fils Gros-Talon qui s'étaient cachés dans
un tonneau, et Pecoro, bandit de grands chemins. N'étant pas
eux-mêmes de bonnes familles, ils décident de partir en route d'un
chevalier aussi désargenté qu'eux, un chevalier qui acceptera
d'aller jusqu'aux Pouilles. Et cet homme providentiel est Brancaleone
de Norcie (Vittorio Gassman).
Le
Moyen-âge que présente L'Armée Brancaleone dans sa séquence
d'ouverture est poisseux, crasseux et violent, les Hongrois tranchent
les chairs de leurs sabres, sont pouilleux et vitupérant, les
habitants du lieu vivent dans la boue et la fange. Les compagnons de
l'armée sont à moitié nus. L'imagerie chevaleresque du cinéma
hollywoodien (je pense à des films comme Ivanhoë ou Prince
Vaillant) faite de belles images et de romantisme est balayée
par Mario Monicelli.
Le
héros du film est au diapason de ce début de film. Vittorio Gassman
n'a pas son pareil pour jouer les personnages stupides qui se croient
plus malins que tout le monde. Brancaleone est un chevalier
désargenté et débraillé. Abacuc reconnaît immédiatement sa
tente, c'est la seule faite de haillons, comme ses vêtements
d'ailleurs. Brancaleone s'est engagé dans un tournoi. Il est
persuadé de le gagner et de pouvoir épouser la fille du seigneur
local.
Il
avait d'abord refusé la proposition de vauriens, mais comme son
cheval Aquilante (à l'étrange robe jaune), le seul qui ait un peu
de cervelle dans l'histoire, a décidé de fuir. Brancaleone se lance
dans l'aventure, à condition d'être le chef de troupe, un chef dont
chaque nouvelle décision semble plus irréfléchie que la
précédente. Son incompétence, son manque de jugeote et sa
malchance feront le reste, c'est-à-dire provoquer le rire chez le
spectateur et établir un irrésistible satire de l'époque.
Le
voyage sera long, fait à cheval et à pied. Au cours du périple,
cette bien maigre armée va rencontrer quelques personnages
pitorresques. Le film fonctionne comme un film à sketches.
Teofilatto de Leonzi (Gian Maria Volonte) est un autre chevalier
d'origine byzantine que Brancaleone croise. Lui aussi désargenté,
il va suggérer d'inventer une demande de rançon auprès de son père
fortuné. Teofilatto est un peu plus malin que Brancaleone, mais à
peine plus. Il va rejoindre l'armée.
Le
groupe va traverser une ville déserte où ne vit qu'une femme, il va
croiser le moine Zenone, un zélote qui veut partir en croisade et
baptiser Abacuc, il va rencontrer Matilda (Catherine Spaak) une jeune
vierge promise à un seigneur, puis la famille de Teofilatto où sa
tante libidineuse (Barbara Steele) veut fouetter Brancaleone. Et
l'armée croise également un ours et quelques Sarrasins. Entièrement
tourné en décors naturels et se déroulant la plupart du temps en
extérieurs (champs, forêts, rues des vieilles villes).
L'Armée
Brancaleone montre une époque et un pays dévastés par les
doctrines religieuses (Chrétiens d'Occident, d'Orient et Sarrasins
se combattent) et la soif de pouvoir. Tout le monde en prend pour son
grade, Brancaleone comme ses soldats, les seigneurs, les prophètes
de la Chrétienté. Antérieurs au Satyricon Fellini et aux Pasolini
en costumes, le film de Mario Monicelli allie l'humour burlesque et
la férocité critique. Les Monty Python s'en sont sûrement inspiré
pour Sacré Graal.
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