Encore
plus borné, plus bigot et plus calamiteux que dans L'Armée
Brancaleone, le chevalier Brancaleone de Norcie veut aller à
Jérusalem sauver la Chrétienté dans Brancaleone s'en va-t'aux
croisades. On admirera le titre français, pour une fois plus
amusant et plus direct que le titre italien. Il affirme bien l'idée
du caprice strictement puéril du personnage principal qu'incarne un
deuxième fois Vittorio Gassman. Bigot, borné et calamiteux, il
l'est tout autant que cette équipe de pèlerins qui embarque, croix
à la main et foi débordante, sur un navire. Ils croient accoster en
Palestine après avoir traversé la Méditerranée, ils n'avaient
pourtant que ramé quelques minutes. Ils ont en fait traversé un lac et un gardien de chèvres, éberlué, les prend pour des fous. Bigot, borné et calamiteux, il l'est tout autant que cet évêque
qui l'accuse d'hérésie, lui et les autres pèlerins qui vont se
retrouver occis au sabre par l'armée du prélat.
L'armée
constituée dans le premier film n'est plus la même, Brancaleone
retrouve sur les lieux du massacre, auquel il a échappé, quatre
nouveaux compagnons. Un lettré, un aveugle, un estropié et un
paysan. Le groupe s'étoffera au fil du récit. Un soldat teuton qui
avait pour mission de tuer le bébé d'un roi chrétien est le
premier à se joindre au groupe. Suivront un damné qui se punit pour
un péché mortel que l'on ne connaîtra jamais, une sorcière aux
cheveux courts qui est près d'être brûlée par les notables d'une
ville du coin, un nain habillé de rouge qui accuse la sorcière de
lui avoir jeté un sort et enfin, un lépreux couvert d'un linceul. Et le bébé, symbole d'une nouvelle ère au milieu de tous ces morts, est aussi du voyage. Les membres de cette armée passent leur temps à se chamailler et à
faire preuve devant chaque obstacles de lâcheté. Ce sera à qui
sera le premier à s'enfuir en premier et à trahir l'autre pour
sauver sa peau. Les personnages sont pathétiquement comiques et
attachants, même si leur foi est largement compatible avec la
bêtise et l'ignorance.
Les
deux Brancaleone se ressemblent beaucoup, toujours dans une
forme en épisode, qui cette fois sont clairement titrés et
chapitrés. Le chevalier et son armée rencontrent de nombreux
personnages, à commencer par la Mort qui vient l'affronter avec sa
faux, la sorcière discute avec les cadavres d'un arbre des pendus.
Le film pointe une période troublée, plus noire, plus macabre même
si Brancaleone affirme qu'on n'est plus en l'an mil, qu'on est en
période moderne. Cette ironie, Mario Monicelli la prolonge avec cet
affrontement entre deux Papes, Grégoire et Clément, ce dernier
ayant déposé l'autre, chacun se traitant d'antipape qu'un ermite,
perché sur une colonne tel le Simon du Désert de Bunuel,
doit départager. Paradoxalement, le film est très coloré, les
tuniques sont aussi bariolées que les personnages sont hauts en
couleurs. Les aventures se poursuivent en Terre Sainte où un roi de
pacotille se bat, par procuration, contre le prince musulman. En deux
heures, le cinéaste déploie sa critique de la bigoterie. Pas grand
chose n'a changé en mille ans.
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