Un
film de Jackie Chan en 1985 consiste à détruire le décor dans
lequel se déroule l'action. Une idée absolue et radicale d’aller
jusqu’au bout du cinéma : une fois le décor détruit, il est
impossible de revenir en arrière. Au début de Police
story, les fins stratèges de
la police élabore un plan avec de nombreux flics. Ils donnent les
instructions, les policiers doivent les lire puis les passer à la
broyeuse. Ils ont, en quelque sorte le scénario de leur future
scène, chacun ignore ce que l'autre doit vraiment faire, mais tous y
vont. Le commissaire (Bill Tung) est certain de son coup mais tout
dégénère, rien ne fonctionne comme prévu.
Le
bidonville en flan de montagne qui sert de décor à la chasse aux
gangsters est entièrement détruit par des voitures qui dévalent la
pente. C'est très impressionnant de voir ça en plan d'ensemble.
Jackie Chan place souvent sa caméra très loin pour que tout soit
visible par le spectateur. Il vient aussi pour ce grand spectacle,
pas question de miniatures et de carton-pâte. Avant que tout ne soit
détruit, les coups de pistolet, les coups pendant la baston avaient
déjà bien entamé les maisons faites de tôles et de planches. Les
corps des acteurs, donc des personnages, sont également très abîmés
(comme souvent la séquence de générique de fin montre les
accidents).
Police
story est un film sur la
destruction des plans établis, des décors, de l'amitié et de
l'amour. Tout est détruit dans le scénario et tout sera à
reconstruire. Le sergent Kan-kui que joue Jackie Chan veut faire en
sorte que Salina Fong (Brigitte Lin) la secrétaire du big boss de la
mafia, M. Koo (Chor Yuen) témoigne contre son patron. Il faut la
convaincre donc la manipuler avec quelques stratagèmes. Mais ce
qu'ignore le gentil Kan-kui, c'est que la manipulation n'est pas le
mensonge. Or Kan-kui s'essaye au mensonge et tout cela va lui
retomber dessus, aidé par son meilleur ami à la police que joue
avec son visage de beau couillon Mars.
Les
entourloupes de Jackie Chan sont de l'ordre de la comédie burlesque
pure. Il se place dans le théâtre de boulevard avec les portes qui
claquent, les cachettes derrière les rideaux ou sous le lit, bref
tout ce qu'avait Sammo Hung dans Le
Gagnant. Acte un : Mars
fait semblant de l'agresser, Jackie Chan vient la défendre. Elle
accepte d'être protégée par lui. Acte 2 : la fiancée de
Jackie, Mays (Maggie Cheung) croit que Jackie la trompe avec Salina
et s'en va furieuse. Acte 3 : May revient et devient complice de
Salina pour piéger Jackie Chan qui comprend, au bout d'un bon et
long moment, qu'on lui a menti et qu'elles savent qu'il leur a menti.
La
comédie ne cesse que quand l'action reprend car assez vite dans
cette séquence de théâtre de boulevard à rebondissements, les
méchants reviennent à la charge et ils se font un plaisir de
détruire tout l'appartement de Kan-kui, appartement déjà bien
amoché par les tonnes de gâteau que May a jeté sur son fiancé. Et
tout ce processus ne cesse de recommencer. Mensonges, manipulations,
baston puis destruction du décor. La baston la plus élaborée se
trouvant bien entendu en fin de film avec toute une galerie marchande
qui se voit détruite par les dizaines de malfrats qui s'en prennent
à Kan-kui, Salina et May. Le nombre de vitres détruites et
fracassées est immense, le tout filmé sous plusieurs angles (le
truc de Jackie Chan).
Dans
Police story, on ne badine pas avec la moralité. Jackie Chan est le
petit flic face aux autres. Quels qu'ils soient, ils mettent des
bâtons dans les roues. La justice fait à peine son travail (le big
boss est libéré grâce à un avocat véreux). Le chef de la police
préfère le strict respect de la loi et ne protège pas Kan-kui. Sa
fiancée ne le comprend pas. Seul et isolé, il va prouver à tous
qu'ils ont tort. On ne fera pas attention aux incohérences ni à la
misogynie (Maggie Cheung pour son premier film est une godiche mais
elle a une belle cascade sur son scooter). Jackie Chan se rêvait en
super flic, il le sera parce qu'il est seul à sauver le monde en
justicier sans peur (son visage nerveux en fin de film en témoigne)
dans une franchise qui s'étale sur 20 ans.
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