« Alors
comme ça vous connaissez B.B. » demande le commandant de
Bonnefoi (Claude Piéplu) à la jeune recrue Claude Langmann (Guy
Bedos). Le futur soldat aimerait bien se faire pistonner pour
échapper à la guerre en Algérie ou au Maroc. Il veut être planqué
et il est d'autant plus inquiet quand il voit au cinéma, avec sa
petite amie Tania (Zorica Lozic) les actualités peu réjouissantes.
Les actualités montrent des images des soldats luttant, vaillamment
bien entendu, contre les « terroristes » des colonies de
l'empire français.
Jusque
là la vie de Claude est bien calme, la voix off de Claude Berri
raconte nonchalamment la vie de son alter ego qui commence en août
1955. Claude vit avec papa (Yves Robert), fabricant de casquettes,
maman (Rosy Varte) qui est aussi à l'atelier de casquette mais passe
surtout son temps à chouchouter son fils et petite sœur Arlette
(Nina Demestre). Quand Claude n'aide pas ses parents, il file en
scooter dans les rues de Paris pour rejoindre sa petite amie, coucher
avec elle et aller au cinéma où ils regardent à peine le film.
Alors
comment Claude, casquettier pourrait connaître Brigitte Bardot.
C'est que, comme dans la vraie vie de Claude Berri, Claude Langmann
rêvait de devenir acteur. Quand son piston, ce commandant
qu'interprète avec son ton habituel le génial Claude Piéplu
remarque qu'il est dans le cinéma, il demande s'il connaît
l'actrice. Pour se faire bien voir et par vantardise, le jeune Claude
répond par l'affirmative. Ça doit en jeter et pendant tout le film,
les gradés vont demander au troufion s'il connaît B.B. Comme un gag
récurrent.
Le
piston fonctionne. Mais qu'à moitié. Ah, les adieux à sa famille
sont déchirants. Claude Berri s'amuse de voir ce grand couillon
qu'il a été dire au revoir à plusieurs reprises, comme s'il
partait déjà à la guerre. Il ironise sur ces adieux et les scènes
de famille sont caricaturales, mais de manière très volontaires,
comme des sketches humoristiques pour mieux pouvoir par la suite
aborder la vie à l'armée qui va occuper la majeure partie du
Pistonné. Cette vie à l'armée est abordée de manière quasi
documentaire, d'où cette voix off insistante.
C'est
l'habileté du mélange entre une comédie douce et la vie à l'armée
qui fournit la sympathique saveur du Pistonné. Mais Claude n'est pas
seul dans le baraquement. Il file à Provins pour parfaire son
éducation militaire et on rencontre ses futurs cothurnes. Coluche
joue Marquand un objecteur de conscience qui refuse de porter un
fusil, il fera du cachot pendant tout le film. Claude Melki est Léon
Cudiermann, envoyé comme Claude nettoyer les chiottes par leur chef
(Georges Géret) parce qu'il n'aime pas les vantards.
Ce
sont des souvenirs que Claude Berri raconte où on sent bien la
différence entre le moment vécu, en 1955 où le personnage de Guy
Bedos juge tout cela avec injustice, lui qui connaît B.B. Et est
obligé de passer la serpillière, et le recul qui édulcore les
anecdotes. Le chef est borné mais compréhensif, son adjoint
l'adjudant Clochon incarné par inénarrable Maurice Risch est bête
et discipliné mais s'améliore avec le temps. Toujours et encore
parce que Claude est un bébé mais aussi parce qu'il connaît
Brigitte Bardot.
Celui
qui se réjouit le plus de B.B est le lieutenant Casanova
(Jean-Pierre Marielle). Obsédé par l'actrice, il se persuade que
Claude va la faire venir à la caserne. Il devient le père de
substitution, il l'encourage au tutoiement, « tu peux m'appeler
Paul ». Enfin quelqu'un qui le comprend. Cela dit le chef
l'aidera à faire le mur pour rejoindre une nuit Tania. Pas de bol,
Claude sera mis au cachot. Il va en faire pas mal presque autant que
Coluche. Ça lui convient, au moins, il n'aura pas à faire le
troufion et porter le fusil.
Mais
la réalité l'emporte. Son piston tombe à l'eau et il traverse la
Méditerranée pour le Maroc. Il devient tour à tour éboueur (une
situation agréable, il sort de la caserne, passe du temps avec les
villageois et bouffe bien), médecin (il fait des dispenses à ses
amis, puis il leur donne des aptitudes pour aller au bordel de
l'armée) et finit encore au trou. La quille arrive à la fin du film
avec un brin de nostalgie (la dernière discussion avec le chef).
Mais non, Claude Langmann n'a pas fini à l'armée comme proposé,
sinon on l'aurait su.
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