Biopics
à gogo, films inspirés de faits réels, d'après une histoire
vraie. Cette deuxième quinzaine de février parle de la vraie vie
mais au passé.
Dark
Waters (Todd Haynes, 2019)
Le
meilleur des quatre films est Dark waters de Todd Haynes.
Retour dans les années 1990, l'ère Bill Clinton avec un film
dossier qui n'est pas sans rappeler Promised land de Gus Van
Sant. La différence majeure est que Mark Ruffalo veut défendre les
gens intoxiqués par la pollution d'un géant de l'industrie, cité
dans le film la société DuPont de Nemours. Matt Damon cherchait lui
à arnaquer les paysans avec son gaz de schiste. Le film de Todd
Haynes montre le combat de David contre Goliath avec la prise de
conscience de l'avocat qui change de camp. Filmé avec une lumière
très sombre (on désigne ça comme du réalisme), le combat est
haletant et révoltant comme il se doit. Il reste un peu mou et
répétitif. Le plus gros défaut est le personnage d'épouse de Mark
Ruffalo que joue Anne Hathaway, un rôle ingrat de bonne épouse qui
se plaint de l'absence de son avocat de mari. Elle n'existe que par
lui, on a un peu l'impression de se retrouver quand elle est là dans
un film d'il y a 20 ans.
Le
Cas Richard Jewell (Clint Eastwood, 2019)
Si
j'étais un peu méchant, je dirais que le nouveau film de Clint
Eastwood est le premier film de l'ère Trump. Là encore il se passe
sous l'ère Clinton (on l'aperçoit un instant dans une image
télévisuelle d'archive). Film Trump, ça pourrait dire que le FBI
est corrompu à la solde du président qui se contente de répéter
ce que les enquêteurs de l'agence lui disent de dire (tout l'inverse
de ce que fait Trump depuis des mois qui dénonce la prétendue
corruption du FBI). D'autant plus que ce Richard Jewell apparaît
bien comme l'électeur type de Trump. Un gentil gars plein de bon
sens, défenseur du deuxième amendement et fier de sa patrie et de
son armée. Quant aux journalistes, ici une reporter en quête de
scoop, ils ne donnent que des fausses nouvelles pour vendre leurs
journaux. Il faut vraiment se pincer pour voir la scène où elle
comprend combien elle s'est égaré avec un zoom abject sur ses
larmes. Mais je ne suis pas méchant alors je vais dire que le film
est bien raté mais j'aime beaucoup Sam Rockwell parfait en avocat
trublion. Quand Jon Hamm (le sinistre type du FBI) arrive, j'avais
l'impression de revoir Thierry Neuvic qui était dans Au-delà.
Oui, c'est ça Le Cas Richard Jewell ressemble à Au-delà.
Judy
(Rupert Goold, 2019)
On
remonte le passé et on va à Londres en 1968 avec Judy Garland qui
donne son dernier récital pour tenter de remonter la pente et
obtenir la garde de ses deux derniers enfants. Les meilleurs moments
de Judy sont bel et bien les chansons que Renée Zellweger interpète
elle-même, à condition d'aimer les chansons de Judy Garland. Elle
chante la chanson du trolley issue de Meet me in Saint Louis (Le
Chant du Missouri) et l'actrice, comme le personnage, s'illumine. Ce
biopic prend la forme récente qui consiste à n'évoquer qu'un
courte période (c'était le cas du film de Pablo Larrain sur Jackie
Kennedy) tout en noter qu'un moment du passé a transformé à jamais
sa vie. Ici, c'est l'emprise de Louis B. Meyer sur la toute jeune
Gardland à l'époque du tournage du Magicien d'Oz. Ce qu'on apprend
(les pillules pour ne pas avoir ni à manger ni à dormir, les
horaires délirants, la vie sociale inventée par le patron) était
déjà tour expliqué dans le documentaire sur Hedy Lamarr.
Lettre
à Franco (Alejandro Amenabar, 2019)
Je
n'ai jamais su si la phrase de Billie Wilder, si souvent citée par
Michel Ciment, sur Le Journal d'Anne Franck est authentique ou
apocryphe « J'ai eu l'avis d'Anne Frank, j'aimerais bien avoir
celui des nazis maintenant ». Dans Lettre à Franco, on
a l'avis de tout le monde, de Miguel de Unamuno à celui de Frano,
comme si on avait besoin d'avoir l'avis des salauds de l'histoire.
Miguel est d'abord antipathique, obtus, borné. Franco apparaît
stupide (la bouche toujours bée), manipulable (par sa femme bigote
évidemment) et n'avoir pas la confiance des autres généraux
nationalistes. Petit à petit, Miguel va comprendre que Franco est
très méchant, surtout quand ses deux potes (un pasteur franc-maçon
et un professeur communiste) avec qui il prend le café chaque jour
pour longuement discuter sur la vie et le monde, se font arrêter
sans sommation. Dans le même temps, Franco se révèle. C'est donc
un trajet en sens inversé que le cinéaste propose avec une lourdeur
invraisemblable. Le finale consiste au discours de Miguel où il
dénonce Franco sous un déluge de musique sirupeuse. J'imagine que
Alejandro Amenabar voulait faire son discours du Dictateur. Il
vaut mieux lire l'extraordinaire bédé de Carlos Gimenez « Les
Temps mauvais » édité en 2013 chez Fluide Glacial. Lui au
moins ne donne pas la parole à Franco.
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