Pour
la première fois, Charlie Chaplin ne s'en remet pas seulement à une
situation simple pour produire son court-métrage burlesque. Dans
Charlot concierge (The New janitor), il développe non
seulement des gags (basés sur la maladresse de Charlot ici en homme
de ménage qui montre peu d'aptitude pour cette profession), des
personnages et en tout premier lieu le sien où la dualité est
exprimée mais aussi un récit plus solide que tout ce qu'il avait
fait à la Keystone jusqu'alors.
Cet
homme de ménage, ce concierge comme le dit le titre, doit monter au
dernier étage pour aller nettoyer le bureau du patron. Le garçon
d'ascenseur (Al St. John, extrêmement maquillé) se moque de lui en
lui interdisant l'accès à l'ascenseur, c'est dire à quel point son
personnage est en bas de l'échelle puisque même cet employé lui
est supérieur, il a un petit pouvoir. Le petit sourire du garçon
d'ascenseur annonce les prochaines visées sociales de ses films avec
le monde du travail comme univers d'oppression.
Puis
c'est la maladresse habituelle de Charlot qui entre en jeu. Il ne
fait pas attention à ce qu'il fait, rentre dans les objets ou les
utilise comme « armes » dangereuses. Le meilleur gag est
celui du balai qu'il enjambe pour entrer dans une pièce parce qu'il
l'a positionné à l'horizontale. Mais une fois entré dans le
bureau, il tourne le manche du balai à la verticale. Puis ce sera la
secrétaire qui va le distraire dans sa tâche, il n'a d'yeux que
pour elle, elle l'observe laisse faire ses facéties en rigolant.
Le
ménage se poursuit avec le lavage des vitres. Comme indiqué plus
haut, Charlot est au dernier étage d'un immeuble de bureaux. Il se
penche à la fenêtre avec une vue dans le vide, il propose là du
sensationnel (à la Harold Lloyd, mais avant lui) avant que le
burlesque ne reprenne le dessus. Le contenu de son seau de lavage se
déverse sur son patron qui se trouvait sur le trottoir devant les
bureaux. Le patron un « gros plein de soupe », ici
caricaturé ostensiblement, va virer Charlot sans ménagement.
Le
film propose une histoire secondaire, là aussi c'est une première
fois, située dans le bureau adjacent. L'un des employés a des
dettes de jeu. Le patron refuse l'avance et l'employé décide de
dérober l'argent dans le coffre. Seulement voilà, tout cela n'est
pas simple. Un léger suspense se met en place car l'employé menace
d'un pistolet la secrétaire, amoureuse de lui, et se révèle un
fieffé voleur. La violence est telle que l'employé va étouffer la
secrétaire pour la faire taire, elle va s'évanouir.
Je
parlais de dualité du personnage de Charlot. Elle arrive à ce
moment-là. Lui qui était si maladroit pour faire le ménage s'avère
très audacieux pour sauver la belle secrétaire. Avec sa canne, il
va désarçonner l'employé et se saisir du pistolet. La police
arrivé sur les lieux, évidemment une fois que tout est fini, pense
que Charlot est celui qui voulait voler le patron. L'injustice est
déjà au cœur du récit de Chaplin mais le patron clame l'innocence
du concierge et le récompense.
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