La
meilleure séquence de The Last movie, et de loin, on la doit
à Samuel Fuller dans son propre rôle de cinéaste plus haut en
couleurs que jamais qui lance ses ordres à son équipe, à ses
interprètes avec un revolver, comme dans une icône de son génie.
Le cinéaste incarne ici un cinéaste qui tourne un film au milieu du
Pérou, il met en scène une combat de cow-boys où les coups de feu
fusent de tous les côtés, où les hommes sautent des toits et
s'écrasent sur le sol.
Samuel
Fuller n'apparaît que quelques minutes mais elles sont suffisantes
pour donner du relief à un film qu'on dirait constamment sous
léthargie, sous une drogue dure que Dennis Hopper devait consommer
pendant le tournage de son film. Quand The Last movie est
ressorti l'été dernier, l'histoire du tournage du film était
passionnante, elle a été racontée à longueur de journaux, car il
faut bien le dire, le film est assez épouvantable.
Mais
cette séquence avec Samuel Fuller sert de matrice à tout le film,
elle sera ensuite reproduite ad libidum, comme un exemple à suivre,
comme une mise en abyme à l'intérieur d'une mise en abyme, dans un
jeu de miroir sans fin. Ainsi les Péruviens vont rejouer au cinéma
avec une caméra en bambou, un faux cigare à la bouche et un faux
revolver, tout en gueulant comme Samuel Fuller dont la voix et le
charisme ont dû impressionner les figurants.
Au
milieu de ce chaos, de cette confusion dans le tournage, Dennis
Hopper joue un cascadeur, en tout cas, il se présente comme tel.
Effectivement, dans le finale du film, on le voit tomber à plusieurs
reprises dans la scène de gunfight prétendument tournées par
Fuller. Dennis Hopper est Kansas, que tout le monde méprise sur ce
tournage, un membre de l'équipe devenu un paria à cause de sa
bêtise, de son machisme, de sa violence.
L'autre
séquence marquante est celle d'un long repas où des Américains
discutent entre eux avec des rires gras, des gestes inappropriés,
des propos salaces. Le personnage de Dennis Hopper s'est entiché
d'une jeune femme qu'il traite comme une moins que rien. Certes
Dennis Hopper cinéaste n'est pas tendre avec Dennis Hopper acteur
mais le film a du mal à se débarrasser d'une certaine complaisance
dans la scène de cul qui s'apparente à un viol et filmé sans
fards.
Dans
ces discussions entre blancs, entre Américains, il ressort une gêne
durable et franchement pénible. Dennis Hopper montre le
néo-colonialisme de l'industrie hollywoodienne qui délocalise ses
tournages dans le tiers-monde, comme on disait en 1971. L'ironie de
la chose étant que Dennis Hopper tourne justement son film au Pérou
dans une production Universal, encore une fois une mise en abyme.
Le
studio n'a jamais su quoi faire de ce film trop long, sans scénario,
au budget dispendieux. The Last movie est sorti 17 ans après
son tournage suite au succès de Colors en 1988. Pas étonnant
que Dennis Hopper figure comme une figure christique en début et fin
de film dans la longue séquence de la procession religieuse, sans
soute les scènes les plus impressionnantes du film, une vision
documentaire aléatoire mais aujourd'hui précieuse.
Le
film subit une déstructuration radicale. Pour Dennis Hopper, pas de
début, pas de fin, pas de récit central. Le titre du film apparaît
au bout de 25 minutes, plus d'un quart d'heure après la mention « a
film by Dennis Hopper ». De la même manière, à part le sien,
pas de rôles principaux, à peine de personnages, mais il a fait
venir plein de ses amis acteurs et comédiens dans son trip égotiste
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